Curiosité partagée ~ +Aden

Cela faisait un jour que Syndeï était rentrée à la capitale après avoir passée près d'une semaine dans les bois, à l'avant-poste de fortune établi par Heda et son partie de guerre. Syn se réjouissait d'avance de retrouver son quotidien plutôt tranquille. Elle était tanneuse et avait bien du travail qui l'attendait et c'est non seulement avec l'aide d'Irma qu'elle profiterait de cette journée pour avancer ses commandes. Syndeï avait cependant besoin de quelques ingrédients qui manquaient à sa réserve pour pouvoir accomplir pleinement la phase de tannage. Bon nombre de peaux de bêtes rapportées étaient dans l'arrière boutique, étendues pour sécher. Les chasseurs qui avaient rapporté ces marchandises étaient en accord direct avec Syn, et elle ne pouvait pas retarder ses commandes. Elle avait d'ailleurs plusieurs peaux de daim et chevreuil qui l'attendaient. Peaux qui demandaient énormément de temps. Elle se passa une main dans les cheveux, hésitante et frustrée à la fois, soupirant d'exaspération en voyant tout ce qu'il fallait faire encore et ce qu'il lui manquait pour pouvoir le faire.

- Je vais aller au marché voir ce que je peux trouver. - annonça-t-elle à Irma, avant d'enfiler sa veste et de sortir promptement de la tannerie.

Foule, rassemblement, tout Polis était en mouvement constant depuis que le soleil était haut dans le ciel. Malgré les températures plutôt douce pour cette saison, elle garda à l'esprit ce pourquoi elle était sortie. Elle se frotta les mains, soufflant dedans pour garder la chaleur et les protéger du froid puis elle s’immisça dans la foule pour aller scruter les étals des commerçants. Le brouhaha ambiant ne la distrayait pas de son but. Poudre d'ocre, huilde de lin... Chaque ingrédient passait et repassé en boucle dans sa tête pour ne  pas qu'elle en oublie. Elle n'arrêtait pas de se le répéter et éviter en même temps les différents appels que pouvaient beugler les commerçants. Elle traçait sa route, tout simplement. Elle n'avait pas de temps à perdre.

Elle finit par arriver, un peu essoufflée, près d'un étal où résidait plusieurs huiles dans des bocaux fait en argile. - De l'huile de pin, vous avez ? -  demanda-t-elle à la vendeuse. Mais sans compter sur le fait qu'elle avait omis que tout le monde ne parlait pas la langue de ces êtres venus du ciel. Elle ferma les yeux un court instant, jurant dans sa tête et repris à nouveau. - Yo gada eni oil tri in ? - La jeune femme acquiesça d'un hochement de tête et Syn lui sourit attendant qu'elle lui en fournisse une bouteille. Elle ne put s'empêcher de regarder tout autour. Curieuse de savoir ce que les autres terriens fabriquaient. Elle voyait des enfants jouer dans la rue. Elle s'imaginait à leur place, à leur âge, avec ses sœurs et ça lui mit le sourire aux lèvres. Tout cela lui manquait. Tout cela était dans son passé, bien enfouis. Elle regagna l'attention de la jeune vendeuse qui lui tendit son dû en échange de quelques pièces. Syn sortit alors des pièces de cuivre de sa poche et lui tendit d'un air dégagé. - Mochof. - Elle s'éclipsa alors en vitesse du comptoir et alla trouver le dernier ingrédient qu'il lui fallait. Mais elle était tellement dans ses songes qu'elle ne vit pas le jeune garçon qui était posté derrière elle et se heurta violemment à lui. - Ai yu raun! - Bien sur de part son air condescendant, voyant qu'il s'agissait là d'un gosse, elle grogna légèrement, les dents serrées, la mâchoire crispée. Elle remarqua que son huile s'était déversée légèrement sur le sol et elle venait probablement de perdre la quantité pour un tannage et ça ne pouvait lui faire que plus plaisir. Ironiquement parlant. Elle fixa le jeune garçon de ses yeux noirci par la colère et non seulement elle ne sut quoi lui dire, mais en plus de ça, elle savait qui il était. Aden. Le jeune natblida que Lexa entraînait et qui était le plus prometteur pour le prochain conclave qui aurait lieu. Elle ne lui avait jamais adressé la parole, étant bien trop occupée et de même de son côté.

Elle ignorait si il fallait qu'elle s'excuse auprès de lui ou si seulement elle pouvait dire quelque chose. Après tout, il était peut-être le futur Heda. Elle était un instant en admiration devant lui. Si jeune et déjà si prometteur pour l'avenir de leur peuple. Alors elle entama les présentations. - Tu es Aden, c'est ça ? - dit-elle pratiquement sûre d'elle. Elle laissa le silence planer un instant entre eux avant d'ajouter fièrement. - Moi c'est Syndeï, mais tu peux m'appeler Syn. - Elle s'accoutumait déjà de banales formalités et ne prononça même pas un reproche quand à la perte récente de sa marchandise. Elle n'avait qu'une envie, c'est apprendre à le connaître et en oublier complètement la course qu'elle s'était entrepris à faire.

hrp:

Aden aimait Polis. C’était la ville où il avait grandi, celle qui représentait directement ce qu’il devait protéger, ceux qu’il devait protéger. Il n’était pas rare de la voir errer dans les rues, quand il n’avait pas un entrainement ou une leçon donnée dans la tour. D’autant plus qu’il y avait un entrain nouveau dans la ville, maintenant que Heda était revenue, avec elle son armée et des étrangers dont Aden ignorait encore s’il devait leur faire confiance – donc, il leur offrait le traitement de sécurité, celui de la méfiance. Les choses allaient changés, Aden y était préparé. Penser que la vie était statique était une erreur et s’il voulait être un représentant fiable des Nightbloods, c’était ce qui était attendu de lui. Ne pas être fermé à la nouveauté, mais la considérer prudemment. Oh, il n’avait pas vraiment son mot à dire, pour le cas des skaikru. Mais certains s’intéressaient de son opinion. La veille, il avait discuté avec Heda à ce sujet et Titus, à de nombreuses reprises, demandait aux initiés ce qu’eux, auraient fait. C’était un entrainement, une simulation de ce qui se passait à l’extérieur des murs de la tour.

Un extérieur dont Aden ne se lassait pas, comme il se retrouvait sur le marché, déambulant sans réelle raison, ou alors celle de prendre l’air avant que son prochain cours ne commence. Il s’imprégnait de la vie, de la fébrilité de chacun. Et en fut définitivement bien imprégné quand une jeune femme lui rentra dedans. Il marqua un pas en arrière, pas le moins déstabilisé, puisque le corps entrainé aux coups. Non, il recula, aussi surpris qu’il pouvait l’être, détaillant la jeune femme qui le remit en place à l’aide d’une remarque en trigedasleng. Aden fronça un peu les sourcils, retenant de lui faire le même reproche. Il savait que l’emportement ne mènerait à rien et ce n’était qu’une petite bousculade. Il n’avait aucune raison de rendre l’énervement. Ainsi, il garda la silence, ses yeux verts glissants sur le flacon qui s’était renversé au sol.

Aden se décala un peu, alors, se tournant vers l’échoppe que la jeune femme venait de quitter – il la connaissait de vue. Mais il connaissait presque toute la ville de vue. Ce n’était pas évident, de remettre un nom. « Tu es Aden, c'est ça ? » Il lui jeta un coup d’œil, un peu plus long. Donc ils se connaissaient bien. « Sha. » Lâcha-t-il après de longues secondes. Le comportement avait changé, chez l’inconnue et il ne vit plus aucun ressentiment chez elle. Est-ce que ça veut dire qu’elle ne le considérait plus comme le coupable de leur bousculade ? « Moi c'est Syndeï, mais tu peux m'appeler Syn. » Il acquiesça, avant de parler à la vieille commerçante, à l’aide du trigedasleng qui lui venait plus facilement que n’importe quelle autre langue. « La même chose. » Et en une trentaine de secondes, il recevait à son tour un pot d’huile de pin, dont il ne paya rien. De l’avantage d’être un potentiel futur commandant. L'objet resta peu en sa possession, car il se tournait déjà vers celle qui l'avait bousculé. « Tiens, Syndeï. » Le choix du nom était légitime à ses yeux. Il la connaissait à peine, et la considérait avec le même respect que n’importe qui, la considérait avec la même distance que n’importe qui.

Elle n'était pas sensée s'égarer sur de telles accoutumances et surtout pas après avoir bousculer un enfant. Mais Aden n'était pas n'importe quel enfant qui pouvait bien peuplé la capitale. Il était un Natblida, Nightblood, enfant légitime de porter le poids de tout un peuple, le poids du commandement lorsque Lexa perdrait la vie, si t'en est qu'elle la perde un jour. Enfin, bien sur qu'elle la perdrait, après tout, elle n'était pas éternelle, comme tout le monde ici; Elle était faite de chair et de sang et malgré que son sang soit d'origine noire, bien que la jeune tanneuse ne sache pas vraiment la définition de ceci, elle n'était pas exempter par la mort elle-même. Mais Syndeï pensait que ça n'arriverait pas avant bien des années. Elle aurait tout le temps de vivre encore longtemps. Tout comme le petit Aden, qui de toute évidence avait suivit une éducation saine et respectueuse pour son peuple.

Syn ne put détacher son regard de l'enfant. Il lui passa sous le nez et Syn n'eut qu'un simple réflexe d'écarter sa marchandise de devant elle pour le laisser passer. Elle n'avait pas bougé d'un pouce, comme si ses pieds étaient encrés à même le sol. L'empêchant de s'enfuir ou de ne serait que le stopper dans son élan de bonne foi. Elle tenait fermement le peu qui lui restait de l'huile de pin qu'elle avait acheté et elle fut étonnée de voir que la vendeuse était partie en rechercher. Syn ne comprenait pas encore le pourquoi de tout ceci. Ce n'était que de l'huile après tout. Mais elle se surprit à avoir un petit sourire en coin de complaisance envers le jeune garçon. Elle fronça les sourcils alors que ce dernier se retourna, les mains non vide, resserrant une bouteille d'huile de pin. - Tiens, Syndeï. - Elle eut un moment d'hésitation, un léger recul et regarda Aden dans les yeux. Elle essaya de discerner ses intentions en faisant cela, mais tout ce qu'elle voyait c'était le respect. Elle finit par lui tendre la main et prit la bouteille sans un mot. Elle ravala difficilement sa stupidité tout en ne quittant pas l'enfant des yeux.

- Pourquoi ? - demanda-t-elle, soucieuse. - Je t'ai pratiquement hurler dessus. Tu n'avais pas à faire ça... - A ces mots, elle se redressa et laissa échapper un rire de contenance. Elle ne savait pas quoi lui dire. Peut-être qu'un merci suffirait, c'est même certain, mais son incompréhension fit qu'elle resta là à le dévisager comme si il était le seul enfant qu'il restait sur cette Terre. - J'ai l'impression d'avoir une dette maintenant. - Ça en devenait presque gênant. Pour lui comme pour elle. Elle ne pouvait pas le laisser partir, pas maintenant qu'elle avait perdu autant de son précieux temps et qu'il lui avait gentiment rendu la perte causée par la bousculade.

- Tu n'as pas une leçon ou un entrainement à suivre aujourd'hui ? - Elle était bien trop curieuse, et ce n'était pas une façon de s'esquiver ou quoi que ce soit, non, elle voulait seulement connaître son programme de la journée. Mais elle l'imaginait le plus souvent à travailler, à apprendre de Heda ou bien à s’entraîner avec Titus et les autres Natblida. Pour elle, être un élu était une tâche bien difficile et surtout, leur vie se résumait clairement à cela. Il n'était plus de simple enfants qui pouvaient jouer et rigoler dans les rues, ne se préoccupant pas spécialement du dérangement que ça pourrait occasionner. C'était une tâche difficile pour ces jeunes et Syn reconnaissait le fait que c'était difficile. - Enfin.. loin de moi l'idée de te retenir de quoi que ce soit. Si tu as mieux à faire, je comprendrais. - Il s'agissait là d'une potentielle invitation, formulée d'une façon plutôt explicite, mais elle avait levé sa main devant lui pour qu'il la saisisse et qu'ils aillent ailleurs pour discuter. Mais cela pourrait l'intimider ou je ne sais pas, tout simplement ne pas l'intéresser.

Aden ne lâchait pas Syndeï du regard, un peu comme un animal qui suivait une bête curieuse, le tout de manière plus civilisée. Le vert lisait la réaction de celle qui avait été bousculée, ne dissimulant pas l’amusement discret quand la jeune femme fut surprise par le geste de l’initié. Pour autant, il ne se rétracta pas et attendit, la patience dans les gestes, que l’huile de pin soit acceptée. Ce qu’elle fut, après quelques secondes. « Pourquoi ?  Je t'ai pratiquement hurler dessus. Tu n'avais pas à faire ça... » Le temps habituel que Aden prenait pour répondre laissa un rire s’élever de la gorge de Syndeï et, à ceci, il haussa légèrement son sourcil, avant qu’il ne retrouve sa neutralité à toute épreuve. Bien que l’absence de tension dans sa posture prouvait qu’il n’avait rien d’hostile envers la brune. Qui était une connaissance de Heda. Voilà. Il se souvenait. Il l’avait déjà vu en compagnie de son mentor et il observa un peu mieux la jeune femme, sans chercher à comprendre l’origine de la relation avec leur commandant : ce n’était pas son rôle et c’était loin d’être sa place.

« J’ai l'impression d'avoir une dette maintenant. » Aden secoua la tête, un geste bref et concis, alors qu’il s’expliquait enfin. « Tu n’en as pas. » Il se redressa un peu mieux, ses mains retournant dans son dos, tandis qu’il se déplaçait un peu pour laisser l’accès au magasin aux éventuels clients. « Ton huile s’est renversée. » Il ne dit en rien qu’il était responsable, car il ne se considérait pas comme tel. « T’en rendre est la meilleure manière de te prouver que je ne voulais pas de mal. » Aden n’avait rien à eu à prendre à demander un peu plus du liquide, ni rien à payer. C’était une sorte de gage de paix, pour calmer la colère de Syndeï ; ce qui avait manifestement fonctionné. Il était ainsi, le Nightblood, fonctionnait avec sa tête, depuis si longtemps que ce genre de raisonnement lui venait instinctivement. S’il pouvait concilier en faisant preuve de générosité, il ne s’en priverait pas. Il n’y avait là aucun signe de faiblesse. Aden n’avait rien perdu et franchement, quelle image donnerait-il de lui, s’il s’emportait pour si peu ?

Une main lui fut tendue et cette fois-ci, il y eut une curiosité naissante dans ses yeux, qui se posèrent à nouveau sur la tanneuse. Où voulait-elle l’emmener ? Il considéra la question de Syndeï, levant les yeux vers le ciel, cherchant la position du soleil. Puis, il se tourna vers la Tour du Commandant, bien visible d’où ils étaient – visible de partout dans Polis, même à des centaines de mètres de là. Il considéra la proposition, avant de hocher la tête. « J’en ai, oui. Je peux te suivre, je partirai quand le temps sera venu. » S’il était bien une chose qu’il ne raterait jamais, Aden, c’était ses leçons. Ce serait un manquement à ses obligations et une absence cruelle de respects envers ses enseignants, ce qui était impensable pour lui. Et il reporta son attention sur la main tendue, qu’il ne saisit pas. Non. Aden resta droit, presque en alerte constante. Il eut un geste de tête, qui l’invita à se mettre en route. « Je te suis. »

Syndeï ne savait pas trop comment réagir à ce petit accrochage qui n'en était pas vraiment un. Après tout, le hasard a fait que la tanneuse, avec hâte, était venue heurté le jeune Aden et non sans mal. Mais ce dernier lui rendit dignement en lui offrant une consolation sans pour autant en être le fautif. Ce qui surpris de bien des façons la brune qui dévisageait inlassablement le jeune garçon. Elle n'arrivait pas à détacher son regard. Finalement les enseignements l'avaient bien forgé à devenir meilleur et tel que le voudrait et serait un prochain Heda. Il était attentif et compréhensif envers son peuple. Finalement cette situation ramena le sourire aux lèvres de la sauvage qui s'adoucit et tout deux s'écartèrent du commerce pour éviter de bloquer le passage.

Syndeï n'avait jamais eu affaire à un Nightblood auparavant qui portant étaient placé aux mains de Heda bien tôt. Elle ne savait pas vraiment comment s'y prendre pour l'aborder mais elle ne se défila pas et lui demanda par pure curiosité si il n'avait pas mieux à faire que de rester là en sa compagnie. J’en ai, oui. Je peux te suivre, je partirai quand le temps sera venu. De par cette simple réponse, elle comprit qu'il avait pris congé pour se ressourcer un peu dans sa ville mère. Elle hocha la tête en gardant à l'esprit qu'elle ne devrait donc pas s'en accaparer trop longtemps. Mais elle ne put retenir cette excitation qui la gagnait alors qu'elle avait la possibilité de partager un peu de son précieux temps. Et qui plus est, sur son accord direct. Elle inclina légèrement la tête, par respect tout en retirant sa main tendue, qu'il ne voulait pas saisir, bien que Syn comprit pourquoi et elle lui indiqua de prendre les devant pour le seconder dans sa marche.

Après avoir triomphé de la foule, un pas suivant l'autre, elle finit par arriver à sa hauteur et sans trop savoir comment couper court à ce silence qui venait de s'installer entre eux, elle ne put contenir cette question plus longtemps. Se raclant brièvement la gorge et posant ses mains sur ses hanches, tout en continuant à marcher, elle posa son regard sur le jeune élu et fit sa demande. Comment as-tu su que tu étais... Natblida ? Qu'est-ce qui vous différencie tant des autres enfants ? Cela valait bien sur deux questions, mais l'intention était là, elle voulait connaître cette identité propre aux élus, propres à Heda car elle aussi était une élue avant son règne. Elle se devait de savoir car elle n'aurait osé poser la question à son commandant. Elle la posa donc à lui. Après tout, elle était aussi bien une protégée de Lexa, mais pour diverses raisons. Elle voulait connaître et apprendre de ce jeune garçon, qui devra peut-être porter autant de responsabilités plus tard.

hrp:

Aden répondit à la marque de respect de Syndeï, s’inclinant à son tour, modestement, avant de prendre les devants comme elle l’invitait à le faire. Bien, alors, ce serait à lui de choisir où ils se rendraient ? Soit. Il avança, sans s’inquiéter de leur destination, se mouvant avec aise dans la foule, détournant très peu de sa trajectoire, déplaçant les gens avec de simples gestes quand ils étaient trop proches d’eux. L’avancée était lente, tranquille, l’initié profitant simplement du moment, quand la voix de sa compagne brisa le faible silence. « Comment as-tu su que tu étais... Natblida ? » Il pencha un peu la tête sur le côté, ne s’arrêtant pas vraiment dans sa marche. « Qu'est-ce qui vous différencie tant des autres enfants ? » Visiblement, Syndeï ignorait tout de ce qui était à l’origine de sa vie ici, à l’origine de la vie de tous ses frères et sœurs qui résidaient avec lui dans la tour. Le silence se fit un temps, tandis que Aden reposa son regard sur ce qui se trouvait devant lui, par simple précaution. On aurait pu croire qu’il refusait de répondre, mais bientôt, il ouvrit la bouche. « Est-ce que tu sais ce que signifie Nightblood ? Si tu décomposes le mot ? » C’était beau, franchement, la poésie qu’il y avait derrière tout ça. « Le sang de la nuit. » Oui, franchement. Une belle poésie.

C’était plus que ça et derrière ce mot, il y avait une règle, une tradition. A laquelle Aden n’avait pas dérogé. Elle avait changé sa vie et il était satisfait qu’il en eut été ainsi. Oui, il ne se souvenait pas de ses parents, mais il était attaché à un sentiment plus grand. Celui du trigeda. « Notre sang est noir. » Expliqua-t-il, avec ce calme habituel, alors qu’il s’arrêtait à une échoppe où il demanda deux brochettes de viande. Ce n’était pas un secret, et il trouvait même ça étonnant qu’une vivant à Polis ne soit pas au courant. Mais il savait, aussi, que tous n’avaient pas accès à la même éducation que lui. Ca aussi, c’était un privilège qu’il avait appris à apprécier. « Ca remonte au premier commandant. » Ce qui les rendait éligible à entrer en communion avec l’Esprit de Heda. Sans ça, personne ne pouvait prétendre à trôner au sommet de la tour. Sans ça, Aden aurait été un garçon comme les autres. Le vendeur lui tendit les deux friandises chaudes et l’initié en proposa une à Syndeï, qu’elle l’accepte ou non.

Il gouta le premier morceau de sa brochette, avant de hocher la tête et de remercier le vendeur, en trigedasleng. « Tout ce qu’il a suffi, c’est que je saigne. » Il s’arrêta un moment, alors que les souvenirs, flous, lointains, remontaient à sa mémoire. Il bougea un peu le genou, à peine perceptiblement, comme s’il sentait encore la peau éraflée, avant de se remettre en route. « Tu as déjà vu les enfants. Ils se blessent avec une facilité déconcertante. » Le mystère ne restait jamais entier très longtemps. Le sang appelait le sang. Qu’il soit rouge, ou noir, il retrouverait ses racines, le lieu où il devait être.

Spoiler:

Syndeï n'avait pas vraiment eu l'éducation rêvée par tout le monde ici à Polis. D'un père commerçant, voire troquant le plus souvent ces marchandises pour vivre, ou même survivre, elle était encore bien jeune quand elle due stopper son éducation pour subvenir au besoin familial et ainsi faire honneur à sa famille. Malgré tout, elle n'en restait pas moins bête mais sur certain sujet disons tabou, elle avait du mal à y voir clair et ce côté un peu spirituel, presque occulte pour la jeune terrienne, c'était quelque chose qui la fascinait. Encore plus lorsqu'il s'agissait des Natblida, ou Nightblood, comme venait de lui avouer le jeune élu. Elle pencha légèrement la tête dans sa direction et l'écouta avec attention, malgré que ses prunelles dorés voguaient entre lui, sa marche et le vendeur qui tendait de succulentes friandises au garçon. Syn avait un fin sourire qui commençait à étirer ses lèvres. Elle était bien, heureuse et accepta sans rechigner la brochette que lui tendait son vis à vis. Elle en avait complètement oublié son travail qui l'attendait à la tannerie.

Elle prit une première bouchée, dont ses babines se languissaient déjà d'y goutter et tout en imitant son comparse, ils reprirent la marche et ainsi Aden continua son récit. ─ « Le premier commandant ? Je me demande bien de quoi il avait l'air. » Syndeï savait tout de même que certains terriens avaient le sang noir, ce n'était pas une révélation, elle l'avait d'ailleurs constater à plusieurs reprise, sur d'autres enfants et surtout sur la commandante. C'est un signe selon le jeune garçon d'une possible éligibilité à trôner et posséder l'esprit de Heda. C'est dont ça qui les différenciaient tant ?  Syndeï était intéressée sans en être vraiment étonnée. Son sang était rouge, le sien noir, voilà simplement la différence. Elle toisa de ce fait Aden qui semblait être dans ses pensées, préoccupé et puis elle finit par le bousculer légèrement d'un coup de hanche lorsque celui-ci affirma que les enfants étaient imprévisible et très casse-coup. Elle en riait. Elle s'identifiait même à cette description. C'était apaisant de passer du temps sans se prendre la tête et à parler de tout et de rien à la fois. Syndeï savait que fouiner dans le passé des commandants ne lui ramènerais pas nécessairement les réponses qu'elle voudrait mais soit, elle aimait beaucoup trop en savoir. Elle voulait rattraper ce temps perdu, le temps où elle a du prendre ses responsabilités en main, très tôt, beaucoup trop tôt.

─ « Du coup, tu sais quoi de ce premier commandant ? Heda vous en a-t-elle dis un peu plus sur lui ? Ou elle ? » Il est vrai que Heda n'a jamais été un homme, du moins c'est un fait et c'est ce que crois Syn. Les leaders sont le plus souvent des femmes et Syn en était satisfaite, voire fière. La valeur de la femme était reconnue au moins. Mais ce n'est pour autant pas un affront du fait que si Aden, un jour, devient Heda soit mal vue par celle-ci, non elle respecte Heda et du fait même les choix de son esprit. ─ « Comment ça se passe d'ailleurs, lorsque Heda meurt ? Le choix est-il du au hasard entre chaque Natblida ? » Là une fois encore elle ignore l'étendu de tout ce qui suivrait la mort de Heda. Bien qu'elle ne désire pas que cela arrive, elle apprécie bien trop Lexa pour la voir partir, même si elle sait qu'un jour ça arrivera et elle redoute ce jour comme elle redoute la fin de la coalition. Mais elle l'espère le plus tard possible. Elle s'interroge seulement sur les procédures d'élection du nouveau Heda et si vraiment c'est leur sang uniquement qui fait toute la différence.

Au fil des paroles d’Aden, celui-ci les amenait à l’extrémité du marché, la foule diminuant légèrement, loin des échoppes et des arrêts constants des badauds. Syndeï, celle qui entretenait une relation amicale avec Heda prêtait attention aux propos du Nightblood et il fut satisfait que cela ne soit pas qu’une conversation de routine, que l’intérêt de la jeune femme soit nourri, d’une certaine manière. Il y eut une interrogation sur le premier commandant et Aden haussa légèrement les épaules, après que quelques secondes se soient écoulées. On lui en parlait peu, car il ne devait pas tant se concentrer sur le passé. Il savait que c’était une femme qui avait pris soin des premiers survivants de Polis. Titus semblait nourrir un culte à l’esprit du commandant, mais Aden n’avait pas la même ferveur. S’il était choisi par cet esprit, toutes ses questions obtiendraient des réponses. Ainsi, il cultivait son temps à s’intéresser à des matières plus importantes, plus urgentes, plus récentes. Il s’intéressait à Polis, aux forces des clans, à ceux qui l’entouraient. Il reçut un coup de hanches de la part de Syndeï et celui-ci se figea un peu, n’appréciant pas ce genre d’échange. Il fronça des sourcils, puis la désapprobation disparut de ses traits alors qu’il retrouva son calme naturel.

« Du coup, tu sais quoi de ce premier commandant ? Heda vous en a-t-elle dis un peu plus sur lui ? Ou elle ? Comment ça se passe d'ailleurs, lorsque Heda meurt ? Le choix est-il du au hasard entre chaque Natblida ? » Syndeï avait assurément beaucoup de question et il lui adressa un bref sourire sympathique, avant de manger un autre morceau de sa brochette. Aden prit une brève inspiration, jetant un regard vers la Tour, avant de considérer de répondre à chacune des questions, posément, à son rythme, avec l’anglais parfait qui roula sur sa langue. « Heda ne nous en a pas parlé. » Quand il avait l’occasion d’être en présence de son mentor, avec ses frères et sœurs Nightblood, les leçons étaient d’un autre genre, pour apprendre la vision de Heda et leur permettre d’apprécier pleinement les actes qu’elle posait, les respecter et les prolonger quand le temps sera venu. « Ce sont nos précepteurs qui le font. Titus, le fleimkepa, nous en a beaucoup parlé. » Il marqua un temps d’arrêt, bref, le temps d’une inspiration, alors qu’il pensait à celui qui régissait leur apprentissage. « C’était une femme du nom de Becca. Elle est arrivée à Polis un peu après la destruction du monde et a aidé nos ancêtres à survivre. » Il mâchonna sa brochette, terminant ce qu’il avait en bouche, avant de reprendre. « Sans elle, aucun de nous ne serait ici. » Il y avait cette gravité, qui n’allait pas vraiment à un enfant, mais Aden n’en était plus vraiment un.

Il s’arrêta au niveau d’un muret et il s’installa sur celui-ci avec aisance, son regard reposant sur les habitants de la ville qu’il reconnaissait et qu’il observait dans leur routine quotidienne. « A la mort de Heda. » S’il n’y eut aucune grimace sur son visage, le coin de ses lèvres se pinça un peu. « Le conclave est mis en place. Pour décider de celui qui recevra l’esprit du commandant. Il n’y a pas de hasard. » L’idée même était absurde à ses yeux, quand il était le réceptacle d’autant de préparation. Mais rien dans son ton ne trahi le fond de sa pensée, car il ne pouvait en vouloir à l’ignorance d’aborder des pistes qui ne viendraient pas à l’esprit d’un initié. « Une grande partie des Nightblood y meurent. » Une grande partie des Nightblood seraient tués, certains par sa main et le pensée, si elle ne lui plaisait pas, ne l’effrayait pas pour autant. C’était son rôle et il y était préparé.

Syndeï écoutait attentivement chacune des paroles du jeune élu et elle en était émerveillée. A vrai dire, elle était rancunière du fait qu'à cause de sa famille son éducation avait été interrompue promptement et elle n'avait donc jamais connu cette Becca. Elle n'était pas non plus une fervente de lecture et les anciens livres de la bibliothèque de Polis, elle n'y avait jamais touché. Elle n'était pas encline à apprendre de cette façon. Pour elle le meilleur apprentissage, c'est le fait de façonner ses connaissances sur le terrain. Elle continua à déguster sa brochette alors que le jeune garçon retranscrivait son éducation avec la brune. Elle avait les yeux humides, non pas de larmes mais ils étaient brillants par cet apprentissage. Elle n'espéra pas moins de la bouche de Aden. Elle le suivit un peu à l'écart de la foule, s'en pour autant le retoucher comme il avait eu une réaction un peu fermée quand au coup de hanche, elle ne préférait pas surenchérir avec lui. Elle le respectait bien trop pour l'énerver d'avantage.

Puis un nom fut cité. Titus. Elle n'apprécier pas tellement cet homme. Malgré l'importance qu'il a auprès de Lexa et surtout auprès de chacun d'eux, elle le trouvait bien trop fermé et pas assez visionnaire au contraire de Heda. C'est une bonne chose que les nightblood soient entraînés par lui, certes il est le fleimkepa, ici depuis bien des générations de Heda. Il saura être efficace pour les former rapidement. Mais Syndeï se méfiait de lui et c'est pourquoi au son de son prénom, elle ravala difficilement tout en déviant son regard vers la foule encore en marche dans la capitale. Elle ne voulait pas que le jeune Aden voit de la dureté dans son regard. Elle ne l'appréciait pas tout simplement et ne voulait pas blesser le jeune homme si tant est qu'il l'apprécie à son contraire.

Puis elle revint à l'écoute de son compagnon et agita quelque fois la tête pour lui prouver qu'elle entendait bien ses paroles. Elle les buvait même n'était jamais suffisamment abreuvée. Donc c'est cette femme qui les avait tous sauver ? C'est intéressant et Syn aurait aimé la connaître, mais les âges veulent que c'est impossible aujourd'hui. Du moins pas exactement mais c'est ce qu'elle pense, car tout le monde sait que l'esprit des précédents commandeurs se trouvent parmi ceux de Lexa à ce jour. Elle seule doit réellement connaître Becca. ─ « Merci à elle... » murmura-t-elle tout en prenant une dernière bouchée de son en-cas.

Elle reporta ensuite son regard sur le jeune homme et à l'approche des derniers mots de celui-ci, les traits de son visage se raidirent un peu plus. Elle fronça les sourcils et elle n'en revenait pas vraiment d'entendre une telle chose. « Une grande partie des Nightblood y meurent. » Si jeune est déjà condamné à mourir de la main de leurs possible amis. Syndeï n'en revenait pas. Elle déposa la brochette sur le muret où il s'était installé et elle s'approcha de Aden tout en gardant tout de même une certaine distance de peur de le froisser à nouveau. ─ « As-tu peur ? Tu sais que ce sont tes amis que tu vas devoir affronter et que tu ne pourrais pas en sortir vivant... C'est. C'est surprenant et triste à la fois de l'entendre, en fait. Je ne pensais pas que c'était aussi violent comme rituel. » Mais après tout, il s'agissait des terriens. C'est la dure réalité de leur monde et peut-être bien que c'est mieux ainsi. Mais, Syndeï avait envie de prendre ses mains dans les siennes, de le regarder droit dans les yeux pour tenter d'y déceler ne serait-ce qu'une information quant à son état d'esprit. Lui qui montrait peu ces émotions. Mais elle se résigna et préféra plutôt baisser les yeux, tout en ravalant cette révélation. Des enfants, tous voués à un tragique destins. Sauf pour le vainqueur bien sûr. Mais c'est horrible tout de même de se dire que seul un d'eux sortira vainqueur et devra porter à jamais le poids de son titre et surtout de toutes ses morts qu'il aura engendré de sa main pour l'obtenir.

Elle se retourna vers la tour de commandement et soupira. Elle était finalement contente d'être naît avec le sang rouge, malgré qu'elle se sente tout de même mal pour le jeune homme derrière elle. Mine de rien, c'est quelqu'un auquel on peut vite s'attacher et ça n'avait pas manqué à Syn. Elle avait cette boule dans la gorge qui ne voulait pas partir. Maintenant elle espérait qu'une chose, qu'Heda vive encore longtemps pour éviter à ces enfants de devoir s'entre-tuer pour le trône.

Ce n’était pas tout à fait exacte, ce que avait dit Aden. Ce n’était pas une grande partie. C’était la totalité. A l’exception de un. L’unique. Celui qui était choisi par l’Esprit du Commandant pour l’incarner sur terre. Et ils mourront tous de la main d’un frère, d’une sœur. Un de ceux avec qui ils avaient grandi, appris ensemble. C’était l’étape ultime, la plus difficile pour certain. C’était la preuve que le cœur venait après le devoir. Que le cœur ne serait que ça. Un sentiment. Jamais rien d’autre. Et Aden, s’il aimait les autres Nightblood de tout son cœur, ne ferait preuve d’aucune pitié. C’était ce qui était attendu de lui et ce qu’il attendait des autres. Un combat acharné pour porter la mémoire des enfants au sang sombre. Car si la nuit était dans leur veine, elle le serait dans leur vie aussi.

Quoiqu’il en soit, Aden suivit la gestuelle de Syndeï du coin de l’œil, la voyant détourner le regard et il lutta le besoin de sourire, faisant tourner le bâton de la brochette entre ses mains, avant de manger tranquillement le dernier morceau. Pour lui, ça n’avait rien d’horrible ou d’exceptionnel, puisqu’on le lui répétait depuis qu’il était arrivé à Polis. L’Ascension ne pouvait que se faire seul. Les obligations seraient portées seules. Mais cela sembla attirer la compassion chez la jeune femme et il fronça très légèrement les sourcils, quand elle s’approcha un peu plus de lui. La proximité physique, ce n’était pas quelque chose à laquelle il était habitué. Lui, il touchait pour immobiliser, blesser, tuer. C’était tout. Il ne voulait pas risquer un quelconque rapprochement avec une autre âme, car dans sa mémoire était encore fraiche les effets qu’avaient causés la perte de Costia sur Heda, les années n’effaçant rien. Aden ne voulait pas connaitre ça. Il contrôlerait, resterait à distance. « As-tu peur ? » Presque imperceptiblement, il pencha la tête sur la droite, surveillent Syndeï, attendant ses propos. « C'est surprenant et triste à la fois de l'entendre, en fait. Je ne pensais pas que c'était aussi violent comme rituel. » & il y eut un peu de douceur dans le regard d’Aden, se main allant gratter les courts cheveux de sa nuque. C’était touchant, la compassion.

C’était une force comme une autre et Aden savait que, qu’importe le successeur de Lexa, il aurait droit à cette même considération de la part de ceux à l’image de Syndeï. Et il suivit le regard de la jeune tanneuse qu’il avait rencontré par hasard, détaillant aussi la Tour de longues secondes, ses idées se construisant, et après deux minutes de silence, Aden parla enfin. « Pour répondre à ta question, je n’ai pas peur. » La neutralité était à nouveau là sur son visage, dans son anglais parfait. Sa gestuelle posée, comme s’il ne parlait pas du futur massacre de ceux avec lesquels il avait grandi. « La mort n’est qu’une étape et chaque Nighblood tombé reçoit les honneurs qui lui sont dûs. » Et l’honneur, ils vivaient pour ça. « Ne pense pas que c’est une violence gratuite. Pour nos précepteurs, ce n’est pas une chose aisée, que de nous observer nous affronter, nous entretuer. » Il s’en souvenait, lors du précédent Conclave, alors que Lexa arrachait la vie aux siens. Il se souvenait, oui, sans mal, de l’effroi et de l’admiration qu’il avait contemplée. « Prouver que nous sommes capables de tuer ceux qui nous sont le plus chers est la preuve que nous ferons tout pour notre peuple. » Il bougea un peu, continuant de faire bouger la brochette vide entre ses mains, le vert de son regard scrutant quelques passants. « Cela évite aussi les potentielles trahisons de la part de ceux qui n’auraient pas été choisis. » Et ce fut dit de manière un peu plus détachée, encore, car pour lui, c’était la plus grande des aberrations, la trahison. Pourtant, elle était tellement coutume, pour obtenir le pouvoir au sein du trigedakru.

hrp:

Syndeï avait du mal à accepter qu'un tel rituel puisse avoir lieu. Hormis cette compassion qu'elle pouvait avoir envers ce jeune élu, elle n'en était pas moins contrariée. Certes les terriens ont des coutumes assez violentes, voire barbares quant aux sanctions données pour un quelconque crime, même pour certains rituels et prières qui impliqueraient le sang. Mais de là, à penser que des jeunes d'à peine l'âge mûr doivent s'affronter, face à leur courage et leur peur, pour triompher et ainsi avoir l'absolu pouvoir, non, Syndeï n'arrivait pas à le concevoir. Pas même venant d'un de ces élus. Pourtant, c'était une vérité, c'était sa vérité. Ils devraient s'affronter lors du prochain conclave et seul un d'entres eux en ressortirait vainqueur. Un combat à mort pour le trône. Syndeï n'avait toujours pas décroché ses prunelles de la tour de commandement, là où probablement les autres natblidas devaient séjourner. Elle ravala cette nervosité qui grandissait à mesure qu'Aden avoua tout ce qui le rendait fier. Les honneurs. Cependant pour Syn, il y a rarement les honneurs dans la mort. Le corps, tout l'être entier est abandonné au main d'un destin aveugle, envoyé dans l'oubli et tout ce que pourrait dire ou faire le peuple ne changera rien à la fatalité que pour le pouvoir, beaucoup trop doivent périr. Syndeï n'était pas d'accord avec ça, mais après tout, elle n'était qu'un grain de sable parmi tant d'autres au pieds de Heda, au pied du pouvoir. Elle n'était pas spéciale, elle n'était pas importante comme l'était Aden. Elle n'était qu'une jeune femme ordinaire, totalement banale. Alors oui, de son point de vue, il n'y a aucun honneur à recevoir d'être mort.

« Prouver que nous sommes capables de tuer ceux qui nous sont le plus chers est la preuve que nous ferons tout pour notre peuple. » Il ne devrait rien y avoir à prouver. Etre trigeda c'est avoir déjà les honneurs des siens. Etre trigeda ou peu importe l'appartenance à un clan, c'est être reconnu comme tel, c'est prouver déjà son allégeance. En entendant ces paroles, Syn ferma les yeux. Pourquoi faut-il toujours prouver qu'on est capable de retirer la vie pour accomplir de grandes choses ? L'amour est faiblesse. Mais l'amour est aussi une force quand justement tout devient plus sombre. Tuer pour tuer, c'est faire coulé le sang inutilement. Il ne devrait y avoir aucun honneur à tuer pour la gloire. Tuer, c'est justement prouver qu'on a aucune attache, pour une personne comme pour un peuple entier. Tuer, c'est prouver qu'on est capable de tout, du meilleur, comme du pire. « Tu es vraiment décidé à tuer pour faire tes preuves ? N'y a-t-il pas un autre moyen de faire ses preuves que par la mort ? » Cependant tout est toujours question de sang. Le sang doit être venger par le sang. Mais alors, qui vengera ces pertes ? Les natblidas sont des enfants arrachés à leur famille, n'ayant pour la plupart pas choisi de supporter un tel fardeau. « Je ne comprends pas vraiment le but de tout ça. Que dirais les familles des élus ? Que penseraient tes parents si ils te savaient mort ? » Elle laissa le silence planer à nouveau quelques instants. Aden réfléchissait peut-être à tout ceci. Ou bien en était-il déjà pleinement convaincu. Lui mettrait-elle le doute ? Elle, elle en était peu convaincue.

Pour autant, Syn connaissait bien ce que tuer voulait dire et dieu sait qu'elle aurait aimé que la réalité soit tout autre au jour d'aujourd'hui. Car après avoir été abandonnée à un sort tragique, de vivre une vie de solitude, elle a du apprendre et se forger. Elle a du tuer pour vivre et obtenir des réponses, alors oui, du sang, elle en a un paquet sur les mains. C'était pour autant de la violence gratuite mais elle aurait voulu ne jamais être tomber dans ce tourbillon infernal de justice. Elle aurait aimé resté aussi naïve et innocente qu'elle avait pu l'être étant enfant. Car tuer, c'est garder à jamais les fantômes de ceux abattus par nos mains. Et non avoir les honneurs d'avoir fait couler le sang pour la gloire. « Cela évite aussi les potentielles trahisons de la part de ceux qui n’auraient pas été choisis. » Il est vrai que la trahison est fréquente chez les terriens, ils ne connaissent que ça. C'est un point à ne pas négliger en effet. Syndeï ré-ouvrit les yeux à cette réponse. Trahir c'est la facilité et l'intelligence d'avoir dupé pour obtenir ce que l'on désire. « Trahir. » ricana-t-elle en se retournant vers Aden. Elle croisa à nouveau son regard qui naviguait dans la foule. « Gagner ce conclave ne te fera pas être immuniser de trahisons, Aden. » enchaîna-t-elle en pensant notamment aux 12 clans composant la coalition. Peu importe le vainqueur, tous les natblidas ne sont pas issus d'un même clan, alors qu'en penseraient-ils ? Car une personne, ce n'est rien fasse à un clan tout entier.

C’était une conversation intéressant qu’Aden avait là. Ce n’était pas tous les jours que les personnes autour de lui verbalisaient un semblant de désaccord avec les préceptes qui lui avaient été inculqués. Car la plus grande partie de son entourage se constituait de ses professeurs et d’autres guerriers : des individus qui vivaient par le même crédo que lui. Jus drein, jus daun. C’était ainsi et Aden ne remettrait jamais cette parole qui lui avait été enseignée le premier jour qu’il était arrivé à Polis. Et Syndeï ne semblait pas comprendre cette logique. C’était un peu étrange, à son regard, parce qu’il supposait que chaque habitant connaissait la règle, et les autres, toutes aussi intransigeantes. Peut-être que ce n’était que l’exercice de la réflexion qui faisait ressortir ce que pensait réellement cette fille qu’il ne connaissait que depuis moins de 20 minutes. « N'y a-t-il pas un autre moyen de faire ses preuves que par la mort ? » Il ne put retenir un mince sourire, Aden. Ce n’était pas jugeant, ni moqueur. C’était un subtil mélange de compassion, de compréhension et d’affection – de la marque d’esprit, par de Syndeï en particulier. Il détourna son attention de la foule, de cette distraction qu’il se donnait, pour se concentrer parfaitement sur l’échange qui avait lieu. « Si. Nous le faisons tous les jours, en persévérant. En nous améliorant. Nous n’abandonnons pas. Nous ne nous laissons pas briser. » Il y en avait certains, oui, qui n’avaient pas tenus. Ils étaient partis depuis longtemps, eux. « Le conclave est notre plus grande épreuve. Nous sommes préparés toute notre vie, pour celui-ci. Si nous ne sommes pas capables de survivre à celui-ci, nous ne tiendrons pas longtemps en tant que Commandant. L’Esprit choisi le plus vaillant. » Il fronça un peu les sourcils, alors que tout le reste de son corps restait tranquille. Pas de geste nerveux, pas de tic remarquable. « Je ne prends aucun plaisir à tuer. » Ca ne l’offusquait pas non plus. « Si je pouvais, je ne le ferais pas. Mais je ne peux pas m’attendre à ce que ça soit pareil pour la personne qui se trouve en face de moi. La moindre erreur me coutera la vie. » Il prit une brève inspiration, avant de continuer. « Tu peux ne pas cautionner cette manière de faire, cependant, le monde fonctionne de cette manière. Prendre une vie, c’est accepter les responsabilités de cette dernière. Ce n’est pas un meurtre pur et simple. Tu peux voir ça comme une passation. Les marques des guerriers sont là pour leur rappeler. Qu’en eux, il y a le poids de plus d’une vie. » Si Aden en avait eu, ils les auraient montré, ces cinq marques qu’il aurait porté. Mais les Nightblood étaient exempté de cet honneur. Ils étaient l’incarnation même de tous ces morts à portée.

Aden, s’il devenait Heda, porterait les souvenirs de ses frères et sœurs avec une affection toute particulière. Comme le faisait Lexa qui n’oublierait jamais les Nightbloods qui avaient péris sous son épée. « Que penseraient tes parents si ils te savaient mort ? » Pour Syndeï, la réflexion ne s’arrêtait pas, et à l’évocation de ses géniteurs, le goût de miel lui revint en mémoire, ainsi que des visages flous, oubliées. Peu nécessaire. « Mes parents m’ont offert à Polis dès qu’ils ont su que j’avais le sang noir. Je ne les ai jamais revus depuis ce jour. » Il haussa un peu les épaules. Il ne remettait pas en question l’attache qu’un enfant normal devait avoir envers ses parents. Mais il n’était pas un enfant normal, et il était beaucoup plus attacher à tous les précepteurs de la Tour, qu’à ses parents. Et il répondait avec ce même calme, ne montrant aucun attachement, aucune rancune. Que les faits. « Ils vivront avec la fierté de savoir qu’ils ont un fils prétendant au titre de Commandant. C’est plus que ce qu’ils n’auraient jamais pu m’offrir. » Si son sang n’avait été que rouge, Aden aurait été lui-même un paysan, cueilleur de baies et chasseur de miel. Une vie qu’il ne pouvait pas s’imaginer.

Il y eut un ricanement, ce à quoi Aden haussa un sourcil, avant que son expression ne devienne neutre. Pourtant, dans son regard, trônait une dureté particulière, à l’image de celle de Heda, à l’image de ces yeux qui l’avaient scruté depuis qu’il était arrivé ici. Pour elle, peut-être, tout ceci n’était qu’une mauvaise blague. Pour lui, c’était un réel risque qui lui était arrivé de considérer. Il ne jugerait pas. Syndeï n’avait pas ce savoir, de tous ces commandants qui avaient perdus la vie à cause d’un retournement d’allégeance, de ces Nightbloods assassinés en plein milieu de la nuit, pour favoriser un clan plutôt qu’un autre. Syndeï ne savait pas et jamais Aden ne condamnerait l’ignorance. « Gagner ce conclave ne te fera pas être immunisé de trahisons, Aden. » Il garda le silence, peut-être un peu plus longtemps que ce à quoi il était habitué, faisant taire le peu d’offuscation qu’il lui restait face au ricanement. « Le conclave ne se gagne pas. » Ca ne serait jamais une victoire à ses yeux. Et c’était un point qu’il se devait d’éclaircir. « & oui, la trahison planera toujours. C’est pour ça qu’il faut limiter les risques. Chaque action du commandant est jugée, jaugée. Une succession d’insatisfactions de la part d’une personne peut entrainer bien des dangers. Il faut se montrer fort en tout temps, sage, et savoir faire preuve de compassion. » Des mots que Lexa leur avait enseigné depuis bien longtemps, mais qu’ils n’assimilaient que depuis peu. Surtout avec les évènements du Azgeda et maintenant du Skaikru.  

Le silence retomba quelques instants, avant que Aden ne décide de se servir d’un exemple qui serait certainement plus parlant eux yeux de Syndeï. « Heda a beau avoir accompli des actions que personne avant elle n’avait réussi à entreprendre. » Il parlai de la coalition, de la chute de la montagne, aussi. « Il y a toujours des insatisfaits. Le monde n’est pas statique et la nature ne fait aucune distinction entre les clans. Regarde le nombre de Triku qui ont perdu la vie depuis l’arrivée des Skaikru. Pourtant, Heda n’a pas laissé la soif de son propre clan prendre le dessus. Ce choix n’était pas sans risque. Si ce n’était pas Lexa qui régnait, le commandant aurait perdu la vie pour ça. »

HRP:

Syndeï était perdue. Perdue de n'avoir jamais suivit un tel enrichissement de connaissance. Parfois elle regrettait même de ne pas être née avec ce sang noir dans ses veines. Mais au vue de ce que lui rapportait le jeune élu, elle en était finalement soulagée. Elle n'aurait pas pu supporté de vivre ainsi, suivant des principes et être comme endoctriné. Certes, Lexa est un grand commandant et elle l'a respecte pour ça, pour tout ce qu'elle a accompli en tant que tel. Elle le doit à toutes ces années passées à préparer son propre conclave. Enlever une vie, ce n'est pas simple et loin d'elle l'idée d'en être satisfait mais... c'était ce pour quoi ils étaient entraînés. C'était leur plus grande épreuve pour reprendre les mots du jeune homme. Car oui, Aden n'était plus un petit garçon, il avait grandit trop vite et était devenu un homme bien avant l'heure. Mûr et près à tout pour son peuple. Syndeï pourrait lui envier ça, mais ce n'était pas le cas. Elle avait apprit à la dure. Malgré toute cette force de caractère qu'elle a pu emmagasiner durant toutes ces années de solitude, à chercher le responsable de son malheur, elle a du se forger cette carapace et ne serait donc pas apte à diriger un peuple entier pour autant. Elle n'aurait pas cette sagesse d'esprit. Aden continuait ses explications et Syndeï l'écoutait attentivement. Elle marchait un peu devant lui, ne pouvant rester en place plus longtemps pour avoir ses idées fixes. Elle hochait la tête comme pour lui prouver qu'elle l'écoutait.
Elle releva la tête vers Aden lorsqu'il parla de ses parents.
« Mes parents m’ont offert à Polis dès qu’ils ont su que j’avais le sang noir. Je ne les ai jamais revus depuis ce jour. » dit-il en haussant les épaules comme pour montrer son indifférence à cela.
Syndeï s'arrêta en face de lui et pendant un instant, elle ne saurait dire si ça avait été des secondes ou des minutes, elle le dévisageait. Il était perché sur son muret et dans sa façon de parler, il dégageait ni tristesse, ni remords d'avoir été privé de sa famille trop tôt. Savait-il au moins ce que le mot famille signifiait ? Les précepteurs de Polis étaient peut-être considérés comme tel par les élus, après tout, mais ils n'étaient en rien comparable à leur famille, leur sang. Syn en était choquée. Mais elle ne pouvait pas comparer sa vie avec celle d'Aden. Car elles étaient bien différentes en tout point. Elle aurait voulu que sa vie soit différente. Que son père ne se fasse pas violemment tuer dans un trafic de marchandise, que sa mère ne l'abandonne pas pour quelques pièces et que ses sœurs aient été épargnées par la montagne. Mais la vie a voulu qu'elle en subisse les conséquences, de sa normalité et elle l'avait accepté, tout comme Aden acceptait d'être un potentiel avenir pour le peuple terrien, si il devenait Heda. Mais elle avait toujours du mal a concevoir ce conclave comme seule preuve pour honorer l'esprit des anciens commandants.
« Je ne sais pas comment tu fais pour tenir... Si j'avais été à ta place, j'aurais depuis longtemps abandonné. » dit-elle sans retenue.
Elle savait qu'elle n'en serait pas capable. C'est pourquoi, elle haussa les épaules à son tour puis retourna dans ce cercle infini de pas, devant Aden.

Elle avait rigolé, oui elle s'était mise à rigoler quand ils en venaient au sujet des "trahisons". Syndeï comprenait ce pourquoi Aden avait dit ça mais elle ne pouvait s'empêcher de rire car elle savait que peu importe ce qu'il ferait, il ne sera jamais à l'abri de trahison. Ce n'était pas pour se moquer qu'elle l'avait fait, loin de là. Syndeï le savait bien ça. C'était simplement une façon à elle de prouver qu'elle en savait plus qu'il ne le pensait.
« Il y a toujours des insatisfaits. Le monde n’est pas statique et la nature ne fait aucune distinction entre les clans. »
« Sur ce point, nous sommes d'accord. » dit-elle, un sourire aux lèvres.
« Regarde le nombre de Triku qui ont perdu la vie depuis l’arrivée des Skaikru. » continua Aden.
« Beaucoup trop à mon goût... » murmura-t-elle.
Syndeï ne voulait pas remettre en question les décisions prise par son commandant, Lexa était visionnaire et au fond c'est ce qui faisait d'elle un meilleur commandant que les précédents. Elle a accompli nombre de bonnes actions. Mais tout ça sous le précepte du "Jus drein jus daun". Quand est-il maintenant ?

Syndeï regarda par dessus son épaule et vit le soleil tomber plus vite qu'elle ne l'aurait voulu. Elle se retourna brusquement face à Aden. Leur conversation était intéressante elle ne pouvait pas le nier, mais elle s'était déjà trop égarer avec lui pour perdre plus de temps dans son travail. Elle s'approcha de lui, toujours en faisant attention de ne pas le toucher.
« Je suis désolée, mais... j'ai beaucoup de travail qui m'attend à la tannerie et... coupa Syn en regardant à nouveau par dessus son épaule. J'aurais aimé bavarder encore plus avec toi Aden. Mais je dois y aller et tu as surement d'autres choses à faire également. »
Elle lui tendit une main, comme pour l'aider à descendre de son perchoir et à le saluer convenablement, sans partir comme une voleuse, sa bouteille d'huile à la main. Elle avait conservé son sourire. Elle appréciait la compagnie du jeune homme, mais le devoir l'appeler.
« Peut-être à une prochaine fois ? » questionna-t-elle dans l'espoir qu'il lui dise oui.
Puis une fois les salutations effectuées, elle s'empressa de regagner le chemin principal pour retourner à la tannerie où devait l'attendre Irma, inquiète. Ce n'est sans compter sur un dernier regard vers Aden qu'elle disparut au coin d'une ruelle.


hrp > J'espère que cette réponse t'ira... bon j'ai du coupé court à notre discussion intéressante.. le devoir m'appelle mais on sera toujours  à temps de refaire un rp ? En tout cas, tu pourras conclure à ton post Et encore désolée pour le temps de rréponse... je suis pas hyper satisfaite en ce moment.