Depuis qu’ils sont arrivés à Kalawen, Nox est plutôt bien occupé. Il forge, il forge et il forge encore en compagnie des forgerons de la ville. Il est plutôt aimable même s’il n’est pas bavard. Il ne sourit pas beaucoup non plus, mais il apprend d’eux et il leur apprend beaucoup. Il est du genre pédagogue Nox. Il aime bien apprendre aux autres. Quant à Snack, le chien mutant, il va et vient de-ci, de-là. Il n’y a que pendant la bataille qu’il l’a gardé auprès de lui à la forge, une épée non loin de la main pour protéger les autres au cas où les barbares dépasseraient leurs défenses. Mais cela n’est pas arrivé. Et ils ont gagné la guerre. Alors il a continué à forger pour aider à réparer. Il a fait plusieurs poutres de soutien, il a fait des barres en fer pour renforcer les barrières des enclos, il a fait des cerclages de roues de chariots, et d’autres structures du genre. Oui, le forgeron n’a pas chaumé depuis son arrivé et les autres forgerons non plus.

Mais là, il prend une pause. Il s’est lavé et a quitté la forge pour aller se promener, se mettant aussi en quête de son compagnon, pour voir dans quel pétrin il s’est encore fourré. Alors il avance en regardant les autres. La plupart le salue, la plupart le connaisse à présent. Il ne s’est pas illustré à la bataille mais il s’est quand même rendu utile. Chacun à son rôle n’est-ce pas ? Et là, alors qu’il est perdu dans ses pensées, il l’entend. Le chien s’est mis à hurler à la mort. Il appelle à l’aide. Il se demande bien ce qu’il fait. Alors il penche la tête, suit le bruit d’un pas rapide, marteau en main. Et là, au détour d’une rue, il le voit. Cet abruti de cabot est au sol, une femme assise sur lui. Et cette femme, il la reconnaît. C’est celle-là même qui a failli réussir à le tuer il y a 10 ans. Il soupire, roule des yeux et gronde : « Encore toi… Snack te manquait tant que ça ? ». Il sourit en coin et s’avance, marteau en main. Il pensait voir un alligator. Ou un enfant un peu belliqueux. Il regarde la femme et lui dit : « Si tu es gentille petite, je t’en ramènerais un de mon prochain voyage… ». Et il accompagne ses paroles d’un sourire en coin et d’un clin d’œil puis il reprend : « Allez… Lève-toi, ce n’est toujours pas un animal bon à manger. Il doit être dur vu son âge… ». Et il y a fort à parier qu’il ne lui parlerait pas autrement s’il savait que c’est une chef de clan à présent. Il n’y a pas d’agressivité dans ses paroles, ni de mépris dans son ton, au contraire. Il est posé et respectueux. Elle est encore vivante, et ici-bas, c’est déjà un exploit qui mérite le respect.

La jeune femme est devenue une femme maintenant. Elle n’a pas beaucoup changé, elle semble un peu plus adulte cependant. Elle est toujours aussi belle. Elle est peut-être plus inquiétante maintenant. Quelque chose de l’ordre du charisme. Et elle porte une robe. Cela la change de son cuir. Il la regarde simplement. Et il range son marteau. Il ne pense pas qu’elle l’attaquera alors il ne s’embête pas avec ça. Il l’écoute aussi, quand elle prend la parole. Et il sourit un peu amusé et moqueur avant de dire : « J’avais prévu de le manger… S’il était inutile… ». Il regarde l’animal qui se débat. En voyant son maître, il a arrêté de hurler, c’est déjà pas mal. Mais il se débat et essaie de se relever pour se dégager de l’emprise de la femme. Il se tortille comme un furibond. Nox connaît bien l’animal, il n’abandonnera pas et s’il voit une ouverture, il n’hésitera pas à la mordre.

Lorsqu’elle reprend la parole, il l’écoute. Le laisser cuire plus longtemps. Le forgeron secoue un peu la tête de gauche à droite. Mais quand il entend la suite, il arque un sourcil un peu curieux. Mes guerriers. Tiens donc. Elle ne ressemble pas vraiment à une chef de guerre. Avec cette robe. Mais, il sait aussi que certaines personnes sont ce qu’elles ne semblent pas. Il penche un peu la tête et commence par dire : « Il nourrirait à peine un enfant… Et puis qui sait, sa viande est peut-être toxique… ». Il n’a jamais essayé de le manger, alors il ne peut en jurer. Puis il relève interrogateur : « Tes guerriers ? ». Il la regarde un long moment et rit un peu : « En fait, sa compagnie me manquerait… Et il manquerait à certains membres de mon clan aussi… ». Oui, cet idiot d’animal a fini par réussir à trouver comment survivre.

Il acquiesce un peu en l’écoutant. Non, il n’est pas mort. Il n’a pas été dévoré. Il n’a pas été blessé non plus enfin, pas de façon violente. Quelques égratignures. Juste de ci de là. Alors il lui répond : « Toi non plus visiblement… ». Il la regarde simplement. La jeune fille qui ne semblait pas vouloir s’établir, a bien changé. Elle a l’air d’avoir fait beaucoup de chemin depuis leur première rencontre. Et il est curieux d’entendre ses aventures.

Les choses sont surprenantes parfois. Ils croisent des gens un jour, discutent, parlent et s’éloignent. Chacun suit sa route, affronte ses épreuves. Puis, parfois, la vie fait en sorte que les chemins se croisent à nouveau. Nox est face à l’une de ses situations. Il n’aurait pas pensé la retrouver un jour. La croiser à nouveau. Lui faire face. La regarder et discuter avec elle, encore une fois. Peut-être que dans le fond, il ne s’attendait pas à la voir encore envie. Elle était tellement arrogante, tellement sure de tout savoir. Étrangement, Nox a l’impression qu’elle est encore comme ça. Mais qu’aujourd’hui, elle sait prendre soin d’elle. Ou qu’elle doit avoir des gens capables de prendre soin d’elle. Comme certains de ses guerriers. Il la regarde un instant et lui dit : « Pauvre de lui… Il peut encore être utile. Qui sait, peut-être un jour je te laisserais le manger. ». Et il sourit à la fois amusé et moqueur. Il saura bien la retrouver. Alors qu’elle répond à l’affirmative à sa question sur les guerriers, le forgeron fronce un peu les sourcils et penche la tête. Il aurait aimé qu’elle réponde avec plus de précisions. Mais comme à l’époque, la femme est plutôt concise dans ses réponses et avare d’information. Alors il demande : « Ta troupe de voyageurs s’est agrandie ? Ou tu as enfin fini par t’établir quelque part ? ». Il est curieux. Réellement curieuse de découvrir comment son chemin l’a menée jusqu’ici.

Puis, la conversation continue. Et sa réponse le fait rire d’une certaine façon. Oui, il sent bien la volonté de survivre, le caractère bien trempée de celle qui il y a longtemps a essayé de se défendre de l’homme accompagnant sa proie sans arme. Il secoue un peu la tête lorsqu’elle se moque ensuite de lui. Il reconnait bien qu’il a fait la même chose. Alors il ne peut pas lui en avoir rigueur. Alors il répond : « Tous ceux qui étaient dans cette bataille, qui voulaient faire couleur le sang des nôtres méritaient de mourir. Alors j’ai forgé des armes, j’ai réparé des boucliers et j’ai aidé à la préparation… ». Il sourit un peu amusé en la regardant. Il a toujours cette sagesse dans le regard. Peut-être plus encore aujourd’hui. Il y a quelque chose chez lui qui inspire la confiance et le respect. Dans son regard, dans cette façon de se tenir, de parler ou de regarder le monde qui l’entoure. Il la regarde un moment avant de grattouiller la tête de son compagnon. Puis, il lui donne un coup de tête pour l’inciter à aller se promener. Puis, il propose à la jeune femme : « Et si nous allions à la taverne ? Je serais plutôt curieux d’entendre le récit de tes aventures… ».

L’espace d’un instant, l’ombre d’une grimace passe sur le visage du forgeron. Comme tous les siens, Nox ne pleure jamais très longtemps un mort. Mais cela ne l’empêche pas d’être triste ou de se rendre compte d’un manque, d’un vide laissé par celui qui part. Et il ne peut que comprendre que la personne disparu ait pu manquer à cette femme qui lui fait face et qu’elle ait tenu à honorer cette promesse. C’est un signe de force mais aussi d’honneur. Il se contente d’un simple signe de tête respectueux pour approuver sa décision. Même si dans le fond, il n’a pas son mot à dire. C’est plutôt un signe d’accord pour montrer qu’il comprend et que si les rôles avaient été inversés, il aurait probablement fait la même chose. Il la regarde simplement. La jeune fille qui a tenté de chasser Snack a bien changé. C’est une femme maintenant. Elle semble avoir fait des choix judicieux et avoir continué à forger son caractère. Il ne le dit mais il est admiratif. Il n’aurait pas donné cher de sa peau avec un tel caractère. Mais bon, Nox sait très bien qu’en ce monde, même avec une position avantageuse, la mort nous attend toujours au tournant. Et elle finira bien par vexer quelqu’un qui lui tranchera la gorge.

En attendant, le forgeron n’en reste pas moins curieux d’en apprendre un peu plus sur cette femme qui par deux fois a essayé de chasser son animal. Il arrive même à lui tirer un rire, ce qui le fait sourire un peu amusé. Il l’écoute à nouveau alors qu’elle lui demande si c’est à nouveau une propisiton. Oui, visiblement Nox aime faire des propositions. Alors il répond : « Qui sait ? ». Il sourit à nouveau en coin. Il peut être taciturne le forgeron, mais il y a quelque chose qui l’amuse chez cette femme. Peut-être son sens de l’humour ou son ironie. Ou son courage, qui sait ? Il ne saurait pas vraiment le dire. Il la regarde le rejoindre tout en lui parlant, puis se tourne à son tour pour marcher en direction de la taverne à ses côtés. Il répond : « Il demanderait bien trop de soin, déjà qu’avec ses quatre pattes c’est une catastrophe… ». Il juge son animal du regard, avant de tourner le regard vers le chemin devant lui. Il reste silencieux quelques instants, il aurait bien des choses à troquer. Des armes, des objets qu’il forge, des onguents, des morceaux de cuir et autres pièces de fourrure qu’on lui troque contre son aide. Mais il se doute qu’elle ne manque de rien, cela se voit. Il lui dit : « Mais je dois bien avoir quelques histoires qui valent la peine d’être échangées… ». Oh ça… Il en a des histoires à raconter de son voyage. 10 années à parcourir les clans et les terres de ce monde, y compris les plus dangereuses. Il en a des cicatrices qui peuvent illustrer ses récits. Et puis il ajoute : « Il paraît que je suis de bonne compagnie… ». Et à nouveau, il sourit amusé. Une fois à la taverne il la laisse passer devant jetant un œil autour d’eux pour regarder les gens qui vont et viennent. Un instant, il reste là, à regarder, à observer et se demande ce qu’Alaina aurait pu voir. Puis, il entre dans la taverne à son tour. Depuis son arrivée à Kalawen, Nox a déjà bien usé le comptoir. Il a pu discuter avec de vieilles connaissances et les revoir lui a fait plaisir. Il a aussi appris la mort de certaines de ces vieilles connaissances alors il a honoré leur mémoire. Mais c’est autre chose qui l’amène aujourd’hui. Il repose son regard sur Drea, curieux, presque impatient d'entendre les histoires de la jeune femme.