Ton attention est gauche, tu ne parviens pas à te calmer. Tes points sont serrés, ton cœur bat la chamade et tu sens que tes larmes montent. Tu souffles, tu tentes de te calmer ou en tout cas, tu essaies de reprendre ton souffle mais tu n'y arrives pas. T'es un peu à côté de la plaque. Tu ne sais absolument pas ce qu'il se passe et c'est justement ce qui te pose un problème. T'as besoin de te reprendre, tu as besoin d'arrêter cette psychose qui finira par t'exploser le cerveau. Tu en as conscience au moins ? Tu essaies de te reprendre, tu essaies de te calmer. Le cœur de ton problème ? C'est toujours le même bien sûr, toi qu n'arrive pas à reprendre les choses en mains, tu ne pourras rien dire à ce propos, tu ne pourras pas vraiment faire attention à tout ce bordel. T'es un peu à côté de la plaque depuis qu'il est descendu sur Terre. T'essaies de ne pas passer pour une folle mais voilà, tu n'y peux rien, Kyle occupe la plupart de tes pensées. Si encore ça avait été un peu plus simple, mais non, il fallait qu'elle complique tout ça encore un peu. Voilà ce qui l'énerve vraiment, voilà ce qui le pousse à chercher à comprendre le fin mot de cette histoire. Mais ce n'est pas gagné, évidemment. La jalousie te hante, tu l'as toujours été. Mais pas autant. Tes points se serrent, tu essaies de te calmer mais tu n'y arrives pas. Quand tu es entré chez lui et que tu y as vu une nana, ça ne t'es pas passé. Tu l'as toujours au fond de la gorge, t'as du mal à digérer l'information. Tu as envie de croire que y a une explication mais dans le fond, qu'est-ce que tu sais de lui hein ? Rien bien sûr, et c'est ce qui te pose un problème.
Cette possessivité qui te bouffe l'âme, tu ne sais pas vraiment quoi faire par rapport à ça. Tu as envie d'aller le voir, tu as envie de t'expliquer avec lui mais tu sais très bien que ça va partir en sucette. Tu le revois en train de te dire qu'il ne veut pas que tu joues avec lui et lui, au final ? Y a une nana qui squatte chez lui. Tu ne comprends pas trop mais tu n'as pas non plus envie de te prendre lat e^te. Ca te blase c'est sûr. Mais que pourrais-tu en dire de plus hein ? C'est trop compliqué bien sûr, mais faut que tu fasses avec, faut que tu apprennes à aller de l'avant. Mais ça ne veut pas dire que c'est facile, ça ne l'est jamais, de toute façon. Mais tu ne peux pas t'en empêcher, tu ne peux pas te résoudre à rester dans ton coin. Tu as envie d'aller lui parler, t'as besoin d'aller le voir. Oui, ça va lui faire comprendre que tu veux en apprendre plus sur lui. Oui, ça va le pousser à savoir que tu es attachée. Pourras-tu encore prétendre que tu ne veux pas que ça aille pus vit e ? Non, bien sûr que non. Tu avances doucement vers chez lui, et quand tes yeux se posent sur lui, tu soupires doucement, et détournes le regard. Une fois que ton regard n'est pas sur lui, tu te sens déjà plus apte à lui parler. « Qui est Summer ? ». Tu soupires, tu ressembles à une adolescente et cette sensation ne te plaît absolument pas. Il est déjà trop tard bien sûr, mais il n'y a pas que ça, évidemment, tu sais qu'à côté de ça, il peut y avoir tout un tas d'explications. Mais désormais, il va juste falloir que tu assumes, que tu le veuilles ou non, tu t'es prise au piège toute seule. Il est trop tard.
Alors qu'il avait toujours eu de la faciliter à se concentrer sur son travail d'ingénieur, Kyle se retrouvait maintenant la tête dans les nuages, à penser à autre chose. Il ne s'en rendait souvent même pas compte. Son esprit, un instant il était absorbé par sa tâche, et l'autre son esprit vagabondait. Peu importe ce qu'il était en train de faire, ça revenait toujours à la même chose : Raven. Il ne pouvait se l'enlever de la tête. En temps normal, ça ne lui aurait pas trop dérangé, mais là, il se retrouvait à faire en une heure ce qu'il faisait normalement en dix minutes. Ça en devenait ridicule. Une guerre était en train de se préparer autour de lui, des gens qu'il aimait étaient en danger de mort, mais ça, c'était sans importance face à Raven. Ces sentiments étaient nouveaux pour lui, il venait à peine de réaliser qu'il l'aimait et tout ça le chamboulait. Il n'avait pas l'habitude d'être assailli de cette façon, il n'avait pas l'habitude de ressentir les choses si fortement. Si seulement ça c'était produit dans des circonstances différentes, ça aurait pu être moins douloureux. Parce que tout ce qu'il voulait faire, c'était d'être avec elle, mais il y avait des choses bien plus importantes qui se déroulaient et auxquelles il se devait de participer. De toute manière, même s'il était maintenant certain de ses sentiments, ce n'était pas la même chose du côté de Raven, qui semblait encore confuse face à la situation. Kyle secoua la tête, essayant de se remettre les idées en place. Il devait travailler sur un nouveau prototype et arrêter de divaguer. Ce n'est qu'en levant la tête qu'il aperçut Raven se diriger vers lui. Il ne put s'empêcher d'esquisser un sourire, malgré l'expression de Raven qui semblait à la fois fâchée et indécise. Elle s'arrêta à quelques pas de lui, le regardant brièvement avant de détourner le regard. Quelque chose ne tournait pas rond, c'était maintenant clair. Kyle essaya de se remémorer les derniers jours, cherchant ce qu'il avait pu faire ou dire et qui aurait pu la mettre dans cet état. Pour une fois, rien ne lui venait à l'esprit. Soupirante, elle lui demanda qui était Summer. Il resta un instant interloqué face à cette question qui, pour lui, était plutôt étrange. Ça ne l'empêcha tout de même pas de lui répliquer avec sa moquerie habituelle. « Bonjour à toi aussi, Raven ». Il arborait un sourire qui se voulait à la fois rassurant et moqueur.
Summer. Summer était une jeune ingénieure qu'il avait connu sur l'Arche quelques années plus tôt. Il avait l'habitude de travailler avec son père, lui aussi ingénieur. C'est comme ça qu'il avait pu la côtoyer et, au fil du temps, alors qu'elle entreprenait elle aussi des études pour devenir ingénieur, il avait pu être là pour l'aider. Au tout départ, il n'avait pu s'empêcher de se moquer d'elle, au nombre d'erreur qu'elle pouvait faire, mais il s'efforçait tout de même de l'aider, voyant un réel potentiel en elle. Il la voyait maintenant réellement comme une petite soeur qu'il se devait de protéger, que ce soit psychologiquement ou physiquement. Elle passait souvent des moments dans sa tente, à lui raconter sa journée ou à lui demander des conseils sur tout et n'importe quoi. Avec ses parents morts sur l'Arche, c'était vraiment la seule famille qui lui restait. « C'est une ingénieure avec qui je travaillais sur l'Arche... Tu ne l'as jamais rencontrée? » Il ne savait pas quoi ajouter de plus. L'idée que Raven soit jalouse de Summer ne lui avait même pas traversé la tête. Pour lui, la relation qu'il avait avec Summer était tout sauf amoureuse, et l'idée que Raven soit jalouse lui était incongrue. Il savait qu'elle l'aimait bien, mais de là à dire qu'elle tenait à lui à ce point, c'était de se mettre la tête dans les nuages.
Lui poser cette question, c'est te placer en petite victime, sans doute n'est-ce pas la meilleure idée du monde, mais tu ne peux pas t'en empêcher. L'idée te semble étrange évidemment, et il aurait été préférable pour toi de t'abstenir, sauf qu'à son contact à lui, tu te mets souvent à faire n'importe quoi. Il te rend dingue, il t'arrache les mots de la bouche et surtout, il te pousse dans tes retranchements, tu ne sais pas vraiment comment te comporter mais il semble évident qu'il serait grandement temps pour toi de te reprendre, t'es à l'ouest, t'es à côté de la plaque mais il faudrait peut-être que tu te calmes deux minutes. Déjà, quand il te dit bonjour, tu te rends compte que t'es franchement pas la personne la plus agréable du monde. Distraite, un peu à côté de la plaque, tu tentes malgré tout de te convaincre que tu ne fais pas vraiment bonne impression. Tu juges, tu questionnes et dans le fond, que peux-tu bien dire ? Rien. Tu n'as pas ton mot à dire pour la simple et bonne raison que tu ne veux pas que lui, il te pose des questions. Voilà où se situe le gros du problème de ce que tu fais, le gros du problème de ton comportement, du coup. Tu oses te permettre de lui faire croire que tu veux te détendre, tu prétends que tu ne veux pas qu'il entre dans ta vie et voilà que tu lui fais le coup de la copine jalouse. Avoue quand même que ça n'a pas de sens. Tu ne devrais pas te comporter comme ça alors que t'es la première à avoir merder. T'es la première à avoir fait n'importe quoi, à avoir voulu prétendre que tu étais gauche à ce point. Il te faut te calmer, savoir questionner aussi, parce que ton bordel ne rime à rien. Sauf que dire ça à voix haute, tu ne penses pas que ce soit une bonne idée. Tu as envie de te taire, tu as envie de garder les choses pour toi mais ça ne te réussit pas. Dans le fond, tu as quand même envie de lui dire ce que tu penses, tu as envie de lui faire comprendre. N'est-il pas, en premier, venu te voir à propos de Ryan ? Avec ça, il s'est clairement enfoncé dans quelque chose dont il ne pourra pas ressortir, ça te semble évident. Mais pas facile pour autant, bien sûr. Tu ne sais plus trop quoi penser quand ça le concerne, dans le fond, parce qu'il te fous dans tous tes états. Tu cherches à comprendre, bien sûr, mais y a rien à faire. Pourquoi ça t'énerve autant ? Que quelqu'un puisse vouloir s'approcher de lui ? Qu'il puisse accorder un peu d'attention à une autre fille ? T'as aucune excuse et pourtant, ça te bouffe. « Bonjour ». Tu ne t'épanches pas plus longtemps sur le sujet, y a aucun intérêt mais oui, tu vois bien que niveau politesse, t'as pas vraiment été très réglo. C'est ce qui te dérange le plus, c'est ce qui te bouffe mais y a plus grand-chose à y faire, tu t'es énervée. Tu veux comprendre.
Non ,tu n'as jamais rencontré Summer. Peut-être de loin, une rencontre sans intérêt à laquelle tu ne t'es pas vraiment attarder. A l'époque, là haut, tu ne pensais qu'à ce que tu faisais, qu'à ce que tu avais dans les mains. Chacun avait une tâche, chacun faisait ce qu'il voulait, toi, tu t'en souciais pas vraiment, tu faisais ton petit bout de vie et tu estimais que c'était déjà bien comme ça. T'as jamais eu beaucoup d'amis, et justement, t'avais que Finn, finalement. Ton monde s'est construit autour de lui, voilà pourquoi tirer un trait sur lui et avancer seule te semble compliqué. Alors oui, bien sûr, tu n'es pas obligé d'être seule. Mais ça ne veut pas non plus dire que c'est facile à gérer. Tu fais ce que tu veux/peux. Tu fais de ton mieux oui. Mais ça ne suffit pas, évidemment… « Je ne te demande pas d'où tu la connais. Je te demande ce qu'elle représente pour toi Wick. ». Ton regard se fit dur, ton ton est bien trop désagréable, mais tu ne parviens pas vraiment à t'en empêcher, finalement.
Pendant quelques secondes, Raven sembla se sentir coupable d’avoir été si brusque. Elle le salua à son tour, mais l’expression sur son visage ne semblait pas avoir changé. Il y avait de la dureté, mais aussi de la vulnérabilité dans son regard, ce que Kyle avait du mal à comprendre. Il avait toujours eu une facilité à discerner ce que pensaient les gens, en observant leur attitude, la manière dont ils parlaient. Avec Raven, pourtant, il trouvait ça difficile. C’était comme essayer d’ouvrir un coffre au trésor sans en posséder la clé. C’était comme essayer de déchiffrer un message caché sans en connaître le code. Il avait beau essayer de comprendre, d’interpréter, il avait toujours l’impression d’être à côté de la plaque, qu’il lui manquait un élément, une pièce du casse-tête. C’était peut-être ça, au final. Il ne connaissait pas tous les détails de sa vie. Il savait pour Finn, pour son métier, mais après? Il n’avait aucune idée de la vie qu’elle avait pu mener sur l’Arche. Il avait besoin de plus d’informations, mais elle ne semblait pas ouverte à les lui donner, du moins, pas pour le moment. Alors il se retrouvait là, à essayer de déchiffrer la raison qui l’amenait à lui parler d’une telle manière.
Lorsqu’elle réitéra sa question de manière plus précise, Kyle sentit sa mâchoire tomber. Le regard de Raven était dur et son ton sec, mais à ce moment-là, il ne put s’empêcher de sourire. Parce qu’il avait enfin compris; elle était jalouse. Ça lui faisait plaisir, en quelque sorte. Parce que ça voulait dire qu’elle tenait plus à lui qu’il ne l’avait cru au départ. Et si elle se retrouvait là, maintenant, à lui poser la question, c’était parce qu’elle n’en pouvait plus. Parce qu’elle se devait de savoir. C’était un peu comme lui avouer ses sentiments, d’une manière un peu tordue. Il savait aussi que ce devait être dur pour elle. La jalousie était une émotion tellement forte, ça devait la pousser d’une manière qu’elle redoutait. Par instinct, Kyle eut l’envie de se jouer un peu d’elle, de lui faire croire un instant qu’il se passait quelque chose entre lui et Summer. Pourtant, il hésitait. Il ne voulait pas risquer de l’offusquer ou de la contrarier. Il ne voulait pas risquer qu’elle change d’avis et qu’elle décide qu’elle en avait assez de son humour maladif. Il ne se gêna pourtant pas pour la taquiner légèrement. « Raven Reyes, jalouse? » La question se voulait rhétorique, elle ne l’admettrait jamais d’elle-même. Il se leva pour s’approcher d’elle tentant de se faire rassurant. « C’est comme ma petite sœur. Le seul semblant de famille que je possède sur Terre ». Il n’avait pas voulu en révéler tant que ça sur lui. Après tout, il n’était pas le seul à ne pas vouloir se montrer vulnérable. Il avait peut-être plus de facilité à s’ouvrir que Raven, mais ce n’était tout de même pas facile. Il voulait vraiment qu’elle comprenne, qu’elle arrête de se faire des scénarios. Il ne se passerait jamais rien entre Summer et lui, ça n’était même pas une question à poser. Ce n’était tout de même pas le moment de discuter de la mort de ses parents, qui était sous-entendue dans ses propos.
Maintenant que les choses étaient plus claires, Kyle se permit de la taquiner un peu plus. « En plus, tu sais que je préfère les brunes. » Il lui fit un clin d’œil, espérant lui arracher un sourire. Il voulait enlever la dureté dans son regard, la rassurer. Lui faire comprendre que, pour lui, il n’y avait qu’elle et qu’il n’était pas prêt à partir.
La jalousie, ce n'est pas pour toi. Ton cœur bat trop vite, ton estomac est retourné et tu ne sais déjà plus où donner de la tête. Il faut vraiment que tu te calmes, que tu parviennes à te calmer, même si cela n'a strictement rien de facile. Tu as envie de craquer, tu as envie de te reprendre. Mais tu n'y parviens pas, t'as chaud, t'as les joues rouges et en plus, tu ne parviens pas à arrêter de te calmer. Ton cœur bat tellement vite que tu as l'impression qu'il va s'arracher de ton cœur, t'as l'impression qu'il va s'envoler et qu'il va bêtement te quitter. Ca n'a absolument pas de sens. Il faut que tu arrêtes de craquer. Mais t'y arrive pas, bien sûr, puisqu'avec Kyle, t'as jamais réussi à comprendre où donner de la tête. Il faut que tu arrêtes de cogiter dans tous les sens, ça va uniquement te montrer que t'es une bonne à rien. Bon, okay, lorsqu'on le dit de cette manière, ça n'a pas de sens, il faut surtout que tu arrêtes de te reprendre, même si ça n'a rien de facile. Ca ne te réussit pas, finalement. Il faut que tu souffles un bon coup. Mais.. Oui, t'es à côté de la plaque, quand il est dans ton champ de vision. T'y peux rien, il te retourne. Il te dévore, d'une certaine manière. Et si toi, tu ne parviens pas à remettre les choses dans le bon sens, tu vas finir par couler sous le poids de tout ça. Il y a la guerre, il y a tout ce bordel autour de toi. Tu essaies bien sûr, tu essaies de ne pas te prendre la tête, mais tu sais que ça ne sert à rien, tu sais qu'il faut que tu arrêtes de penser dans tous les sens. Quand il te demande si tu es jalouse, tu lèves les yeux au ciel. Qu'il mette le doigt pile dessus, ça t'énerve encore plus. Qu'il puisse sembler surpris, c'est pire encore. Tu ne comprends pas. Donc oui, il y a fort à parier pour que là, tu sois jalouse, est-ce que c'est vraiment si incroyable que ça ? Tu ne comprends pas en quoi cela puisse le faire rire. Cette sensation, elle t'énerve. Pourtant, tu ne commentes pas, et quand il te dit qu'elle est ta petite sœur ou en tout cas, ce qui s'en rapproches, tu te sens honteuse. Oui, elle est plus jeune et oui, on aurait pu imaginer que cela aurait pu te mettre sur la voie. Mais comment oublier que de base, tu n'as que 18 ans et lui 25 hein ? Elle doit avoir ton âge ! Tu as bien le droit de te poser quelques questions et tu as bien le droit d'avoir peur aussi non ? « Et donc, que je sois jalouse, c'est si incroyable que ça ? ». Tu croises les bras, tu ne te sens pas vraiment à ton aise. Et Raven Reyes, elle est confiante, elle sait ce qu'elle fait et elle n'hésite jamais. Voilà ce qui te dérange dans la situation qui t'entoure. Et c'est ce qui te bouffe. L'énervement et cette jalousie te font rater le point le plus important. Voilà ce qui te rend folle, voilà ce qui te pose un problème, finalement. Avec tout ce qu'il t'inspire, tous ces sentiments dès qu'il apparaît devant toi, tu en oublies certaines choses primordiales. Et là, tu n'as même pas pris la peine de l'écouter vraiment. Une petite sœur ? Soit, et sa famille ? Voilà l'information que tu as raté…
Pourtant, lorsqu'il plaisante, tu ne trouves pas ça drôle. Certes, tu vois bien que ce qu'il veut faire, en agissant de cette manière, c'est te rassurer. Mais ça ne marche pas. T'as jamais été jalouse, et là, tu réalises que le devenir ne te réussit pas du tout. Tu ne sais juste pas comment te comporter, tu essaies d'y arriver, mais ça ne te réussit pas particulièrement. Tu n'aimes pas être comme ça, mais tu n'es pas vraiment certaine de savoir comment faire pour agir différemment, finalement. « Ce n'est pas drôle Kyle, vraiment pas…. ». Tu te sens conne bien sûr, et il faudrait que tu te reprennes. C'est compliqué, mais tu essaies de te calmer. Il te faut du temps, certes, mais ça ne veut absolument pas dire que ça ne va pas te réussir, voilà où se trouve le problème. Raven Reyes et la jalousie, ça ne s'accorde pas vraiment hein ?
La jalousie était un sentiment que Kyle connaissait bien, pour l’avoir ressenti plusieurs fois au cours de sa vie. Que ce soit face à quelqu’un qui réussissait mieux que lui, face à quelqu’un qui possédait plus que lui, face à l’attention qui n’était pas dirigée vers lui, ça menait tous à la même chose. Cette émotion poignante qui creuse l’estomac, qui pince le cœur. Cette machine qui presse et qui ne semble pas vouloir s’arrêter. C’était un sentiment plutôt égoïste, au fond. Parce que ça voulait dire qu’on se concentrait plus sur soi que sur l’autre. Au lieu d’être content pour la réussite d’une autre personne, on se contente de se dire qu’on aurait voulu être à leur place. Le pire de tous, c’était la jalousie amoureuse. Parce que c’était le fait de ne pas avoir ce que l’on désirait, mélangé avec le rejet. C’était les deux sentiments les plus destructeurs, fabriqués sous forme de bombe. Il le savait, parce que c’est ce qu’il avait ressenti lorsqu’il avait appris pour Raven et Ryan. Ça avait été tellement fort, il n’avait pas eu d’autre choix que d’aller la confronter, que de lui dire ce qu’il éprouvait. S’il ne l’avait pas fait, il n’osait pas imaginer de quelle autre manière ça aurait pu éclater. Sûrement son poing sur la gueule de Ryan. Et pourtant, il n’était pas quelqu’un de très violent. C’était là, la puissance de la jalousie. Alors à ce moment, il pouvait comprendre ce que ressentait Raven. La seule différence, c’était que lui, il n’avait rien fait avec Summer. Le sentiment de Raven se basait sur des spéculations. C’était ça qui l’étonnait, au fond. Qu’en voyant Summer, elle s’imagine tout de suite qu’il se passait quelque chose entre eux. Qu’elle saute tout de suite à cette conclusion, qu’elle laisse ses peurs prendre le dessus. Elle avait peur. Elle avait peur qu’il la quitte, qu’il lui fasse du mal. Elle tenait à lui. Il avait beau se répéter ça, encore et encore, il avait du mal à y croire. Parce qu’il s’était tellement obligé à oublier ces petits espoirs, parce qu’il ne voulait pas tomber de plus haut qu’il ne l’était déjà. Cette fois-ci pourtant, c’était plutôt clair. Il devait se donner le droit d’y croire, se de s’y attacher. Raven le questionna, les bras croisés. Elle ne semblait pas très à l’aise, vulnérable comme elle l’était. « En général, non. Dans ce cas-ci, oui. Parce que le sentiment d’attachement et celui de la jalousie sont presque indissociables. L’un mène à l’autre. » Kyle ne savait pas si elle se rendait compte que ses actions et ses paroles dévoilaient autant de choses.
Son visage toujours renfrogné, Raven ne semblait pas si rassurer que ça. L’effort de Kyle à la faire sourire n’avait pas porté fruit. Elle ne le trouvait pas drôle, comme souvent, d’ailleurs. Il avait bien fait de ne pas pousser plus loin, ça, ça aurait été une erreur. Il commençait à connaître les limites avec elle, ce qui, tout compte fait, était une bonne chose. Il ne savait pas comment lui faire comprendre qu’elle n’avait rien à craindre. Qu’elle n’avait pas à être jalouse. De Summer, ou de n’importe qui d’autre. En même temps, il ne voulait pas lui faire une déclaration. Avec tout ce qui s’était déroulé entre eux, il voulait lui laisser encore un peu de temps. Il voulait lui laisser faire les premiers pas, même s’il savait que ça viendrait lentement. La jalousie de Raven était déjà un indicatif qu’elle tenait à lui, et ça suffisait pour le moment. Il ne savait plus quoi faire, alors il fit la première chose qui lui vint à l’esprit. Il savait que Raven n’aimait pas se sentir vulnérable. Dans le moment, c’est lui qui avait le dessus et ça ne devait pas lui plaire. « Mes parents… sont morts sur l’Arche. Dans la section 17. Ils se sont portés volontaires… Alors Summer, c’est ma famille. » Il n’avait pas l’habitude d’être si sérieux, si lourd. Il aurait voulu penser à une blague pour alléger ses propos, mais pour une fois, rien ne lui venait à l’esprit. Il espérait seulement que le fait de lui en dire un peu plus sur lui serait assez pour la rassurer.
Le sentiment d'attachement. Cette idée te monte le rouge aux joues, bien sûr. En te montrant jalouse à son égard, tu lui montres une nouvelle fois que tu tiens à lui. Bien sûr que tu n'as plus de doute à ce sujet. Et heureusement, d'ailleurs, puisqu'il était temps pour toi de te rendre compte que quelque chose n'allait pas. Tu t'es reprise, heureusement. Tu t'es calmée, et c'est sans doute ce qui compte le plus. Enfin… Selon toi, tu t'es calmée, mais on ne peut pas vraiment dire que ce soit flagrant. Non, tu n'es pas calmée, tu es énervante et ta jalousie te fait dire des choses que tu ne penses pas, il faut que tu agisses ou en tout cas, que tu te décides à faire quelque chose convenablement. Parce qu'à l'heure actuelle et depuis quelques jours, tu ne fais absolument rien de bon. Ou en tout cas, tu ne prends que de bien mauvaises décisions, mais cela revient un peu au même. Tu as toujours été impulsive, fonceuse et tout ça. Mais si tu décidais enfin à prendre le temps de réfléchir, sans doute que la situation serait un peu différente. Mais il a raison, évidemment, l'un mène à l'autre, cela n'a rien d'étonnant. Et cela ne te déplaît pas non plus bien sûr. Mais il faut que tu apprennes à faire attention, il faut que tu fasses attention à tous les détails et pourtant, tu n'y parviens pas, tu te rends faible à son contact. Tu essaies d'arranger les choses, mais tu n'y arrives pas, et c'est bien ça le problème. Lorsque tes yeux se posent sur lui, lorsque ton regard se tourne vers Wick, tes pensées se mélangent, ton attention se perd et surtout, tu en oublies ce qu'il faut que tu fasses. C'est à toi de faire attention, c'est à toi de te reprendre mais il est évident que tu n'y arrives pas. C'est ce qui te dévore. Ce qui te pousse à te fourvoyer parfois. Tu aimerais que ce soit plus simple mais bordel, pourquoi faut-il qu'il hante la moindre de tes pensées hein ? C'est ce qui te pousse à exploser, en cet instant. Ce qui te pousse à cette jalousie incontrôlable que tu tentes d'oublier. Mais tu n'y arrives pas. C'est ton problème. « Parce que toi, t'es jaloux ? ». Tu te souviens de son comportement de la dernière fois bien sûr. Mais il ne faisait que jouer, que dire des choses en riant. De petits pics mais avec si peu de méchanceté que tu te demande malgré tout. Tu n'y connais rien, c'est là que se situe ton problème, finalement.
Ses parents sont morts sur l'Arche, ils étaient volontaires. L'information te glace le sang, tu ne sais plus quoi dire, ta main se porte à tes lèvres formant un « o » de surprise. Tu ne t'y attendais pas, bien sûr. Ce n'est pas une révélation facile et tu as envie de le remercier alors qu'il te fait une confidence, finalement. Tu as peur de le décevoir, tu as peur de dire n'importe quoi et en même temps, tu sais malgré tout que cela n' rien de facile, tu sais que cela t'empêche de réellement réfléchir, c'est problématique, bien sûr, mais tu as envie d'y croire, tu as envie d'avoir l'impression que tout vas bien, mais tu restes persuadée que ce n'est pas comme ça que ça va aller en s'arrangeant. Il faut que tu arrêtes de te prendre la tête, cela ne servirait à rien. Il faut que tu lui laisses un peu de mou et tu sens toute la tristesse en plus là. Tu te sens ridicule. Au final.. Ca vous fait un point commun n'est-ce pas ? Lui non plus, il n'a plus personne. Tu comprends qu'il puisses avoir besoin de Summer, tu comprends qu'il puisse avoir besoin d'un point de repère. N'était-ce pas ce que Finn représentait pour toi ? Encore qu'une nouvelle fois, tu ne peux pas vraiment comparer ces deux points, puisqu'il demeure une certaine différence, entre vous. Finn, t'as fini par avoir des sentiments pour lui. Et Wick ? Il te jure qu'il n'y a rien. Tu veux lui faire confiance mais t'as tellement peur, que tu continues d'avoir des doutes. Tu as envie de te reprendre bien sûr, tu as envie de remettre un sens à tout ça, mais tu n'y parviens pas, t'es perdue, Raven, c'est ce qui finira par te bouffer. Il faut que tu redeviennes celle que tu étais, avant. Il faut que tu arrêtes de te prendre la tête, que cela te plaise ou non, tu te dois de calmer le jeu. T'avançant vers lui, tu glisses ta main sur sa joue, plongeant ton regard dans le sien. Tu as envie de lui faire comprendre, bien sûr, tu as envie de lui dire ce que tu éprouves mais ça reste une nouvelle fois coincé au creux de ta gorge. Tu n'es pas encore prête… « Je suis désolée… Je suis maladroite… Je t'agresse.. Je sais que c'est ridicule... ». Ton ton s'adoucit heureusement, tu parviens enfin à reprendre le contrôle des choses. Le contrôle de toi. Quoique, n'est-ce pas plutôt son secret révélé qui te pousse à te calmer.. ?
Tout le monde se voilait la face, d’une manière ou d’une autre. Que ce soit par un sourire plâtré au visage, une nonchalance sans limites ou des blagues lancées à tout va, on avait tous ce mécanisme de défense qui nous permettait d’éviter les questions, les soucis. Pour Kyle, c’était l’humour. Il se plaisait à croire que ses moqueries ne servaient qu’à divertir, qu’à alléger l’atmosphère, mais elle servait aussi à amoindrir ses propos. Dire qu’on a mal et dire qu’on a mal en riant, ça n’avait vraiment pas le même impact. Pourtant, il ne le voyait pas. Il ne comprenait pas qu’on puisse pousser ses paroles du revers de la main, comme si ce qu’il disait n’avait pas de réelle importance. C’était là, la magie. Il avait beau mettre son cœur sur sa main, en utilisant ce ton humoristique, ça passait dans le beurre. Il suffisait d’être assez honnête avec quelqu’un pour qu’il ne vous croie pas. Et au final, il se plaisait bien là-dedans. Parce que de son côté, il avait l’impression d’être franc et vrai, mais au fond, il ne se mettait pas vraiment à découvert. Quand Raven lui demanda si lui aussi était jaloux, il resta un instant interdit. Parce que pour lui, c’était clair. Lorsqu’il l’avait confronté à propos de Ryan, c’était bien parce qu’il était jaloux. Parce que la seule pensée de la voir avec un autre torturait son esprit. Mais encore une fois, il avait utilisé l’humour, la blague et le message n’était pas passé. Pourtant, il y avait eu d’autres signes. La lourdeur inhabituelle dans sa voix, les larmes qui s’étaient formées au coin de ses yeux alors qu’il perdait espoir. Raven ne semblait pas les avoir vues, cette fois-là, mais elles avaient été bien réelles. Plus réelles que les mots qui pouvaient sortir de sa bouche. « Si j’étais pas allé te parler cette journée-là, à propos de Ryan… j’lui aurais sûrement balancé mon poing dans la gueule. Je pouvais pas m’enlever cette image de la tête. » C’était direct et franc et, pour une fois, ce n’était pas dit à la légère. À force de dire les choses comme elles étaient, de dévoiler tous ces trucs sur lui, sans une onde d’ironie, Kyle réalisait ce que c’était vraiment de se confier. C’était difficile, plus dur qu’il ne l’avait imaginé. Il avait pris l’habitude de se cacher sans le savoir et c’est seulement là qu’il le réalisait.
Lorsqu’il annonça la mort de ses parents à Raven, le visage de celle-ci se déforma sous la surprise. Elle n’en savait rien, bien évidemment. Elle était descendue sur Terre avant le sacrifice, elle n’avait aucune idée des gens qui avaient péri. Ses parents s’étaient portés volontaires et n’avaient pas hésité une seule seconde. Bien sûr, il laissait leur fils derrière, mais ils estimaient que Kyle pouvait se débrouiller seul. Qu’il avait acquis assez d’expérience, assez de maturité pour vivre sa vie sans le soutien de ses parents. Et en fin de compte, c’était pour lui qu’ils avaient fait ce sacrifice. Pour lui donner les meilleures chances de survie. Il ne pouvait pas leur en vouloir, c’était peut-être ça, le plus dur. Il s’était abandonné, laissé pour compte, mais il ne pouvait pas le leur reprocher. Parce que c’était la chose la plus altruiste qu’ils aient pu faire. Mourir pour permettre à d’autres de survivre. Il avait tenté par tous les moyens de les faire changer d’avis, mais en vain. Maintenant qu’il était sur Terre, il ne pouvait s’empêcher de penser qu’ils auraient pu être là, avec lui. Qu’ils auraient pu connaître ce qu’on leur avait un jour promis. Kyle baissa le regard. De repenser à tout ça, ça lui faisait plus de mal qu’il ne l’avait imaginé. Avec tout ce qui s’était produit depuis la descente de l’Arche, il n’avait pas vraiment eu de temps pour y penser. C’était peut-être mieux comme ça, au fond. Il sentit la main de Raven glisser sur sa joue et, l’espace d’un instant, se laissa aller à son contact. Il leva les yeux vers elle et s’imprégna de son regard. Elle s’excusa de son comportement, hésitante, mais il ne lui en voulait pas. Après tout, elle n’avait rien fait de mal. Bien sûr, elle s’était emportée, mais ce n’était rien de bien grave à ses yeux. Il ne pouvait lui en vouloir de ne pas savoir, de ne pas avoir su contrôler ses émotions. Elle n’était pas parfaite, tout comme lui ne l’était pas non plus. « T’as rien fait de mal, Raven. » Son regard le réconfortait, ses grands yeux bruns lui amenant le peu de chaleur dont il avait besoin. Il avait besoin d’elle, de sa présence, de sa voix, de son impulsivité, de sa colère, de sa peur, de son intelligence, de sa persévérance, de sa force. Elle ne se rendait pas compte de l’effet qu’elle avait sur lui ou sur les autres. Elle se sous-estimait constamment. « Tu es là, ça me suffit. »
Tu l'imagines se battre pour toi ou en tout cas, se battre par jalousie et le joue continue de te monter aux joues. Tu ne peux pas t'en empêcher, mais cela n'a rien de vraiment étonnant, finalement. Il vient d'ouvertement te dire ce qu'il ressent, il vient de vraiment te dire que tout ceci ne mène à rien, que cela n'a pas de sens ou d'autres choses de ce genre. Et c'est quelque chose que tu es bien incapable de supporter. Tu ne supportes pas de te prendre la tête mais… A son contact, tu deviens débile. C'est là que tu réalises vraiment que tu n'es qu'une enfant, c'est à ce moment que tu te souviens que tu n'as que dix-huit ans. Que te trouve-t-il alors qu'il a six ans de plus que toi ? Que peut-il estimer d'intéressant chez toi alors que des filles plus âgées peuvent sembler plus intéressantes ? Tu n'y comprends rien mais une nouvelle fois, tu n'es pas certaine de pouvoir lui poser une telle question. Tu n'es pas certaine d'avoir envie d'y réfléchir. Ce n'est pas pour toi, ce n'est pas quelque chose dont tu as envie de parler et tu ne te sens même pas à l'aise avec cette idée. Disons que tu ne vois pas les raisons et que oui, peut-être qu'un jour tu seras prête, peut-être qu'un jour, tu te permettras de lui poser la question. Mais ce n'est pas pour aujourd'hui, là, maintenant, tu n'en as pas la force. Tu ne peux pas te permettre de faire une telle erreur, cela n'aurait pas de sens. Pas de sens du tout, évidemment. Mais un sourire ne tarde pas à se dessiner sur tes traits, finalement, par rapport à ce qu'il dit. L'imaginer jaloux te donne envie de le voir vraiment. C'est malsain évidemment, et si l'idée te tente, tu ne risques pas de faire une telle erreur. Mais tu restes tentée, malgré tout. Et à ce propos, on ne peut pas t'en vouloir, c'était impossible bien sûr. Et insupportable aussi. Ce n'était pas le genre de jeu auquel tu peux te permettre de jouer. Et il est donc clairement préférable de ne pas y réfléchir une seule seconde. Il n'y avait aucun doute à avoir sur la question. « Dommage… Tu lui aurais redressé le nez... ». Tu tentes de blaguer, imaginant que cela rendrait les choses plus faciles et en même temps, tu imagines que c'est peut-être un peu trop maladroit, finalement. Une nouvelle fois, il aurait été plus judicieux de se taire. Mais maintenant, il est bien trop tard… Néanmons, tu ne peux pas nier que pour une fois, il t'a parlé ouvertement, il n'a pas blagué. Et cela te fait du bien. Tu ne prétends pas que l'entendre dire n'importe quoi à chaque fois te dérange vraiment, mais tu ne peux pas nier que par moment, tu as quand même besoin de souffler. Là, c'était le moment, par exemple. Il y a un moment pour tout, tu ne le sais que trop bien déjà. Et là, il s'agit d'un de ces moments.
Lorsqu'il te dit que ta présence lui suffit, un sourire se dessine sur tes lèvres alors que tu te détournes le regard, un peu honteuse et gênée. Bien sûr que ses mots te touchent, comment pourrait-il en être autrement ? Ca te fait plaisir bien sûr. Ta main est toujours sur sa joue, et un sourire ne quitte plus ton visage déjà. Tu sens qu'entre vous, cela va beaucoup mieux, que déjà, cette étrange jalousie semble avoir quelque peu disparu. Tu n'as plus envie de te prendre la tête ou en tout cas, tu essaies de te convaincre de l'idée que tout va bien, ou quelque chose de ce genre du moins. Mais ce n'est pas toujours facile, évidemment. Et là, pour le coup, tu ne sais juste plus quoi en dire. Et au final, tu réalises que les actions sont bien plus faciles que la parole. « Toi aussi, ta présence me suffit... ». Et tu poses alors tes lèvres sur les siennes.
C’était la première fois, depuis le départ des Cents, que Kyle se sentait bien. Il avait tellement vécu, en si peu de temps. C’était éprouvant, exténuant et c’était presque un miracle s’il avait été capable de le supporter jusqu’à maintenant. L’annonce du manque d’oxygène, la mort de trois cents personnes, dont ses parents, le départ de l’Exodus qui laissait l’Arche invivable. Le désespoir de voir sa mort approcher, d’attendre qu’elle arrive. Parce que oui, il avait cru mourir sur l’Arche. Des simulations avaient été roulées et s’il n’avait pas tenté de faire atterrir l’Arche sur Terre, ils seraient tous morts là-haut. C’était une chose, de mourir, mais de le savoir c’en était une autre. Finalement et contre toutes attentes, il avait survécu. L’Arche s’était projetée vers la Terre et il avait été chanceux de se trouver dans une station qui n’avait pas explosé lors de la chute. La descente avait été infernale, autant physiquement que psychologiquement. L’air était chaud, le bruit assourdissant. Il n’avait pas ouvert les yeux une seule seconde. Il n’avait pas été assez brave pour regarder la réalité en face. Quand ils ont fini par atterrir, ça lui a pris un moment avant de le réaliser. Les yeux toujours fermés, il ne savait plus s’il était mort ou vivant. C’est seulement lorsqu’il sentit une main sur son épaule qu’il put enfin souffler. Ils avaient réussi, ils étaient de retour chez eux. Le soulagement fut bref. D’autres épreuves les attendaient déjà, une guerre se préparait. Encore une fois, il se retrouvait en danger de mort. C’était devenu une habitude, une petite pensée qui siégeait toujours à l’arrière de son crâne. Et maintenant, à cette petite voix qui résonnait constamment s’en rajoutait une autre encore plus forte. Parce qu’il avait peur pour lui, mais il avait encore plus peur pour Raven. C’était elle qui passait en premier, désormais. À cet instant, il réalisa qu’il donnerait sa vie pour la sauver. Qu’il n’hésiterait pas à s’interposer face au danger. Qu’il ne laisserait personne lui faire du mal. Maintenant qu’elle lui démontrait un certain attachement, il ne pouvait plus prétendre qu’il ne serait pas là pour la protéger. La blague maladroite que fit Raven chassa le tout de ses pensées. Il se devait de se concentrer sur le moment présent, pour une fois. Il se devait d’apprécier sa proximité, sa présence, au lieu de s’imaginer la perdre. Il se devait d’arrêter une seconde, ce qu’il n’avait pas fait depuis longtemps.
Lorsqu’il lui fit part de ses sentiments, Raven détourna les yeux, un sourire se glissant sur son visage, illuminant ses traits. Il ne put s’empêcher de sourire à son tour, gardant son regard fixé sur elle. Il sentait qu’elle était heureuse, qu’elle commençait à mettre de l’ordre dans ses émotions. Il savait que tout n’était pas gagné, que même si ce moment semblait parfait, il y avait encore du chemin à faire. Ça lui donnait de l’espoir, plus qu’il en avait eu jusqu’à maintenant. Pour lui, pour elle, mais aussi pour tout le reste. Parce qu’elle lui donnait la force de continuer, de persévérer. Parce qu’elle lui donnait une raison de plus pour se battre. Toujours souriante, Raven se retourna finalement vers lui pour lui dire qu’elle aussi n’avait besoin que de sa présence. Il n’eut pas le temps de répondre qu’elle l’attira vers lui pour l’embrasser. Kyle glissa une main dans sans cheveux, l’autre dans le creux de son dos, la pressant un peu plus vers lui. Il voulait sentir son corps contre le sien, s’imprégner de son odeur. C’était tendre et doux, comme si rien ne s’était jamais passé entre eux, comme si c’était la première fois. Ils se séparèrent un instant, leurs visages à quelques centimètres l’un de l’autre. Son cœur battait la chamade et il se demandait si elle pouvait le sentir taper contre sa poitrine. Il ne savait plus quoi dire et, pendant un instant, il se sentit gêné. Parce que même s’ils avaient couché ensemble, c’était le premier moment intime qu’ils partageaient vraiment. C’était pousser par l’amour et la confiance plutôt que par l’adrénaline du succès ou l’intention d’oublier. « Tu me laisseras te fabriquer une nouvelle prothèse? » Parce qu’il ne savait plus s’il devait continuer ou arrêter, parce qu’il ne savait plus quelle limite franchir, il se ramena à ses anciennes habitudes. Ce n’était peut-être pas le moment idéal pour faire des blagues, mais c’était lui, au fond. C’était ce qu’il avait toujours été.
Tes lèvres sont sur les siennes et déjà, tu sens que les choses sont en train de se remettre en place. Tu ne peux pas être certaine que tout ira bien, tu ne peux pas non plus jurer que tu comprends absolument tout ce qu'il est en train de se passer dans ta vie. Mais dans le fond, tu n'en sais rien, t'es juste un peu paumée et tu as peur de faire une erreur, doit-on vraiment te le reprocher ? Tu refuses de le croire une seule seconde. Lorsque tu t'écartes, ton visage reste proche du sien. A ufinal, cette jalousie t'a une nouvelle fois dévoré le cœur, tu ne saurais pas prétendre pour quelle raison, tu ne saurais pas non plus l'expliquer. Est-ce vraiment nécessaire ? Tu n'en es pas non plus convaincu. Tu refuses de te casser la tête pour des broutilles de ce genre. Ta vie n'est-elle pas déjà assez compliquée ? Tu te poses toujours un million de questions. Il est désormais temps pour toi de te taire et d'arrêter de te prendre la tête, tu ne crois pas ? Tu ne nies pas le fait que cela n'a rien d'évident, tu ne nies pas le fait que c'est une sacré prise de tête. C'est énervant oui, et en même temps, tu te sens bien. C'est principalement à cela qu'il faut que tu penses. Tes pensées sont déjà de nouveau en train de s'embrouiller que déjà, il se met à te faire une vieille blague. Heureusement, il a attendu, heureusement, il t'a déjà prouvée qu'il peut te parler normalement, qu'il peut arrêter avec quelques blagues de temps en temps. Parce que oui, dans le fond, il semble évident que cela te fait du bien et que tu n'as pas vraiment le choix que de faire avec non ? Disons en tout cas que pour une fois, il a choisi le bon moment. Entre vous, la situation risque vite de devenir gênante. Du moins, au tout début. Avec Finn, ça n'a jamais été nié voilà où se trouve la différence. Tu ne t'es pas rendue compte que ta relation avec lui était différente ou en tout cas, pas du jour au lendemain. Ca c'est fait doucement. Avec Wick, t'as tout foutu en l'air en couchant avec lui, voilà la différence. T'as commencé comme ça alors que de base, ce n'était pas la bonne personne pour le faire. « Monsieur Wick, sortir avec moi ne vous donne pas le droit de critiquer ma prothèse ! ». Tu te mets doucement à rire mais après quelques secondes à peine, tu te souviens de ce que tu viens de dire. Ce n'est pas vraiment une excellente idée, dans le fond. C'est même carrément maladroit, quand tu y réfléchis. Tu viens de dire que vous sortez ensemble non ? Est-ce que c'est vraiment ce que tu veux ? Hier encore, tu ne savais même pas ce que tu voulais, finalement. Et là, tu ne sais même plus ce que tu es supposé penser. Tu ne sais pas où donner de la tête, t'as juste envie de hurler parce que tu as l'impression que ce n'est pas ça qui va arranger ta vie.
Tu n'as absolument pas le droit de revenir en arrière maintenant, tu le sais. Tu as fait le premier pas, tu as fait la crise de jalousie. C'est maintenant que tu te poses les bonnes questions, c'est maintenant qu'il faut que tu réfléchisses. T'es jalouse Raven, possessive, et t'aimes l'embrasser. Tu ne peux donc pas essayer de me faire croire que tu n'as pas envie de cette relation. On sait que tu as envie de sortir avec lui, on sait que tu as envie de rester auprès de lui. Tu ne sais pas si tu ne vas pas mourir demain. Tu en as assez de tes regrets. Tu souris doucement, ton esprit se vide doucement des mauvaises pensées. « Alors, qu'est-ce qu'on y gagne à être la copine du grand Kyle Wick ? T'as quoi à me proposer pour que je reste ? ». Oui, il est temps pour toi d'arrêter de te prendre la tête.
Kyle se sentait bien, la première fois depuis longtemps. Son sourire était large comme son visage et, encore là, ce n’était pas assez grand pour montrer le bonheur qu’il ressentait. Il ne s’agissait que d’un instant, parce qu’il savait, au fond, que ça ne pouvait pas durer longtemps. Il y avait cette petite voix, minuscule, qui criait à plein poumon en essayant de lui faire réaliser qu’il ne devait pas trop s’emballer, qu’il devait rester sur terre. La situation actuelle ne lui permettait pas d’être idéaliste ou trop optimiste, c’était trop risqué. Le pessimisme était quelque chose de sûr, de complaisant. Parce qu’à force de toujours imaginer le pire, on ne pouvait jamais être déçu. À force de se complaire dans l’idée que rien n’était jamais bon, on se formait une carapace inatteignable. Ce n’était pas le cas de Kyle. Il ne cherchait pas à se protéger de ses idées ou de ses envies, il rêvassait. Pourtant, là, il n’avait pas d’autre choix que d’être le plus réaliste possible. Alors il savait. Il savait que ce moment de bonheur qu’il ressentait était éphémère et qu’il devait en profiter au maximum. Son visage s’éclaira davantage lorsqu’il entendit le rire de Raven. C’est là qu’il se rendit compte à quel point le rire se faisait rare sur Terre. Depuis son arrivée, l’atmosphère était lourde, empreinte d’inquiétude et de tristesse. Le rire de Raven était comme une fleur qui réussissait à pousser à travers le gravier. C’était inattendu et ça donnait de l’espoir, tout en étant joli. Elle se moqua à son tour, réalisant trop tard les paroles qu’elle venait de prononcer. Elle venait de définir leur relation; une relation amoureuse, un couple. Kyle fronça légèrement les sourcils, se demandant si elle avait vraiment voulu dire les choses de cette façon. Raven semblait tout aussi surprise et pendant un instant, il aurait voulu lui offrir l’opportunité de revenir en arrière. Elle semblait confuse, son cerveau et son cœur ne s’accordaient visiblement pas sur les mêmes choses. Pourtant, c’était dans son caractère. Elle était impulsive, elle agissait avant de penser, les mots sortaient de sa bouche avant de se former dans son esprit. Il décida donc de laisser les choses passer, de ne pas se moquer, de ne pas en parler, de laisser glisser les mots. Si elle était vraiment sérieuse, elle aurait tout le temps de lui faire comprendre, sinon, elle avait l’occasion de l’oublier. Il ne tenait pas non plus à mettre fin à ce moment, en pressant plus fort sur un point sensible. « Monsieur Wick? Et moi qui pensais que ma crème anti-âge commençait à fonctionner… » Il était conscient qu’il y avait un écart d’âge entre lui et Raven. Il ne savait pas exactement combien d’années les séparaient, mais ça lui importait peu, de toute manière. Après tout, il avait la maturité d’un adolescent.
Toujours souriante, Raven le relança, le défi dans son regard. Elle lui demandait ce qu’elle avait à gagner en restant avec lui, se qualifiant cette fois-ci comme sa copine. Décidément, l’idée commençait à faire plus de chemin dans la tête de Raven. Elle semblait même confiante, cette fois-ci, et ça ne faisait qu’ajouter au baume que sentait Kyle sur son cœur. Il voulait être là pour elle, qu’elle lui fasse confiance, qu’elle n’ait pas peur de se montrer à lui, d’être sincère. C’était un long processus et, au final, ça en valait la peine. Il savait qu’il ne pourrait jamais la quitter, de toute manière. Même si elle décidait, du jour au lendemain, qu’elle ne voulait plus de lui. Il serait là. « Oh, mais il y a pleins d’avantages! Premièrement, le privilège d’être vue avec un dieu de l’ingénierie. » Kyle roula les yeux, accentuant ce qu’il montrait comme une évidence. « Ensuite, il y a la tente, qui est simplement majestueuse! Avec le lit le plus confortable de tout le Camp et l’éclairage aux chandelles qui est simplement magnifique! » Cette fois, il en mettait gros. Il voulait la faire rire, encore, il voulait lui montrer que ça pouvait être bien, d’être avec lui. Que ça pouvait être un peu plus léger. « Sans oublier les prothèses sur mesures, bien évidemment! » Il ne se lassait plus de la relancer sur cela. C’était ce qui les avait rapprochés, au départ. « Et pour finir… Tout ça importe peu, parce qu’il t’est maintenant impossible de te défaire de moi. Que tu le veuilles ou pas, je serai toujours là, Raven. » Il finissait sur une note un peu plus sérieuse, parce qu’il voulait quand même lui montrer que ce n’était pas seulement de la rigolade pour lui, qu’il tenait vraiment à elle. Qu’elle pouvait compter sur lui.
Raven Reyes est en couple. Encore maintenant, tu es bien incapable de savoir pourquoi tu as fini par céder. Tu sais pourquoi, bien sûr, Kyle Wick est adorable, il est doux, tendre et sincère. Tu l'as compris dès que vous avez parlé ensemble pour la première fois. Bien sûr qu'au tout début, tu ne le voyais que comme un ami. Mais les choses ont changé. Ton arrivée sur Terre a modifié ta façon d'être, t'es devenue quelqu'un d'autre, quelqu'un de meilleure finalement. Par le passé, tu étais quelqu'un d'égoïste, quelqu'un de toujours dans sa bulle, finalement. Mais tu es devenue responsable, sérieuse et sociable. Tu t'es mise à aider les autres, finalement. Mais tu en avais besoin, c'est ça, le plus important. T'étais pas assez impliquée. Tu l'es devenue avec les personnes que tu as côtoyé. Et Wick a débarqué sur Terre. Bon, ce n'est pas arrivé tout de suite, ben sûr. Mais quand il a fini par arriver, tu ne l'as pas calculé de suite. Tu lui as parlé de loin, tu lui as fait la conversation à plusieurs reprises mais ça s'arrêtait là. Et regardes-toi aujourd'hui ? Ca semble tellement différent maintenant. Non que ce soit dérangeant, ça, tu l'as voulu, c'est pour ça que tu ne dis rien, c'est pour ça que tu finis par céder. Il faut que tu arrêtes d'avoir peur de ce qu'éprouve ton cœur, surtout quand on voit le monde dans lequel vous vivez. La guerre frappe à la porte, la mort n'est pas loin, tu ne peux pas te permettre d'attendre que quelqu'un vienne vers toi. C'est maintenant ou jamais, tu ne peux pas attendre de mourir, tu ne le peux pas, tu ne peux te le permettre, sinon, tu vas y rester et t'auras pas vécu pleinement ta vie. Tu l'aimes non ? N'est-ce pas ce que tu as fini par réaliser en restant auprès de lui ? Si, bien sûr, et c'est pour ça que maintenant, il serait temps pour toi de te taire. Tu l'aimes, et c'est tout ce qui compte. Dans ce monde, si tu ne veux pas devenir folle, il te faut de l'amour, il te faut écouter ton cœur, même si tu pensais avoir oublié comment faire cela.
Tes années de différence avec lui te laissent parfois perplexe. Tu ne sais pas vraiment quoi dire par rapport à ça, et de toute façon, tu n'oses même pas lui demander son âge. Tu sais que c'est aussi ton immaturité qui peut le bloquer. T'es encore une enfant, sur certains points, tu ne peux pas te le reprocher, tu en as pleinement conscience. T'as dix-huit, et lui ? 25 ? 26 ? Plus ? Tu ne sais pas, t'as peur de connaître la différence. Tu sais bien que les garçons aiment souvent fréquenter des filles plus jeunes, mais est-ce qu'il ne finira pas par se lasser ? Bien sûr que t'es plus mature que bon nombre des filles que t'as pu croiser dans ta vie, mais ça ne veut rien dire. Après… Tu sais aussi que sur les bords, il est un peu gamin aussi. Avec ses blagues pourris, sa façon de parler, par instant. Mais tu ne t'en soucies pas non plus. « C'est raté, je vois bien que tu pourrais être mon grand-père ». Tu te mets à rire, oui, tu essaies de dédramatiser mais ce n'est pas vraiment une réussite. Disons que tu fais de ton mieux. D'une certaine manière, du moins.
Tu l'écoutes te balancer ses arguments et tu ne peux pas t'empêcher de rire à chaque fois. Les prothèses ? Vraiment ? Vous allez encore avoir longtemps cette conversation ? Bon, peut-être que tu finiras par le laisser t'en faire une, un jour. Mais… Tu ne vas pas le lui dire maintenant, il prendrait trop la confiance le vilain ! « Ca se discute.. Mais quand tu dis que tu seras toujours là… Monsieur Wick, cela veut dire que vous êtes si collant que ça ? ». Tu te mets à rire parce qu'au final, cela ne te dérange pas vraiment. Disons que t'as besoin de ta liberté quand même, un peu. Mais tu sais qu'il n'irait pas jusqu'à dépasser une limite convenable. « Enfin bon, ce n'est pas très convaincant tout ça. Peut mieux faire ! ». Une nouvelle lueur de défi se glisse dans ton regard. Tu aimes tellement le taquiner qu'il n'y a rien à faire. Mais… Ca te plaît, quoique tu en dises. Impossible pour toi de revenir en arrière, déjà.
L’amour était quelque chose de difficile à définir pour Kyle. Parce qu’il le ressentait de différentes manières, parce qu’il ne savait pas exactement comment le reconnaître. Il y avait l’amour pour les membres de sa famille. C’était quelque chose qui avait toujours été là, qui n’était pas discutable. C’était un lien qui ne pouvait pas se briser, même sous les plus grandes tempêtes. C’était ce genre de relation qu’il avait entretenu avec ses parents et qu’il entretenait maintenant avec Summer. Il y avait l’amour pour les amis. Ce lien de complicité, de confiance, de confidence. Il était plus fragile, par moment. Les malentendus, les querelles, ça pouvaient vite compliquer les choses. Les vraies amitiés réussissaient pourtant à passer à travers, à se renforcer en même temps. C’était toujours dans les temps difficiles qu’on reconnaissait les vrais amis. Kyle n’en possédait pas beaucoup, des vrais amis. Sa nature moqueuse l’empêchait parfois d’approfondir ces relations, parce que le rire, c’était toujours en surface. Les gens n’allaient pas chercher plus loin que sa figure joyeuse, ils se contentaient de hocher la tête, sourire et ils continuaient leur chemin. Finalement, il y avait l’amour, celui qu’on écrit avec un grand A. C’était le plus compliqué, le plus fort, mais le plus fragile. Parce que c’était la complicité, c’était le désir, l’attirance, la confidence, le besoin. Ça enveloppait tellement de choses, tellement de sentiments, c’était difficile de s’y retrouver. Avec ce genre d’amour, on avait l’impression que chaque mot, chaque seconde servaient à le renforcer ou à le détruire. C’était la peur, l’angoisse du rejet, la jalousie. Ça se rapprochait même de la haine, parfois. C’était ce qu’il ressentait pour Raven. Ce ramassis d’émotions qui pouvaient le faire changer d’humeur en quelques secondes. C’était la meilleure chose et la pire chose à la fois. C’était ce qui pouvait le rendre le plus heureux et le plus malheureux en même temps. Il n’osait même pas imaginer la perdre. Il n’osait pas concevoir une vie ou il ne pourrait pas voir son visage, entendre sa voix. Il ne pouvait plus reculer, il ne pouvait pas oublier ce qu’il ressentait pour elle. Et même s’il savait que l’amour était une série de montagnes russes, il était prêt à surmonter tous les obstacles, à faire tous les sacrifices. Ce n’était même plus une question à se poser, il le savait et c’était tout.
Kyle se demandait si c’était le cas pour Raven. Si elle ressentait la même intensité que lui, si elle partageait ses idées. Il ne savait plus comment interpréter ses actions, ses paroles. Bien sûr, elle semblait tenir à lui, elle semblait aimer sa présence, elle semblait même aimer ses blagues idiotes. Pourtant, il sentait qu’elle n’était pas tout à fait connectée avec ses émotions. Qu’il y avait encore des barrières qui l’empêchaient de s’exprimer totalement. Mais c’était quelque chose qui allait s’améliorer avec le temps, ça ne servait à rien de pousser. Et puis, c’était facile, pour lui, d’être amoureux. Il ne l’avait jamais vraiment été avant. Il n’avait jamais connu ce genre de connexion. C’était facile de se laisser aller, parce qu’il n’avait jamais su à quel point ça pouvait faire mal de tout perdre. Il se l’imaginait bien, mais Raven elle, elle le savait. Ça devait être dur de s’autoriser à aimer, de se remettre le pied dans le même rouage. C’était bien ce qui les différenciait, tous les deux. Ça et l’âge qui les départageaient. Raven avait connu Finn depuis son enfance, elle avait grandi avec lui. Elle avait grandi avec quelqu’un qui traversait les mêmes choses qu’elle. Kyle ne pouvait pas prétendre qu’il en était à la même étape qu’elle. Il était passé à travers son adolescence et, maintenant, il se retrouvait dans le monde adulte. Pourtant, dans les circonstances, même les plus jeunes étaient poussés à agir comme un adulte. Il n’y avait pas de temps, pas d’espace pour profiter pleinement de leur croissance. Il ne voyait pas Raven comme une enfant, même pas comme une adolescente. La force dont elle faisait preuve, la maturité qui la caractérisait si bien. Il sentait qu’elle pouvait le comprendre et c’était réciproque. De toute manière, il l’aimait, ça ne changeait rien à la chose. Pourtant, lorsque Raven plaisanta sur le sujet, il crut y percevoir une pointe de vérité, une inquiétude. Elle devait se demander si ça l’affectait, lui, s’il s’était fait la réflexion. Il aurait aimé la rassurer, mais ça n’était peut-être pas le bon moment de mettre tout ça sur la table. Après tout, ils étaient bien, ils riaient. Ça n’en valait pas la peine. Il accompagna son rire, évitant d’en rajouter.
Son discours fini, il espérait avoir réussi à la convaincre, même si au fond, c’était seulement de la rigolade. Inconsciemment, il voulait lui prouver qu’il pouvait être bon pour elle, qu’il était peut-être ce qu’il lui manquait, au fond. Lorsqu’il parla de sa prothèse, Raven sembla plus encline à l’idée, pour la première fois. Elle envisageait même une discussion sur le sujet, ce qui montrait son ouverture. Il sentait qu’elle lui donnait un peu plus de place et ça ne pouvait que lui faire plaisir. Son sourire s’agrandit davantage. Elle poursuivit en lui demandant s’il était si collant que ça, ce qui le fit rire. Il n’était pas spécialement collant, il savait donner de l’espace aux autres. Raven n’avait pas à s’en faire quant à sa liberté physique. « J’ai pas dit que j’étais collant! Ce qu’il faut que tu retiennes, c’est que même si tu ne veux plus me voir, même si tu finis par me détester… Je vais être là. C’est tout simple. » Il se faisait plus sérieux qu’il ne l’aurait voulu à ce moment. Il ne voulait pas lui faire de déclaration d’amour, il ne voulait pas qu’elle se sente obligée d’en faire autant. Pourtant, il ne pouvait s’empêcher de lui faire savoir qu’elle pouvait compter sur lui. Raven enchaîna, une moue d’insatisfaction sur le visage. Ça n’était pas assez, elle en demandait plus. C’était clair dans ses yeux qu’elle cherchait à se moquer, qu’elle le taquinait. « Ah, mais ça, va falloir que tu patientes pour le découvrir… Je peux pas tout te révéler d’avance! » Lui aussi, il pouvait jouer le jeu! Ce n’était pas parce qu’elle exigeait une réponse qu’elle allait forcément en avoir une. Et puis, c’était ça, la dynamique, entre eux. « D’ailleurs, je ne me souviens pas que vous m’ayez dit les avantages de sortir avec vous, Mademoiselle Reyes! » Il lui retournait le défi, usant lui aussi du vouvoiement. C’était plutôt drôle, au final, et c’était ça qui le rendait heureux.
La simple hypothèse de te mettre en couple te semble à des années lumières de celle que tu es devenue. Dans le fond, ta séparation plus qu'évidente avec Finn, elle est arrivée quand il a été envoyé sur Terre non ? T'as juste pas voulu y croire, t'as juste pas voulu l'admettre. Au départ, tu t'es demandée s'il était mort. Et il ne l'était pas. Alors y a eu l'espoir. Non, pas une minute, tu ne t'es demandée ce qui avait bien pu lui arriver. T'as juste eu l'espoir, cette petite once de vie, t'as cru que tout allait s'arranger, que s'il était envie, vous aviez une nouvelle chance. Il était parti sur Terre pour toi putain. Il avait été enfermé à cause d'une erreur que tu as faite. Sauf que lorsque tu as atterri, tu as senti que tout avait changé. T'as fini par changer, toi aussi, alors t'imaginer en couple, c'était bien la toute dernière chose dont tu étais capable finalement. Bah oui, t'as réussi à te faire une place en solitaire, dès que t'avais besoin de te faire plaisir, tu le faisais. Ca peut sembler con, dis comme ça, aujourd'hui, mais c'était ainsi que c'était, quoique tu puisses en dire. T4as pas le choix, finalement. Tout est comme ça, t'as plus qu'à te taire. D'une certaine manière, en tout cas, t'as pas non plus envie de te prendre la tête. Sauf qu'il a fallu qu'il débarque à son tour. Enfin… Peux-tu vraiment te plaindre du fait que l'Arche a fini par venir à son tour ? Tu regrettes juste d'avoir voulu te précipiter, l'atterrissage n'aurait peut-être pas été aussi difficile.. Quoique. Disons que t'es là, et qu'il n'est pas particulièrement judicieux de réfléchir à tout ceci, ça n'a pas de sens. Le mieux, c'est de ne pas te prendre la tête, disons que tu peux te montrer relativement maladroite, sans que cela ne soit réellement intéressant, finalement. T'as juste pas envie de te prendre la tête. Et au jour d'aujourd'hui, ton contact avec Kyle Wick t'a à nouveau rendue faible. C'est là que tout semble se compliquer une nouvelle fois. Tu ne regrettes rien Raven, ce n'est pas ça que l'on veut dire, tu n'as juste pas envie de réfléchir à tout ça. Ca te rend folle, mais t'as pas non plus envie de te prendre la tête, ça ne sert à rien. Alors même si c'est difficile à admettre, même si tu as peur de le comprendre et de l'accepter, c'est là, c'est devant toi et tu n'as aucune possibilité d'arranger tout ça. C'est parfaitement impossible en effet. Et que cela te plaise ou non, t'es bien contrainte de faire avec. Contrainte, vraiment ? Pourtant, ça n'a pas tant que ça l'air de te déplaire, voilà où c'est encore plus amusant. Et tu constates, déjà bien facilement, que cela te rend heureuse, c'est à ça que tu penses, quoique tu puisses en dire. Tu ne peux rien en dire de plus. « Donc si je comprends bien où tu veux en venir… Tu insinues donc que même si je viens à te lâcher, tu vas rester là, à tourner autour de moi ? C'est bon à savoir. Autant ne pas te lâcher pour que ce soit vraiment intéresant ». Tu te mets à sourire. Tu ne peux pas savoir de quoi sera fait demain. Voilà où les choses sont compliquées. Sauf que t'as pas envie de penser à demain. Là, t'es bien, t'es déjà bien entouré.
Ne pas tout révéler et ainsi, dissimuler certaines choses. Oui, peut-être que tu ne peux pas tout savoir à l'avance, mais peux-tu vraiment prétendre que tu t'en soucies vraiment ? Non, bien sûr que non. Tu n'es pas uniquement là pour les avantages, tu penses aussi à tout ce qu'il t'apporte. Les rires comme les larmes. Il est toujours là. Finalement, jusqu'à présent, t'as pas eu la moindre raison de te plaindre. « Je vais attendre de voir alors ! Y a-t-il une possibilité de remboursement ? ». Tu te mets à nouveau à rire. Dans le fond, en sa compagnie, tu te sens tellement bien que tu sais que rien ne pourra changer, par rapport à ça. Tu es bien, c'est la seule chose qui compte. Le reste, tu ne t'en soucies même pas, finalement. T'as bien vite fini par comprendre que cela ne servait à rien, finalement. Et c'est la seule chose qui semblait avoir son importance. T4as pas envie de te prendre la tête. Ca n'a pas le moindre intérêt. Ce que toi, tu as d'intéressant ? Tu n'es même pas certaine de pouvoir donner l'impression d'avoir un quelconque intérêt, finalement. T'as pas non plus envie de réfléchir à propos de tout ça, tu sais aussi que cela ne servirait à rien. T'as rien de spécial, ça, t'as fini par très vite le comprendre. Dans le fond, qu'est-ce que tu peux bien prétendre savoir hein ? Rien, bien sûr. Mais y a rien à ajouter à toute cette histoire. T'as jamais vraiment compris pourquoi on s'intéressait à toi, de toute manière. Qu'est-ce qui pourrait vraiment changer, à propos de tout ça, hein ? Rien, voilà. « Ah bah là, par contre, je crains de ne devoir te décevoir, malheureusement ! Y a pas grand-chose d'intéressant ! Une fille qui va constamment avoir des doutes, qui boîte et en plus, qui est jalouse ! T'as tiré le gros lot ! ». Tu recommences Raven… Mais que peut-il bien te trouver, finalement ?
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Mar 14 Avr - 8:10
