heartless to survivre ▬ Rhodan

Elle n’était pas encore habituée, à ça, au vide, à la tranquillité asphyxiante d’un logement pour elle toute seule. Lizz s’y habituerait et bientôt, elle aurait pris goût, au fait de ne pas avoir à éviter ses parents, à s’empêcher d’aller dans cette chambre où les murs avaient été peints comme un ciel qu’ils ne verraient jamais. Pour le moment, le lieu était fortement impersonnel, ces vingt-trois-mètres carrés manquaient d’une touche de vivant. Le peu de ses affaires, pourtant, étaient déjà rangés, dans les armoires, les quelques tiroirs. Les photos étaient restées dans un carton, qu’elle avait planqué dans un coin où elle n’irait jamais, qu’elle laisserait dédier à la poussière et à l’oubli. C’était étrange, un endroit où elle n’avait pas encore ses marques – même si l’agencement était exactement le même que dans n’importe quel logement de la montagne. Ici, il n’y avait pas les fantômes qui la poursuivaient. Ici, elle n’était pas habituée aux mêmes traces d’usures, au ronronnement sensiblement moins fatigué des bouches d’aération. Ca viendrait, et ça durerait pour de nombreuses années.

Après le supplice du souper en salle commune, elle s’était vite retournée chez elle, reprenant sa lecture sur les soins de base du bœuf. Tout était, principalement, à apprendre au jour le jour, observer les gestes de ses mentors, se familiariser avec la présence de l’animal, sans se laisser supplanter par celle-ci. Mais elle appréciait aller plus loin que ça et appliquer un savoir théorique, qui apportait souvent des réponses à des questions qu’elle ne posait pas toujours à voix haute. L’ouvrage était usé par le siècle passé sous terre et parfois elle se perdait à lire les annotations des précédents lecteurs, ne se prenant pas au jeu de rajouter ses propres pensées. Lizz n’avait aucune importance dans ce monde, sa trace serait aussi vite oubliée qu’elle aurait arrêté de respirer. Elle songea, un instant, aux couteaux qu’elle pouvait attraper sur son lieu de travail. Il aurait été facile d’en ramener un. Puis, il ne lui resterait plus qu’à choisir le moment opportun, surement après une patrouille, pour enfoncer la lame dans ses avant-bras. Elle ne craignait pas la douleur, même si elle se doutait que ça la freinerait dans un premier temps. C’était une planification soignée, vers laquelle son esprit glissait, quand elle ne prêtait pas attention. Eh voilà que son regard avait suivi deux pages de lectures, sans qu’elle n’y prête aucune attention.

Lizz poussa un soupir, déposant son ouvrage sur la table basse. Au moment où la quatrième de couverture entra en contact avec le métal, des coups sur la porte retentirent et elle poussa un soupir. Elle n’avait pas besoin de se demander de qui il s’agissait ; c’était évident. Elle se leva, sans se donner une excuse pour retarder sa réaction, ouvrant la porte, le regard baissé, reconnaissant les chaussures et le bas de pantalons des soldats. Elle se décala, prenant place devant le mur adjacent au chambranle, se tenant droite, sans bouger, ou esquisser le moindre mouvement. C’était une routine finement répétée, et Lizz était certainement la plus docile de tous. La plus indifférente aussi. Plus vite elle oubliait cette visite, plus vite elle serait en paix avec elle-même (si seulement elle pouvait connaitre la paix.) Mais cette visite des services militaires, elle ne pouvait pas réellement l’oublier : c’était Rhodan. Elle le remarqua quand elle commit l’erreur de relever le regard, reconnaissant les mains de sa vieille voisine. Puis elle leva encore un peu les yeux, s’arrêtant sur le nom inscrit sur l’uniforme. Mais elle ne dit rien. Rhodan n’était pas son amie. Elle était celle de sa sœur. Elle était celle qui avait rejoint l’armée, peu après que celle-ci soit responsable de la mort d’Andrea. Schéma étrange, aux yeux de Lizz. Schéma répréhensible. De tous, Rhodan était la pire.

22 ans.  Son regard s’ecrasa sur le miroir en face d’elle, et elle se détesta plus que d’habitude tandis qu’elle raccrochait le petit scratch a son nom sur son torse, sur sa poitrine qui battait à tout rompre quelques jours auparavant quand elle avait enfin été choisie pour rejoindre les unités de la garde. Ce n’était pas le plus grand accomplissement de sa vie, mais depuis quatre ans, depuis qu’elle avait abandonné ses études pour être professeur et qu’elle avait exprimé son envie de rejoindre le corps de garde de la montagne, pour être envoyée dans des missions à l’exterieur, elle était enfin exaucée a moitié.  Bien sur, elle devait faire des missions stupides comme les inspections et tout ça. Mais … C’était quelque chose qu’elle devait endurer. Comme le reste. Comme les entrainements. Comme la propagande que l’on infligeait dans son cerveau. Comme toutes ces choses la. C’était quelque chose qu’elle subissait, la tête haute et le regard terne, parce qu’elle savait qu’il fallait le faire.

Alors oui, bien sur. Elle haïssait son reflet en uniforme. Oui, bien sur, qu’elle le haïssait. Qui ne l’aurait pas haï ? Il y’aurait toujours l’ombre d’Andrea sur son épaule, a chaque pas qu’elle ferait. Et elle pouvait voir son air déçu. Parce que forcement Andrea aurait été déçu qu’elle fasse ça. Inquiete peut être aussi. Bien sur qu’elle aurait été inquiete. Bien sur que… Mais voilà. Elle avait accepté de rejoindre les Rebelles avec elle. Elle avait voulu changer les choses avec elle. Et pendant 3 ans elles y avaient cru. Alors maintenant, Andersen s’était mise en tête de continuer le combat en solitaire.  Et de faire probablement la plus inconsidérée des choses pour cela. Rentrer au cœur des choses. Rentrer dans l’armée. Chez les vilains. Alors oui, elle continuerait de détester son reflet, et d’arracher – remettre le scratch sur sa poitrine, parce qu’elle voulait bruler cet uniforme. Mais elle continuait ainsi.

Et aujourd’hui l’inspection lui briserait le cœur une fois de plus. Car Lizz avait les yeux de sa sœur, les traits de son visage. Et a défaut d’avoir la même coloration de cheveux, et les yeux aussi vivaces, c’était un souvenir de la personne pour la quelle elle faisait tout ça.  Ils frappèrent à la porte. Et son lieutenant resta dehors tandis qu’elle pénétrait. Elle savait qu’elle était testée, qu’il ne fallait pas qu’elle fasse d’erreur.  Elle garda la tête droite. Laissa son cœur se saigner un peu plus. Et puis finalement elle ne put s’empecher de parler. «  Lizz. Pardon, Elise. Tout va bien ? Tu n’as rien à déclarer ? »  Elle pouvait sentir l’antipathie dans les yeux de la blonde. Et c’était une image qu’elle n’aimait pas avoir, un sentiment qu’elle ne supportait pas. Ce n’était pas la première fois cependant, et ça ne serait pas la dernière.

Lizz les entendait encore, les rires provenant de la chambre de sa sœur. C’était clair et limpide. Douloureux dans sa mémoire. Puis l’âge avait frappé, jusqu’à ce que la cadette n’entende plus les éclats de joies d’Andrea. Jusqu’à ce qu’elle soit mise de côté, plongée dans une prétendue ignorance salvatrice. Trop jeune, Lizz avait su se qui ce cachait dans les couloirs réservés aux personnes autorisées, et peut-être parce qu’elle avait connu ça, pour ce qui lui semblait toujours, mais ça ne la choquait pas. Elle avait réussi à se persuader que ça n’existait pas, car elle n’avait jamais vu ces gens en cage. Malheureusement pour elle, il n’était pas aussi évident d’oublier l’existence de sa sœur… sa vie aurait été beaucoup plus simple, pourtant. Elle ne pouvait pas oublier tout ce qui était lié à son fantôme. Elle ne pouvait pas oublier Rhodan, les heures qu’elle avait passé dans la demeure des Heath, la manière dont ses pommettes se creusaient, quand elle riait à l’unisson avec Andrea.

Le bonheur était loin maintenant et dans le ton du soldat, elle ne capta que la fatigue et ce vide qui assaillait aussi l’âme de Lizz. Presque, elle aurait souri. Mais il n’y avait rien d’amusant dans cette situation, et s’il y avait bien une chose que l’adolescente souhaitait à son ainée, c’était des tourments aussi invasifs que les siens. Elle ne regarda pas Rhodan dans les yeux, évitant presque son regard, son attention ne remontant pas plus haut que l’épaule, les mains le long du corps, essayant de bouger le moins possible. Elle aurait même arrêté de respirer, si ça lui avait procuré la possibilité de devenir invisible (ça ne fonctionnait pas. Dans ses jeunes jours elle avait essayé et le garde de passage avait cru qu’elle faisait un malaise). Tout ce qu’il suffisait de faire, c’était de resté neutre, et tout aussi naturel que possible. Enfin… Lizz chassait tout de même le naturel, sinon elle aurait claqué la porte au nez de Rhodan. Ce qui aurait été suspect. Mais allez raconter aux soldats qu’elle ne voulait pas de Rhodan parce qu’elle la considérait comme majoritairement responsable de la mort d’Andrea – avec tous ces rebelles qui lui tournaient autour – et Lizz aurait été bonne pour subir le soldat Andersen jusque la fin de ses jours.

« Tout va bien ? Tu n’as rien à déclarer ? » Un mince soupir agacé lui échappa, alors que son front se plissait légèrement, preuve de son irritation. Ce n’était pas tant la question qui l’énervait. C’était l’individu et Lizz n’en serait jamais débarrassée assez vite à son goût. « Non. » C’était tout. Quelqu’un de plus loquace aurait fait une plaisanterie et toi ? l’aurait invité à poursuivre son inspection vas-y, sens-toi libre de fouiller mes affaires. Mais déjà, Lizz n’aimait pas partager avec le genre humain, elle n’allait pas faire d’efforts pour les soldats, encore moins pour Rhodan. Elle connaissait la routine, connaissait l’ordre des questions – et de fait, celui des réponses. Et elle comptait fort, très fort dans sa tête. Avec un petit miracle, tout serait terminé en 4 minutes et 53 secondes. Normalement ce n’était pas si long, mais elle venait de s’installer, première inspection, mesures particulières – elle s’était renseignée.

Ses mains tremblèrent un peu. Les inspections duraient cinq minutes, et se passaient en général assez bien. A part pour quelques gredins qui cachaient des bouteilles d’alcool ou qui avaient volés des cables, il ny’avait pas spécialement de problèmes dans la montagne. Pas de problèmes en surface bien sur. On ne parlerait pas ici des résistants, des rebelles, et de ces gens en cage qui donnaient leur sang de manière non volontaire. Non, les inspections se passaient bien, et elle en avait déjà fait quelques unes, - fort peu passionantes au demeurant, elle avait hate de changer de fonction, pour quelque chose d’un peu plus…. Intéressant. Un peu plus rempli d’action. Elle le savait d’ailleurs, si elle continuait a avoir d’aussi bonnes évaluations, elle pourrait sortir dans les brigades extérieures. En combinaison, mais c’était déjà ça. Alors il fallait continuer et endurer, elle savait faire. - voir même plus que quelques unes, sans soucis. Non, le soucis était la, dans la silhouette blanche et peut être un peu trop blafarde, qui se dressait à coté d’elle, probablement irritée par l’intrusion. Le soucis était la, dans cette forme qu’elle avait connu bien plus petite. Enfant. Nouvellement née. Cette personne qu’Andrea avait tenu dans ses bras un jour en lui présentant fièrement « C’est ma sœur. » Cette fille dont Andrea lui parlait parfois en lui disant ce qu’elle rêvait pour elle. Pour elles. Le soucis pour Rhodan était la. Les Heath avaient presque été sa famille, tandis que la sienne était celle d’Andrea pendant des longues années, et tout s’était fissurée à la mort de celle ci.

Elle avait essayé. Bien sur elle avait essayé, de rester proche d’Elise, mais elle semblait être l’enemie pour celle ci qui avait besoin de quelqu’un a haïr. Et comment lui en vouloir ? Elle aussi se haïssait. C’était de sa faute si Andrea était morte. Elle aurait du la dissuader de toutes ces idées stupides. Elle aurait du lui garder les pieds sur terre, ou mourir à sa place. Comment en vouloir à quelqu’un qui la haïssait probablement, alors qu’elle, elle se haïssait pour les meme choses ? C’était stupide. Elle marqua quelques secondes d’arret, presque imperceptibles, et fui le regard de son supérieur qui se raclait la gorge derrière la porte. Etait-ce un test ? Si ça l’était il était de mauvais gout… Non, c’était juste ce qui se passait sous la montagne. La vie était injuste et il fallait juste faire avec.

Son regard se durcit. Et elle tenta de faire revenir le professionnalisme. « Bien. Tu permets que j’inspecte ton logement ? » Ca n’avait pas été des plus professionnels. Elle aurait du se présenter. Elle se ferait sermonner plus tard. Mais elle n’avait pas pu. Il y’avait comme un vide en elle quand elle regardait la jeune fille, et elle ne savait pas si elle était capable de supporter son regard encore une fois. Ou peut être, oui peut être, qu’elle le cherchait, pour avoir ce qu’elle méritait une fois de plus.

Quelques secondes étaient passées à nouveau, et attendant l’affirmation qui lui permettrait de jeter un œil dans le minuscule appartement – elle n’avait pas mieux pour le moment , elle non plus – elle perdit son regard sur la décoration de la pièce, tout pour finalement éviter de regarder une fois de plus la blonde. Elle était lache par moments Rhodàn, et ça ne faisait pas parti de ses plus grands actes de bravoure. Elle ne lui imposerait pas sa présence plus longtemps… Ou peut être que… Non. Finalement ce fut plus fort qu’elle, car alors que son regard revenait vers le sol, puis remontait sur Elise, elle se permit une question qu’elle aurait du taire à jamais. « Comment les choses se passent pour toi ? » Elle passerait probablement des années encore à s’inquieter pour elle, comme Andrea l’aurait fait. Comme si cette mission lui revenait, sans qu’elle ne l’ait voulu, et sans que l’autre ne l’accepte.

Ces intrusions du quotidien, Lizz y était habituée. Elle s’était faite à l’idée qu’elle n’aurait aucune vie privée – elle supposait que le jour où elle perdrait sa virginité, ils seraient tous au courant, chez les gardes – qu’elle ne pourrait jamais avoir de petits secrets, ne serait-ce qu’un tiroir où elle garderait des choses précieuses, rien que pour elle. Non. Lizz était destinée à repasser après chaque garde qui défaisait ses vêtements, pour les plier méthodiquement. Lizz était destinée à avoir des gros secrets, garder le nom des rebelles qu’elle connaissait, pour elle – Andrea ne lui aurait jamais pardonner – ne parler à personne de ces hommes enfermés dans des cages, se trouver toujours une bonne excuse pour ne pas courir à l’infirmerie quand elle se coupait méchamment. Il n’y avait pas d’adolescence insouciante, pour elle. Pour ça, il fallait un cœur, et Lizz avait perdu le sien quand sa sœur avait été emmenée. C’était plus facile ainsi, ça lui évitait de pleurer un mot qui ne revenait jamais. Et la colère ressentie était un fuel dont elle avait besoin, pour survire à tout ce fiel dissimulé.

Emotion que Rhodan risquait de plus en plus à se prendre à la figure. Déjà, elle n’embrayait pas sur la fouille. Lizz la voyait pantoise, en plein milieu de son appartement, et pour peu, elle aurait juré que c’était elle, la jeunette, qui était le soldat bien éduqué. Oh, Rhod, quoi, tu as des remords ? Maintenant ? Ca ne serait pas dit, et la pensée ne fut même pas. Il n’y avait que ce regard vide, à moitié clos, qui suivaient les mouvements du jeune soldat, sans jamais dévisager. « Bien. Tu permets que j’inspecte ton logement ? » Elle leva les yeux au ciel. Enfin ! Mais d’où venait cette demande ? Elle inspira, levant son bras en direction de ses affaires. « Oui. » Et sa mâchoire se resserra immédiatement, empêchant tout mot de travers de sortir. Tu sais que ma permission n’y changera rien. Il ne fallait pas surenchérir, sinon, ça s’éterniserait. Il ne resterait plus que deux questions, dans sa routine mentale et déjà, Lizz était à bout. Déjà, Lizz avait envie de lui hurler le monde, son monde fait de paranoïa et de rancune qui n’obtiendrait jamais de réponse. Parce qu’Andrea était morte et que rien ne la ramènerait. Ça faisait quatre ans qu’elle était partie, beaucoup plus d’années de souffrances.

Mais il n’y eut aucun mouvement, et finalement son regard perça Rhodan sur place, un bleu furieux plantant le vert hésitant. « Comment les choses se passent pour toi ? » Ca, ce n’était pas dans la routine. Et c’était une mauvaise blague, la forcer à faire la conversation, alors que Lizz avait ça en horreur. Encore plus quand c’était le soldat Andersen qui était en face d’elle. Elle expira lentement, l’enfant qui avait grandi trop vite, tournant la tête vers la droite, vers la porte, songeant à la fermer violement, empêcher l’autre soldat de les embêter, pendant que Lizz allait de sa colère contre Rhodan. Ca n’aurait pas joué en sa faveur. Et puis, elle reposa son attention tranchante sur son vis-à-vis. « Ça ne te regarde pas. » Lâcha-t-elle finalement, sec et tranchant, sa langue claquant sur ses dents, comme ses mots claquèrent – elle l’espérait – à la surface de Rhodan. Il y eut une interruption. « Réponds à la question, Elise. » Ça venait de l’autre homme et elle serra sa main gauche formant un poing. La tension dans sa mâchoire était maintenant évidente. Elle inspira, ne lâchant définitivement plus Rhodan. Elle connaissait le secret de la jeune femme. Et tout avait les allures d’un traitre, qui tournait le dos au corps d’Andrea pour rejoindre les forces armées. « Ca va. » Elle pencha la tête sur la droite, en un geste presque nerveux, reprenant sa position rigide en un clin d’œil. Ca va, quand je pense que bientôt, je ne serai plus là. « Le programme d’élevage est intéressant… pas besoin de faire la conversation avec les animaux. » Ironique, quand on songeait que Lizz était beaucoup plus loquace avec ce qui ne possédait pas 23 paires de chromosomes.

Et puis, elle ferma les yeux, tentant d’empêcher ce qui allait arriver. Elle le sentait dans tout son crâne, et finalement, elle ne put que s’entendre dire, une fois qu’elle eut Rhodan à nouveau dans son champ de vision. « Tu manques aux parents. » Premier coup. « Tu sais quel jour on sera, la semaine prochaine ? » Deuxième coup. Rhodan savait ce qu’il en était, de la semaine prochaine.

Ce qui était fait était fait. Les choses ne seraient plus jamais les mêmes, et si Rhodàn essayait de se raisonner, elle savait que ça ne marcherait pas. Elle savait qu’il en était ainsi, qu’Andrea n’illuminerait plus jamais ses journées. Diable, ça faisait 4 ans. 4 ans qu’elle avait décidé de changer le cours de sa vie pour… Pour rien en fait. Elle se mordit l’interieur de la lèvre, et tenta de se concentrer sur la tache qui s’offrait à elle. Ce n’était pas des plus faciles, pas aujourd’hui. Pas cette fois. Pas ici.  Et c’etait des moments comme ça qui lui faisaient regretter ce qu’elle avait fait.  Qui lui faisaient regretter d’être ainsi, d’avoir tout abandonné pour une idée futile. Pour une chimère qu’elle n’atteindrait jamais. Parce que meme si elle en rêvait, elle doutait bien qu’elle ne pourrait jamais faire tomber la montagne. Pas seule. Et meme avec les quelques rebelles ils ne pourraient pas faire grand chose non… Au contraire.  Alors peut être qu’elle faisait tout ça pour rien. Peut être qu’elle gâchait ce qu’il restait de sa vie pour une idée de justice qui était peut être fausse…. Non. Elle ne devait pas faillir. Et sa vie était déjà gâchée de toutes les manières. Sa vie ne lui avait plus appartenu depuis ce jour elle avait serré la main de la brune une dernière fois.  

C’était Lizz. C’était sa faute si elle était comme ça. Si tout lui revenait en mémoire d’un coup, et si elle se haïssait encore plus sur le moment. C’était sa faute, si elle n’arrivait pas à être professionnelle. Si elle donnait l’impression d’avoir quatre ans de moins débutant dans le corps militaire. C’était sa faute si…. Non. C’était stupide. Rien n’était de la faute de Lizz, mais tout était de sa faute à elle. Elle, Rhodan Andersen. Jeune soldat. Non, pas si jeune que ça. Elle avait déjà 22 ans, et elle avait l’impression de porter plusieurs vies dans sa tête. C’était peut être ça. Peut être qu’elle essayait de …. Stop.  

Elle aurait du se contenter de l’inspection, maintenant qu’elle avait l’agréement, mais voilà. Ca avait été plus fort qu’elle. Elle s’inquietait pour Lizz, elle savait que ce n’était pas tout rose, elle savait que ça ne le serait jamais. Et elle se sentait responsable. Elle se sentait troublée. Elle… posa la question dont la réponse ne tarda pas. «  Ca ne te regarde pas. »  C’était froid, comme un couteau qui s’enfoncait dans sa chair. C’était froid, comme une douche de glaçon. Comme ce qu’elle ressentait continuellement à vrai dire. C’était froid et douloureux. Le lieutenant insista, alors qu’elle se renfrognait déjà, rentrant dans sa coquille. «  Ca va »  Rhodan était tendue maintenant. Tendue et déprimée. Elle..  L’interieur de sa bouche apporta comme un gout de sang sur son palais tandis qu’elle plantait les dents dans la membrane de sa joue. «  C’est bien. »  C’était la réplique stupide de quelqu’un qui ne savait pas quoi dire. «  L’essentiel c’est que ça te plaise. » A une autre époque, elle aurait pu être ravie pour elle, elle l’était un peu en fait, mais elle savait que c’était…  que c’était different maintenant.  Son inquiétude était cependant sincère.

San rien rajouter, elle allait commencer l’inspection, quand la voix surgit de nouveau. «  Tu manques aux parents. » Un frisson. Un nouveau coup de couteau. «  Tu sais quel jour on sera, la semaine prochaine. » Par chance, elle était tournée vers la pièce presque vide, et la lueur qui passa dans ses yeux fut ignorée de tous.  Le coup cette fois était bien trop fort et c’était comme si son cœur cessait une fois de plus de battre. Elle ne pouvait pas être faible cependant. Elle ne pouvait pas se le permettre. Elle ne pouvait pas le montrer. Elle serra sa main sur le pan gauche de sa chemise, dans un tic qu’elle avait depuis trop longtemps maintenant. «  Ils me manquent aussi. »  Il avait fallu quelques secondes pour qu’elle se retourne vers Lizz, fuyant vaguement le regard de l’autre homme qui semblait s’impatienter. «  Malgré ce que tu as l’air de penser, je n’oublie pas. »  Son regard était presque vide, mais après une bataille, la tristesse avait prit le pas sur le reste. C’était trop tot peut être. Elle n’arrivait pas encore à tout cacher. Il fallait qu’elle donne le change, qu’elle ne montre pas qu’elle était affectée. Elle tenta un vague sourire, qui ressemblait plus à une grimace qu’autre chose. «  Je passerais voir tes parents. »   Et puis elle irait dans les cages, comme chaque année, se rappeler pourquoi Andrea était morte. Et pourquoi elle, elle faisait ça.    Il y’avait tant de choses qu’elle voulait dire encore. Tant de choses qu’elle voulait ajouter à Lizz. Mais elle les avait déjà dites. Elle avait essayé. Et elle continuait à penser que la jeune fille avait raison de la haïr. Même si… elle aurait voulu s’expliquer. Non. Aujourd’hui n’était pas le jour. Ici n'était pas l'endroit.

Il y avait des façon dont le monde se moquait des humains qui y vivaient. Dans une enfance oubliée, Lizz avait passé tous ses jours à voir Rhodan –qui était là pour Andrea, mais soit. Le soldat, quand il n’y avait encore rien de militarisé dans ses projets futurs, où seul apprendre aux autres comptait, était considéré comme un membre de la famille Heath et Lizz avait aimé Rhodan, profondément, comme si ça avait été sa propre sœur. Souvent, la blonde avait été de meilleurs conseilles que ce que la logique des liens de sang conseillait. Et voilà où elles en étaient aujourd’hui, à jouer au concours de celle qui aurait le regard le plus vide, Lizz qui ne supportait pas la présence de Rhodan, qui ne supportait même pas son existence. Il y avait des tournants dans une vie et la date de la disparition d’Andrea était la facture la plus marquante de leurs histoires. Ça n’effleurait même pas l’enfant qui avait grandi de se poser la question de la culpabilité de son vis-à-vis. C’était évident que Rhodan pleurait encore Andrea. Aux yeux de Lizz, pourtant, elle ne méritait pas ce genre de remords. C’était Andersen, seule, qui avait décidé de devenir un soldat. C’était elle qui s’était détournée de tout sens de justice, bafouant la mémoire d’Andrea.

Lizz restait un enfant, qui ne cherchait pas les causes exactes et qui garderait cette vision tronquée de la vie, pour encore de nombreuses années. Et elle continuerait de balancer cette réalité à la figure de Rhodan. Parce que Lizz était très douée pour se convaincre de ce qu’elle voulait. Et dans ce monde où tout le monde était un potentiel danger pour elle, Rhodan serait l’ennemi à abattre. « L’essentiel c’est que ça te plaise. » Elle plissa un peu les yeux, échappant un « hm » peu convaincu. Ce qui me plairait, c’est que la douleur n’existe plus. Mais de ça, tu t’en fous, non ? Tout ce qui avait un jour pu exister entre elles était définitivement mort, et Lizz n’allait pas pleurer sur ça. Le plus loin elle se tenait des militaires, le mieux elle se sentirait. Ce qui n’était pas près d’arriver aujourd’hui, puisque Rhodan s’attardait et grignotait, sans le savoir, le peu de patience que Lizz avait, concernant le sujet sensible de sa famille. Alors oui, ça avait éclaté. Alors oui, l’adolescente en fut même fière, de l’effet qu’elle produisit sur le soldat Andersen, qui refusa de se retourner après que sa phrase la plus terrible soit prononcée. C’était dévastateur, parce que ça restait la vérité. Bientôt, ça serait l’anniversaire d’Andrea, et il n’y aurait plus personne à fêter.

« Malgré ce que tu as l’air de penser, je n’oublie pas. » Elle aurait souri, Lizz, si ça avait été matière à rire. Mais non, la disparition était un sujet qu’elle prenait trop à cœur, un sujet trop douloureux et actuel, pour qu’elle puisse en faire un quelconque sujet de plaisanterie. Elle n’en tira que très peu de satisfaction, même. Parce que la souffrance était toujours présente et que ça n’enlevait rien à son mal être. Ca restait plus fort qu’elle, qu’importe sa raison qui lui criait de fermer sa gueule et de se contenter d’observer un point sur le mur en attendant que ça soit terminé. C’était son instinct de survie, sa manière de se détacher du monde, en rappelant constamment le poids qu’il avait sur leurs si frêles épaules. « Je le sais. » C’était presque un murmure et finalement, elle détacha son regard de Rhodan, retournant à l’observation des chaussures bien cirées, comme il était exigé dans le règlement (il était possible qu’elle ait lu ça, oui). « Je passerais voir tes parents. » Ce n’était pas une victoire, ça n’en avait pas le goût et Lizz ne serait jamais victorieuse de quoi que ce soit. Elle haussa les épaules, détendant finalement son poing gauche. « Fais comme tu veux. » Ce n’était plus un secret pour personne, que sa relation avec ses parents n’allait plus. Lizz s’était enfermé du monde, enfermée des sensations trop étouffantes pour elle. Avec Andrea était mort sa famille. Avec Andrea, Lizz comptait les jours où elle pourrait la rejoindre, où elle pourrait mettre un terme à sa lente suffocation.

Et elle retourna à son mutisme dans lequel elle se sentait si bien, le regard arrêté sur un point qui n’existait pas, un point où Rhodan n’existait pas.

L’essentiel c’est que ça te plaise C’était elle qui l’avait dit et pourtant ça sonnait tellement vide. Elle n’aurait pas du parler, mais la jeune blonde en face d’elle perturbait ses attitudes. Nul doute qu’en rentrant elle attaquerait une de ces bouteilles qu’elle gardait précieusement dans un des placards de son minuscule appartement qui n’était pas beaucoup plus décoré que celui ci. Et peut être que pendant trente minutes – voir même un peu plus – elle fuirait la douleur. Cette rémanente brulure qui lui rongeait l’ame depuis quatre ans. Ou peut être qu’elle aurait besoin de plus que ça. Car Lizz savait trouver les mots qui faisaient mouche sur Rhodan, et c’était pire que tout. Comment oublier ? Elle n’oublierait jamais, Rhodan, les sourires de la brune, la douceur de sa main dans la sienne, la texture de ses joues, la candeur de ses regards et leur intensité parfois. Elle n’oublierait jamais Andrea, ni toutes les dates ou tous les détails la concernant. Et une part d’elle se doutait que Lizz le savait a l’intérieur. Mais oui, tout était brisé n’est ce pas ? Et Rhod’ sentait bien que Lizz voulait la faire souffrir, elle s’y prenait plutôt bien d’ailleurs…. D’autant que la militaire courait volontairement vers les fosses de piques qui se posaient sur son chemin. Elle aimait souffrir et pensait le mériter.

Alors oui, elle acceptait les critiques qui n’étaient pas dites, elle acceptait les perches empoisonnées qui se tendaient vers elle, et s’y laissait blesser. Parce qu’il y’avait sur ses épaules ce voile qui ne disparaitrait pas. Elle était coupable de la mort d’Andrea, car elle n’avait pas su trouver un moyen de l’empecher. Et ça, rien, pas même la logique, ne lui ferait changer d’avis.

Elle n’oubliait pas. Elle n’oublierait jamais. Et si elle s’était tournée vers Lizz, elle le regretta assez vite. Il y’avait des regards qu’elle préférait fuir dans sa lâcheté tellement humaine. Et un regard semblable à celui d’Andrea, qui n’était pas le sien. Qui était vide comme elle même l’était…. Ca ne lui faisait pas du bien. Ca la hantait d’ailleurs, même si elle ne l’avouerait jamais. Je n’oublie pas. Elle avait oublié la présence de l’autre stupide militaire par contre. Elle avait oublié que le monde continuait. Elle avait tendance à le faire souvent ça. Oublier qu’il y’avait autre chose, et que vivre dans le souvenir d’Andrea n’était pas quelque chose de sain. Quelque part elle se disait que Lizz était dans le même cas. Mais elles avaient passé cette période où elles auraient pu en parler et partager leur peine. Peut être parce que oui… Rhodan avait rejoint les militaires sans jamais rien expliquer. Mais Lizz n’était pas une rebelle, et elle ne pouvait pas savoir. Il y’avait trop de risques. Il y’avait trop de choses en jeu. Bien plus grandes que sa satisfaction personnelle. Bien plus grandes qu’un simple jeu d’égo ou de blessures.

« Fais comme tu veux. » Elle haussa les épaules, Rhod. Elle n’attendait ni approbation, ni saut de joie de toute façon, et elle savait que Lizz ne s’opposerait pas à elle. Quel intérêt. Elle avait entendu ce que les gens disaient. Quel a fille des Heath ne leur parlait presque plus. Que ses parents avaient plus ou moins perdus leur seconde fille. Et elle souffrait pour eux. Pour cette famille aimante qu’elle avait partagé pendant 18 années. 18 Ans de bonheur. 4 ans de cauchemar. Elle ne sen remettrait pas. Elle ne s’en remettrait jamais. Et elle se doutait que pour Lizz les choses étaient pareilles. Elle ne savait juste pas comment les commenter. Comment les aborder.

Alors elle s’occupa de l’inspection. En silence. Et méticuleusement. Cherchant au passage si il n’y’avait pas des objets trop coupants, ou dangereux. On ne savait jamais. C’était plus ou moins sa manière à elle de prendre soin de Lizz. Ce que la petite ne lui permettrait jamais de faire. Quelques secondes passèrent. Peut être deux minutes. « Rien à déclarer, l’appartement est parfait. » Elle regarda son lieutenant et la jeune femme aussi. Comme si elle cherchait quelque chose à ajouter, et qu’elle ne trouvait pas.

Il y avait quelque chose de terriblement gênant, de regarder des individus fouiller les affaires personnelles, sans pouvoir les empêcher. Lizz était passée au-dessus de ce sentiment. Lizz était passée au-dessus de tout sentiment. Elle suivit distraitement Rhodan du regard, sachant pertinemment ce qu’elle trouverait, en fonction de chaque tiroir qu’elle ouvrait. Ce n’était pas parce qu’il y avait peu d’affaires, mais à force d’avoir son chez-elle fouillé régulièrement, elle avait développé la manie de tout noter, de tout mettre à la même place, aussi. Ainsi, quand les gardes remarqueraient la similitude constante, ils deviendraient moins prévoyants. C’était une faille qu’elle prévoyait d’utiliser un jour, si besoin. Oh. Elle ne planquerait pas un couteau comme ça. Il suffirait d’un peu de papier collant, pour cacher le tout dans un coin impossible. Lizz était devenu une routine, elle n’était pas une menace. Un risque, oui, mais elle ne serait jamais un danger pour les autres… et plus important, elle ne serait jamais un danger pour les hautes instances du Mont Weather. Elle s’était assurée d’être la plus inoffensive possible, se pliant aux moindres caprices des militaires, ne discutant jamais contre eux. Ils lui avaient pris sa sœur, elle ne voulait pas qu’ils lui prennent autre chose à cause d’un caprice, d’un élan de colère qui passait mal.

Ce fut presque avec regret que Rhodan ne s’attarda pas sur le carton que Lizz n’avait pas encore déballé. Elle fut même tenter de l’apporter à l’attention du soldat Andersen. C’était une négligence. Mais elle se mordit le bout de sa langue qui était prêt à dépasser. Elle avait déjà eu sa vengeance pour aujourd’hui. Tout ce qu’elle avait à faire, pour rattraper l’erreur de Rhodan, serait de sortir une vieille photo d’Andrea et de leur famille, et la mettre bien en évidence, pour la prochaine fois que sa vieille amie viendrait vérifier ses affaires. Elle ne pourrait pas la rater. Lizz s’en assurerait. Finalement, le supplice fut presque terminé et le tour du logement, ridicule et minuscule (elle n’avait pas besoin de plus. Lizz veillait à ne pas prendre de place. Elle ne voulait pas plus) fut complété, par une Rhodan qui revint se planter dans son champ de vision. Une Rhodan que Lizz refusait à nouveau de regarder, le bleu de ses iris se plantant, de manière constante, sur la base de l’épaule de l’autre blonde, ne cherchant pas à monter plus haut. « Rien à déclarer, l’appartement est parfait. » Elle ferma les yeux, pour éviter de lever les yeux au ciel. Bien entendu qu’il est parfait. Tout, ici, était calculé pour que ça le soit. Puis, elle hocha la tête, seul signe extérieur qu’elle avait entendu. Et elle ne fit plus rien, restant en suspens jusqu’à ce que Rhodan comprenne qu’il était temps de partir, qu’elle ne tirerait plus rien de Lizz aujourd’hui. Elle avait assez donné de sa verve, et elle retenait qu’elle n’en avait rien retiré de satisfaisant.

Non, il n’y avait que cette colère qui tournait, encore et encore, inlassablement dans son système. Que cette colère qui la rendait malade, et perde sourde de tout ce qui l’entourait, sourde des appels à l’aide que les autres lui lançaient. Lizz n’avait pas de raison de les écouter, dès les supporter. Elle était la survivante de sa croisade solitaire et tout se finirait suivant la constante de sa vie, depuis quatre ans. Dans un éclat de rage. Ainsi, la porte se ferma sur la silhouette des deux militaires et elle comptait jusque à dix, pour finalement se détendre, relâcher la tension dans sa mâchoire. Mais ce n’était pas suffisant, et rageusement, elle se dirigea jusque la table basse où reposait son ouvre. Table basse qu’elle empoigna férocement, avant de la lancer de toutes ses forces conte le premier mur. Le bruit emplit ses oreilles, métal se heurtant contre un semblable. Et elle était à bout de souffle, se moquant que son explosion se soit faite entendre par les autres. Ils n’existaient pas, jusqu’au prochain contrôle.

Le reste de l’inspection se déroula en silence. Elle n’avait rien à rajouter Rhodan. Elle avait vu les meubles presque vides, le peu de vêtements, et le peu de vie aussi. Et elle avait entraperçu des choses qu’il y’avait dans un carton, qu’elle avait preferé ignoré. Ces vieilles photographies. Elle avait les meme parfois. Dans un carton aussi, sous son lit, avec des lettres aussi, et quelques souvenirs. Des etoiles phosphorescentes, et … Ce n’était pas le temps de penser à tout cela. C’était fini. C’était loin derrières elles. Et entre les deux blondes il n’y’aurait jamais rien d’autre qu’une relation de froideur distante. Parce que Lizz s’était distancée de sa famille et de Rhodan, et que Rhodan s’était distancée de tous. Parce qu’elle ne pouvait pas se permettre de vendre l’hameçon sur ce qu’elle était.

L’inspection était finie. Elle se concentra sur ça. Et elle rangea avec délicatesse les quelques vêtements qu’elle soulevait. Elle ne voulait pas être brusque, elle ne voulait … et bien elle ne savait pas ce qu’elle voulait a vrai dire. Elle savait juste que… Non, elle secoua la tête. Elle n’avait aucune raison d’être tendre et douce avec Elise. Car Elise n’était plus la petite sœur de sa meilleure amie. C’était juste une habitante de la montagne, que Rhodan avait juré de protéger. Fin de l’histoire n’est ce pas ? L’appartement était parfait et maintenant ils pouvaient s’en aller. Vers d’autres aventures. Vers de nouvelles inspections. Assurement moins douloureuses. Oh bien sur, la douleur reviendrait. Elle venait toujours. A chaque pas. A chaque couloir. A chaque image. Chaque soir elle voyait Andrea qui lui parlait des étoiles, elle sentait sa main chaude entre les siennes. Chaque nuit, elle voyait son sourire. Et ça ne partait pas. Ca ne partirait jamais et elle le savait bien.

Mais voilà. L’inspection était finie et c’était déjà bien assez pour aujourd’hui, tandis que la porte se claquait derrière Andersen et le lieutenant Daniels qui adressa un sourire à sa recrue. « Je vous felicite Andersen. Elle n’avait jamais autant parlé pendant les inspections. » La question menaçait peut être, dans le regard de l’homme de quarante ans, et Rhodan n’était pas des plus encline à lui répondre. A répondre à ce qui pourrait venir. Est ce que vous la connaissez ? Elle sentait tellement cette question venir assaillir son ame, qu’elle se renfrogna un peu. « Merci. » C’est tout ce dont elle se fendit finalement, et après un dernier regard vers la porte, elle reprit sa marche. « Continuons, il nous reste 3 salles à inspecter » Un semi sourire. « Avec tout le respect que je vous dois. » Et c’est suivie par un lieutenant curieux mais souriant qu’elle continua sa tournée.