On Stranger Ties — Lexa & Athena

   

La jeune femme avançait d’un pas lourd sur les décombres. Des bâtiments écroulés ne restaient plus que des tas de briques, de tôles et de tuiles, et de la cendre, beaucoup de cendre. Certains bâtiments continuaient à brûler mais les constructions rudimentaires, celles faites de bois et de peau étaient elles déjà parties en flammes. Le foulard entourant son visage la préservait à peine de l’épais nuage de fumée âcre et de l’écœurante odeur de chair brûlée. Elle ne pouvait maîtriser les continuels haut-le-cœur qui la prenaient alors qu’elle ramassait et transportait les innombrables corps.

C’était le petit matin mais la lueur des flammes se voyait encore partout. Aux crépitements des brasiers se mêlaient d'innombrables cris d'horreur. La survivante eut un instant à l’esprit l’attentat d’Unity Day. Contrairement au crash de l’Arche celui-ci avait été criminel, comme c’était le cas ici, mais devant cet holocauste, le mot « destruction » paraissait faible. Depuis l’aube, survivants et sauveteurs effarés se déplaçaient dans cet enfer en découvrant les monceaux de cadavres de leurs semblables et chassant les mouches de sur leur peau. Pas moins d’une centaine de morts, et sans doute davantage de blessés. Beaucoup de ces victimes étaient carbonisées, démembrées ou avaient péri par suffocation, avant même que le feu ne les ait atteintes.  

Bien que l’air soit sans doute frais à l’extérieur, ici la température était élevée, faisant transpirer à grosses gouttes ceux qui se déplaçaient sur les ruines fumantes. Les survivants errants comme des fantômes, terriblement brûlés ou agonisant réclamaient inlassablement de l’eau ou de l’aide. Certains la remerciaient, d’autres buvaient puis vomissaient du sang et mouraient. Des frissons d’horreur la parcouraient lorsqu’ils arrêtaient de bouger, mourant devant elle sans qu’elle n’ait pu rien faire.  Une fois une main lui avait brusquement saisi la cheville, celle d’un homme dont le corps était bloqué sous un amas de pierres. Elle avait réussi à le libérer  mais il avait expiré son dernier souffle peu de temps après. Elle se sentait tellement impuissante parfois...

Rogan aidait ceux qui travaillaient à dégager les survivants des décombres tandis Teela s’affairait aussi, accourant pour amener de l’eau ou pour aider les blessés à rejoindre l’hôpital de fortune qui avait été mis en place. Celui-ci avait été pris en charge par le docteur Griffin que l’ancienne garde de l’Arche avait simplement salué d’un signe de tête pour éviter de la déranger dans son travail. Il y avait tant de vies à sauver et heureusement, tout le monde s’y mettait. Cette enfant auprès d’elle était forte, sans doute plus que nombre d’adultes et ce malgré son jeune âge, mais son sourire et son entrain avaient disparu. Elle prenait soin des blessés en affichant la même gravité que celle qui devait se peindre sur le visage de la blonde en cet instant-même.

Alors que la militaire déposait le corps d’un enfant tremblant près des autres blessés, une femme avança vers elle, bras tendus parce que des lambeaux de sa peau écorchée pendaient au bout de ses doigts. Sa chair rouge était humide et à vif, ces cheveux brûlés, elle ne devait pas en avoir pour longtemps. C’était sans doute aussi ce que pensa un des grounders qui se trouvait près d’elle et tira son couteau en prononçant les paroles « Yu gonplei ste odon ». Ces dernières semaines, la survivante de l’Arche avait fini par comprendre la signification de ces paroles. Il était prêt à l’achever pour abréger ses souffrances.

« Stop ! », l’arrêta Athena en posant sa main sur le bras de l’homme massif. La lèvre de la femme tremblait et elle semblait vouloir dire quelque chose bien que ce ne fut pour la fille du Ciel ces paroles furent incompréhensibles puisqu’elle ne comprenait pas la langue. Elle se tourna vers le grounder près d’elle mais celui-ci ne semblait pas plus comprendre ce qu’elle disait, sans doute parce que son visage et sa gorge brûlés devaient rendre difficile l’élocution. Il s’avança à nouveau mais la blonde se mit cette fois-ci en travers.

Son intuition lui disait que ce qu’avait à dire la mourante était important. Le guerrier l’intima d’une voix venimeuse de dégager, mais à cette instant une main décharnée et à moitié carbonisée se tendit vers les décombres. La jeune femme se précipita dans la direction indiquée et regarda partout autour d’elle, cherchant ce que la femme avait pu indiquer. D’abord elle ne vit rien si ce n’était davantage de cendres et de cadavres, mais c’est alors qu’elle entendit quelque chose, bien que faiblement : des cris et pleurs de nourrisson.

Avec grandes précautions elle retira les pierres et attrapa le bébé, entouré de linges. Il ne devait pas avoir plus de quelques jours et même si son visage était rougeaud et couvert de cloques du fait de la chaleur, il ne semblait pas blessé. Ses traits étaient tordus dans une grimace mais sa voix semblait étrangement faible, comme assourdi. A la recherche d’éventuels blessures elle constata que quelque chose n’était en effet pas normal. En ouvrant les linges elle vit que son pied gauche était déformé, tordu, gonflé, d’une forme étrange voire monstrueuse. Elle le recouvrit vite, cachant sa surprise puis retourna vers la mourante qui devait être la mère et la rassurer.

Elle arriva trop tard. Le grounder n’avait pas du attendre car son corps était étendu inerte sur le sol quand elle arriva, une plaie sanguinolente à l’emplacement du cœur. Athena serra les dents tandis que le cadavre était emporté vers la fosse commune, les yeux et la gorge brûlants. Le nourrisson dans les bras elle se tourna à la recherche d’une jeune femme qui pourrait en prendre soin tandis qu’elle continuait à aider les survivants. C’est alors qu’elle se retrouva nez-à-nez avec une jeune femme qu’elle n’avait pas remarqué jusque là. Son visage et ses vêtements étaient propres contrairement à ceux des gens qui se trouvaient ici, aussi en conclut-elle qu’elle venait d’arriver.

« J’ai trouvé cet enfant. Il n’a plus de mère. », dit simplement Athena, espérant que la grounder comprenait l’anglais.
(c) badwolf.

   
TonDC n’était plus  que ruines fumantes et le cœur du commandeur se serrait à cette vue. Elle avait fuit. Elle avait fuit mais elle était revenue et c’était ce qui comptait n’est ce pas ? Ce qui comptait c’était qu’elle soit en vie, que Clarke le soit aussi – parce que sans l’une ni l’autre, il n’y’aurait pu avoir d’alliance, parce qu’elles étaient les leader de leurs peuples et que sans elles tout ce qui avait commencé à se bâtir n’aurait plus lieu d’exister. Ainsni, peut être qu’elle regrettait ce moment où elle avait attrapé Clarke et l’avait entrainé avec elle en la convainquant qu’il ne fallait prévenir personne, mais elle restait persuadée que c’était le meilleur moyen qu’elles aient pu trouver. Elle restait convaincue que ca avait été la meilleure solution. L’armée serait emplie d’une motivation sans faille – la vengeance – et Bellamy restait en vie à l’intérieur de la montagne. Elle n’était pas stupide, elle avait bien vu le regard de Clarke quand il avait été question d’un danger pour Bellamy. La jeune leader des skaikru n’aurait pas supporté d’avoir été la cause de la mort de son ami. Bien qu’au fond elle doive maintenant accepter d’être la cause de la mort de 250 personnes. Non, Lexa accepterait de prendre cette décision sur les épaules. Elle ne pouvait pas faire autrement de toute façon. C’était sa responsabilité à elle aussi. C’était son idée. Et …. Enfin, ses pensées n’avaient pas d’importance sur le moment.

Le tireur avait été débusqué et correctement anéanti – par Clarke justement, pour qui l’admiration de Lexa ne cessait de croitre – et désormais Lexa pouvait voir les conséquences de cette attaque sur ce qui avait jadis été TonDC. TonDC où elle était venue enfant quelques fois, TonDC où Indra …. Par les dieux, elle espérait qu’Indra ait survécu à l’attaque, mais elle savait qu’il ne fallait pas espérer grand chose d’une telle scène de massacre. L’odeur de la peau brulée, des bâtiments en ruines, des flammes. Tout cela lui montait à la gorge, mais elle avait appris depuis longtemps à ne pas montrer ce qu’elle ressentait réellement, à garder ses émotions en berne le temps de passer aux choses utiles. Le temps de ne rien ressentir. Et elle s’en sortait bien.

C’était donc la tête haute, le regard froid et la mâchoire crispée qu’elle s’avançait au milieu des décombres. Dénuée de ses peintures de guerre, elle se sentait vaguement mise à nue, mais elle gardait cette prestance propre au commandant qu’elle était. Elle gardait son air fier, la fougue dans son regard et le manque d’empathie qu’elle tentait de laisser régner en maitre. Elle ne pouvait pas se permettre de prendre de la tristesse pour les corps ecrasés et brulés, elle ne pouvait pas se permettre de verser des larmes pour ces personnes qui n’étaient plus en vie. Les morts, restaient des morts, et c’était des vivants qu’il fallait s’occuper. Les choses étaient ainsi, aussi simples – et difficiles – soient elles.  

Du coin de l’œil elle remarqua un peu d’agitation dans un coin – ce n’était pas surprenant, mais la vue d’une militaire blonde, dont elle ignorait le nom, se mettant au travers du chemin d’un de ses guerriers qui allait achever une souffrante, lui fit froncer les sourcils. Ils avaient une alliance, mais il semblait clair qu’il fallait accepter les coutumes de chacun des peuples et … aussi, … Enfin. Elle laissa cette scène dans un coin de sa tête, et elle continua à marcher au milieu des ruines et des cadavres.

A sa gauche, un guerrier du clan des mers parlait avec véhémence à une soigneuse du clan des bois, et elle les interpela tous les deux. Ils semblaient jeunes et en plutôt bon état, alors ils seraient de bons coursiers. Il fallait aller chercher sa soigneuse à elle, et tout le groupe de soigneurs et de gardes qui les accompagnaient. Il y’en avait des choses à faire, et ce carnage demandait vengeance. Enfin, ce n’était pas comme si l’attaque sur la Montagne n’allait pas arriver de toute façon. Au moins, ils se montreraient tous encore plus virulents dans leurs actions. D’une manière froide et méthodique, la pensée suivante traversa son esprit : ce carnage avait réuni les clans et leur avait donné à tous une raison de combattre. Une raison de plus. Peut être que quelqu’un l’aurait jugé pour penser cela, mais … Elle restait assez pragmatique et il fallait reconnaître que c’était la réalité.

Son regard se posa sur une forme blonde qui s’approchait d’elle, et elle eut comme une lueur d’espoir dans les yeux, qui se dissipa en reconnaissant quasi immédiatement qu’il ne s’agissait pas de la blonde qu’elle espérait voir depuis que leurs routes s’étaient séparées quelques temps auparavant.  Non, il s’agissait de la militaire vu plus tot, celle qui avait interrompu le trikru, et qui désormais portait quelque chose d’étrange dans ses bras. Lexa, yeux plissé la fixa quelques instants. « J’ai trouvé cet enfant. Il n’a plus de mère. »  Le visage de Lexa ne changea pas d’expression tandis qu’elle regardait l’enfant emmailloté. Elle ne le reconnaissait pas. Elle ne connaissait pas tous les nouveaux nés de toute façon, et elle n’avait pas spécialement le temps. Mais la skaikru semblait perturbée par l’enfant qu’elle tenait dans les bras et Lexa plissa un peu les sourcils.

«  Amenez le aux soigneurs, ils s’occuperont de lui. » Son ton était directif, forcement, on ne passait pas des années à donner des ordres, pour ne pas sonner comme ça. Mais la pensée que la fille du ciel ne sache probablement pas qui elle était, lui traversa vaguement l’esprit. Elle ne changea cependant pas spécialement de ton.  «  Va t’il bien ? » Cependant, son peuple comptait d’avantage que beaucoup de choses, et elle ne pouvait que s’interesser à la survit d’un nouveau né.  

    (c) badwolf.
   

« Amenez-le aux soigneurs, ils s’occuperont de lui. »

Avant même que la jeune femme ait ouvert la bouche, l'archéenne avait compris à qui elle avait affaire. Dans sa manière altière de l'étudier et dans son ton ferme, autoritaire et posé, cella à qui elle s'était adressée ne pouvait de toute évidence qu'avoir un statut à part. Elle portait sur son front haut et dans son allure noble la marque de quelqu'un habitué à se tenir et à représenter les espoirs et les attentes de tout un peuple. Lourde responsabilité pour quelqu'un de si jeune, car elle ne devait pas être plus âgée qu'Athena.

Son visage était inexpressif et les émotions qui la traversaient insondables malgré la catastrophe qui s'était produite et le cauchemar qui les environnaient. Athena avait cru comprendre la force qui habitait les grounders et leur difficulté à exprimer leurs émotions, chose qui était d'autant plus vrai pour les guerriers, mais un tel détachement lui fit froid dans le dos. Cependant, habituée à recevoir des ordres, elle répondit d'un simple signe de la tête et s'apprêtait à faire ce qu'elle lui avait demandé lorsqu'elle s'adressa à elle.

« Va-t'il bien ? », lui avait-elle demandé, toujours aussi autoritaire sans pour autant lever la voix.

« Oui, il va bien », répondit la blonde en se retournant vers la jeune femme. « Il est en vie et n'a aucune blessure apparente... », poursuivit-elle sur un ton neutre. Quelque chose cependant, une intuition, l'empêcha de parler de son infirmité qui de toute évidence était là depuis sa naissance. (c) badwolf.

Elle était encore passablement perturbée Lexa, même si elle n’en montrait rien. L’explosion autour de TonDC avait été un des attentats les plus atroces et les plus meurtriers auquel les trigedakru aient pu avoir a faire. Cependant elle devait garder la tête haute, gérer les réparations, les reconstructions, organiser la vengeance qui viendrait – car oui elle viendrait – et s’occuper aussi des imprévus qui arrivaient. Comme cette fille du ciel qui portait un enfant dans ses bras. Que pouvait elle y faire Lexa ? Elle n’avait pas le temps de prendre un enfant sous sa garde, et elle mourait surement de toutes les manières. Non, l’enfant irait voir les guérisseurs, Dunlaïth avait des soigneurs avec elle – et Lexa était heureuse que la vieille femme soit en vie, elle ne savait pas comme elle aurait réagit si une autre figure féminine de sa vie s’eteignait encore.

Il n’en demeurait pas moins que la jeune commandeur s’inquietait de la santé de l’enfant – tout comme elle s’inquietait de la santé de toutes les personnes présentes. « Oui, il va bien », Les mots de la fille du ciel l’apaiserent et elle hocha la tête « Il est en vie et n'a aucune blessure apparente... », arquant cependant un sourcil a la sorte d’hesitation qui semblait s’être prise de la blonde. Enfin, elle n’allait pas commencer à soupçonner tout le monde de mentir, ce massacre avait de quoi secouer les esprits. « C’est une bonne chose. Les soigneurs le remettront sur pieds. »

Et maintenant ? Elle aurait pu s’eloigner, tout était fini après tout, mais elle avait cette impulsion à dire quelque chose, qui la retint sur place, consciente qu’elle ne pourrait probablement pas rester longtemps car ni la fille du ciel, ni elle même n’avaient de temps pour ça. « J’ai vu ce que tu as fait tout a l’heure, ta détermination a sauvé cet enfant. En son nom je t’en remercie. » Toujours très formelle, Lexa prononça ces quelques mots doucement, avec un ton des plus sincères.

« Tout comme je suis reconnaissante à ton peuple de nous aider dans ce carnage. Avez vous perdus vos représentants ? » Elle savait qu’Abby Griffin avait survécu, mais elle espérait qu’il en soit de même pour Marcus, il avait été présent ici après tout lui aussi. Et peut être que la jeune femme savait ?
(c) badwolf.

« J’ai vu ce que tu as fait tout à l’heure, ta détermination a sauvé cet enfant. En son nom je t’en remercie. » Athena fit seulement un petit signe de la tête en réponse. Il n'y avait rien à ajouter. Qu'ils soient de l'Arche ou pas, dans des cas comme celui-ci, cela ne faisait aucune différence. Ils restaient des êtres humains et on lui avait enseigné combien la vie était une chose précieuse. Elle n'aurait pas laissé mourir un innocente, un nouveau-né.

« Tout comme je suis reconnaissante à ton peuple de nous aider dans ce carnage. » Athena serra les dents un instant à la mention de "carnage". Elle n'avait pas oublié. Le souvenir du massacre des survivants de la station Factory était toujours marqué au fer rouge dans son esprit. Les grounders avaient assassiné de nombreux innocents : femmes, enfants, personnes âgées qui n'avaient pu se battre pour défendre leur vie et qu'elle n'avait pu protéger. « Avez-vous perdu vos représentants ?  », demanda la brune.

Ses représentants ? Elle ne comprit pas mais ne put de toute façon répondre immédiatement car à cet instant le petit se mit à pleurer et à s'agiter. Elle le réconforta par des "shh" tout en le berçant doucement de manière lente et appuyée. Elle rajusta le linge dans lequel il était emmailloté, son front se creusant un instant en ce rappelant ce qui se trouvait dessus. Après avoir hoqueté encore quelques instants le nouveau-né s'apaisa et ferma les yeux.

« Je suis venue avec Rogan du Clan de la Terre Rouge.  », répondit-elle en fixant la jeune femme droit dans les yeux, essayant de percer sa réaction. Peut-être savait-il de quoi ceux-ci étaient responsables et ce qu'ils avaient fait aux siens quelques semaines plus tôt , Bien que Rogan ne se soit pas étendu sur le sujet il semblerait que celui-ci ait été le leader de son clan jusqu'à ce qu'il choisisse de s'interposer et demander aux siens d'épargner les survivants du Clan du Ciel comme ils les appelaient, ce qui n'avait pas été du goût de tout le monde et conduit à son remplacement. Les choses seraient peut-être différentes maintenant que les deux peuples étaient alliés...

« J'ai vu que le docteur Griffin vous aidait aussi. », ajouta-t-elle. « C'est un très bon médecin », termina-t-elle sur un ton grave. Elle voulait ainsi faire passer le message que non seulement cette aide était précieuse mai qu'ils avaient tout intérêt à poursuivre cette bonne relation entre les deux peuples s'ils voulaient que les deux partis soient gagnants. Athena avait toujours admiré cette femme, et pas seulement parce qu'elle avait été la meilleure amie de sa mère. Elle avait donc été heureuse de la retrouver en vie car cela signifie qu'elle avait le potentiel d'en sauver plus d'un.

(c) badwolf.

Sa question n’eut finalement pas de réponses, car l’enfant se mit à pleurer. Et un enfant qui pleure n’était jamais la bande sonore la plus agréable pour pouvoir converser tranquillement. Alors Lexa attendit, gardant le silence. Elle n’avait après tout rien à dire ou rien à faire dans cette situation. Elle n’était pas ici pour s’occuper d’un enfant, et elle était tentée de se dire que la jeune skaikru n’avait qu’a s’en occuper un peu. Un peu. Après tout c’était elle qui l’avait recuperé, alors maintenant, tant qu’elle ne l’aurait pas confié à un guérisseur qui lui trouverait une famille. Soit. Elle restait donc silencieuse, se disant que de toutes les manières cet entretien ne durerait plus longtemps maintenant. Dans peu de temps quelqu’un allait débarquer et l’appeler en lui disant qu’ils avaient besoin d’elle. Elle était le commandeur. Elle devrait relever le moral des armées anéanties par le massacre, elle devrait dire des mots et énoncer ses regrets quand à l’attaque et tenter de fuir les explications sur sa survie. Bien que personne n’oserait probablement lui demander des comptes. Elle était le commandeur après tout.

 « Je suis venue avec Rogan du Clan de la Terre Rouge.  »  Elle arqua un sourcil Lexa. Rogan. Ca lui disait quelque chose à Lexa. Le clan de la Terre Rouge avait récemment fait un carnage sur les skaikru qui avaient survécus à la descente de leur station. Mais… Ils s’étaient repris ? Parce qu’ils étaient la de toute façon. Ils étaient présents à l’appel de la coalition et ils obéissaient à Lexa. Elle avait declaré une alliance, la trêve. Ils ne feraient plus de mal aux skaikru n’est ce pas ? Elle l’esperait en tout cas.

« Rogan était leur chef n’est ce pas ? » Elle était curieuse Lexa. Elle avait eu vent du changement de chef, elle ne savait cependant pas tout. Parce que si elle s’interessait à la politique de ses alliés, elle avait aussi eu, des choses à préparer elle. La guerre. Et puis la trêve.  En tout cas, visiblement des alliances humaines commençaient à se former entre des individus eloignés. Pas seulement entre elle et Clarke, pas seulement entre Lincoln et Octavia. Elle était plutôt ravie de savoir ça. – Bien que la relation entre Lincoln et Octavia soit totalement différente de celle qu’elle avait avec Clarke.  Soit.

«  J’ai vu que le docteur Griffin vous aidait aussi. C’est un bon médecin. » Lexa  se crispa un peu. Elle ne portait pas Abby Griffin dans son cœur. Cependant elle était assez logique et intelligente pour reconnaître la vérité. Le docteur Griffin était un excellent médecin. «  C’est une bonne chose oui. Je suis ravie qu’elle n’ait rien eu pendant le bombardement. »  En un sens elle l’était. C’était logique. Abby était un soigneur hors pair. De plus c’était la chancelière et elle ne voulait pas risquer qu’il y’ait pire qu’elle, et puis c’était également la mère de Clarke, et Lexa supposait qu’elle en aurait été attristée son étoile blonde si elle avait perdu sa mère. Malgré tout. «  Elle aurait beaucoup de choses à apprendre à nos soigneurs. Et je suppose que la réciproque est également vrai. » Lexa n’était pas dupe cependant, elle avait comprit que la jeune femme en face d’elle était en train de prêcher pour son peuple et pour l’alliance. Et ça lui plaisait.  Une lueur plus douce dans les yeux, elle reprit. «  Au fait, je ne me suis pas présentée. Je me nomme Lexa. » Le commandeur.  Mais ça, elle savait aussi se présenter normalement.

(c) badwolf.

Lorsque la jeune femme lui avait demandé si Rogan avait été leur chef, Athena avait hoché lentement la tête en réponse. Si cette jeune femme était au courant pour ce qui lui était arrivé, elle devait en connaître la raison, elle devait savoir qu’il avait été un des premiers à prendre le parti de son peuple, le peuple du Ciel comme ils l’appelaient, et que c’était aussi en partie en cause d’elle, de son choix d’avoir voulu la protéger. Qu’y avait-il d’autre à dire ?

Elle avait donc préféré détourner l’attention vers le médecin, l’une des leurs qui visiblement faisait toujours un travail remarquable ici, malgré le peu de moyens. Elle avait alors senti une légère crispation de son interlocutrice, presque imperceptible.

« C’est une bonne chose oui. Je suis ravie qu’elle n’ait rien eu pendant le bombardement. Elle aurait beaucoup de choses à apprendre à nos soigneurs. Et je suppose que la réciproque est également vraie. »

Elle avait raison. Malgré toutes leurs connaissances et leur technologie, ils avaient encore beaucoup à apprendre de ce monde qui avait changé avec les années. Les plantes et autres éléments qui servaient pour la médecine n’étaient plus tout à fait les mêmes qu’il y a près de cent ans. Si les connaissances des natifs leur étaient précieuses, ils n’avaient cependant pas la même volonté de sauver.

Rogan l’avait suffisamment mis au courant au sujet de comment les siens percevaient la faiblesse. Ils n’auraient aucun intérêt à s’occuper un handicapé, un guerrier amoindri… Dans leur culture ils étaient des fardeaux, des faiblesses qui devraient alors être portées par le clan entier. Pour le peuple de l’Arche, la façon de voir les choses était différente. Et elle savait que le natif qui l’avait accompagné la partageait, même si cela ne lui attirait pas la sympathie des siens : toute vie était précieuse et méritait de se battre.

Elle eut une pensée pour le nourrisson qui dormait à présent paisiblement dans ses bras et soudain elle eut une idée. Audacieuse certes, mais sans doute la seule qui existe qui puisse sauver la vie de cet enfant. Son infirmité ne lui permettrait sans doute jamais de marcher normalement, et donc de se battre, de devenir un guerrier. Elle voulait à présent faire comprendre à la jeune femme en face d’elle que sa vie était aussi précieuse que celle de n’importe quel enfant. Même s’il ne deviendrait jamais un guerrier il pourrait cependant être un atout précieux de la société, d’une autre manière…

Ils ne verraient que la faiblesse lorsqu’ils poseraient pour la première fois leur regard sur le corps tordus de cet enfant, une charge inutile, mais elle y voyait autre chose, elle y voyait une vie ouverte à toutes sortes de possibilités. Si elle pouvait l’en convaincre alors il y aurait moins de risque qu’un natif l’égorge et le jette dans une fosse commune une fois qu’elle aurait le dos tourné. Et si elle ne pouvait pas la raisonner elle l’amènerait directement à l’un des siens, là où elle le saurait protégé.

« Au fait, je ne me suis pas présentée. Je me nomme Lexa. », s’était présentée la jeune femme, présentation presque inutile car la blonde avait déjà deviné depuis quelques temps à qui elle avait affaire.

« Commandeur. », la salua-t-elle d’un signe de tête, avec respect. « Sergent Athena Thrace. », se présenta-t-elle à son tour, formellement. Et après une courte pause, elle enchaîna : « Il y a quelque chose que je voudrais vous montrer… », dit-elle en découvrant doucement les jambes du bébé toujours endormi contre elle. (c) badwolf.

Lexa ne manquait pas, devant n’importe qui de vanter les mérites de l’alliance. Après tout, c’était quelque chose qu’elle avait fait elle, et dont elle était extrêmement fière. Forcement. Elle et Clarke avaient réussi à nouer quelque chose d’important entre leurs deux peuples, et Lexa était bien décidé à faire en sorte que ça reste ainsi. Elle était décidé à approfondir au maximum les liens entre leurs deux peuples. Oui, les liens. Et les liens entre Clarke et elle si elle le pouvait. Soit. Elle était donc plutôt fière de cette alliance, et n’en perdait pas une pour en parler. Le temps cependant n’était pas spécialement à la fierté, entendu qu’un missile venait de faire un carnage sur TonDC, l’une des villes ou elle avait grandi. Une boule s’émpara de son cœur tandis qu’elle pensait à ce qu’Anya aurait pu dire, et elle réprima un grognement, un air triste. Non, elle gardait au lieu de ça son air usuel. Contrarié, certes, mais determiné aussi.

Les présentations vinrent. « Sergent. » Elle n’avait pas spécialement entendu parler d’elle, mais elle avait cru comprendre que les sergents étaient plus ou moins haut placé dans l’ordre militaire de l’arche. Enfin, elle en saurait d’avantage bientôt, elle demanderait à Clarke de les lui expliquer peut être. Elle aimait toujours quand Clarke lui expliquait des choses sur l’Arche. Ca la rendait toute captivée. Ou peut être que c’était juste parce que c’était Clarke, et même si elle voulait nier ce qu’il en était, elle ne pouvait pas nier que ce que Clarke disait suscitait chez elle un vif intérêt.

Soit. Elle déscendit bien vite de sa bulle – qui n’en était même pas spécialement une – quand la jeune femme en face d’elle, la regarda, enchainant sur quelques paroles, avant de découvrir les pieds de l’enfant. Le gauche était attrophié, tordu, tel un morceau de gingembre mutant, et Lexa grimaça. « Cet enfant ne devrait pas être la. » Les mutants devaient être exterminés. C’était pour le bien du reste du clan qu’il en était ainsi, et il n’aurait pas du survivre aussi longtemps. Alors elle crispa un peu plus ses mâchoires. « Donne le moi. Je vais m’en occuper. » Ca serait rapide. Il ne souffrirait pas beaucoup. Il souffrirait moins que si il continuait à vivre de toute façon.


(c) badwolf.

« Cet enfant ne devrait pas être la.  »

La froideur et la distance dans son ton l'alarma. Comme s'il avait pressenti quelque chose, le petit se mit à hoqueter puis à pleurer. Athena le recouvrit en hâte puis le prit contre elle pour le calmer.

« Donne-le moi. Je vais m’en occuper. », demanda le Commandeur qui n'avait rien précisé. Et pourtant la blonde n'était pas dupe, elle avait compris, elle savait. Elle savait ce qui attendrait le nourrisson si elle le laissait à celle qui lui faisait face.

Ce qu'elle redoutait et ce que redoutait sans doute la mère du bébé pour avoir caché sa naissance. Mais elle n'avait pas pu le laisser, là, seul dans les décombres. Le dernier geste de celle qui lui avait donné la vie avait été pour le sauver, elle n'allait pas le laisser mourir.

« Je suis désolée, je ne peux pas vous laisser faire ça », commença-t-elle, ses yeux clairs directement rivés dans ceux de la jeune femme qui lui faisait face. « Si la vie de cet enfant est en danger auprès des siens, je l’amènerais au camp Jaha où on prendra soin de lui. » déclara-t-elle, peut-être un peu froidement, tandis qu'elle resserrait inconsciemment sa prise autour du petit.

(c) badwolf.

L’enfant devait mourir. Pour Lexa c’était aussi simple que ça, et si elle n’aimait pas spécialement faire couler le sang, elle attendait que la blonde lui tende l’enfant pour pouvoir faire ce qui devait être fait. Ca serait rapide et précis. Un coup de couteau au niveau de la gorge et c’en serait fini de ses souffrances. Voilà tout. C’était terrible peut être au regard de tous, mais parfois il fallait faire des choses terribles pour continuer à survivre, et n’était ce pas plus terrible a vrai dire de laisser cet enfant vivre dans le grand monde comme ça ?  Lexa se crispa un peu aux mots d’Athéna.

«  Crois tu que ton peuple ait le temps de s’occuper d’un infirme, alors même que vous partez en guerre pour sauver vos enfants ? » Elle se leurrait peut être, mais de ce qu’elle avait comprit des skaikru, ils n’allaient pas perdre leur temps avec un enfant étranger et handicapé. Venant du peuple qui n’avait pas hésité à jeter ses enfants dans l’espace et le vide pour faire de la place, à cause de délits mineurs, c’était quelque chose d’assez risible finalement.

«  Mais soit. A ta guise, fais en ce que tu en veux. » Elle ne pensait pas qu’ils le veuillent de toute façon à Camps Jaha. C’était un poids inutile. Il allait leur user des vivres, du temps, et surtout se montrer plus un poids qu’autre chose. Lexa crispa sa mâchoire et garda son air froid. «  Il y’avait autre chose ? »

(c) badwolf.

« Crois-tu que ton peuple ait le temps de s’occuper d’un infirme, alors même que vous partez en guerre pour sauver vos enfants ? »

Pour la Grounder, la question devait être rhétorique mais elle, Athena, le croyait. Elle avait confiance en l'Arche et à sa capacité à prendre les décisions justes. Même si par le passé certaines choses s'étaient produites et malgré ce qu'il s'était passé avec les 100, ce n'était pas des tueurs d'enfants. La preuve en était que la sœur "interdite" de son ami Bellamy aurait été achevé sur le champs si c'était le cas. L'esprit de communauté était fort et il y avait à présent à leur tête une femme avec un fort instinct maternel : Abigail Griffin. Jamais elle ne laisserait qui que ce soit faire du mal à ce nouveau-né.

« Mais soit. A ta guise, fais en ce que tu en veux. », conclut le commandeur, tendue. « Il y avait autre chose ? », demanda-t-elle. « Non Commandeur. », répondit la blonde sur un ton neutre bien que ses yeux ne cessent de fixer ceux de la jeune femme face à elle. Elle finit par la saluer en inclinant la tête puis partit en direction du groupe de soigneurs et d'Abby, sans doute celle qui serait la mieux à même de savoir à qui confier cet enfant maintenant qu'il était clair que les siens ne l'accepteraient jamais en leur sein.

(c) badwolf.