aleatoire #6 - Attis - Uriel & Teksas | L'histoire de la vie.

Teksas laissait son regard dériver sur les terres qui s'étendaient face à lui, son poing serré sur le pommeau de son arme, et sa monture cheminant à une distance respectueuse de celle qu'il se devait de protéger. Clarke n'avait pas besoin du Trikru pour qu'il la materne ou lui fasse la conversation -encore moins en public- et celui-ci n'aurait besoin que d'une poignée de secondes pour porter secours à la leadeuse des étoiles en cas de besoin. Nul besoin, alors, de conserver une trop grand proximité.
Un hurlement strident attira alors l'attention du garde, qui stoppa brutalement son cheval, les sens aux aguets, les jointures de ses mains tellement crispées sur son arme qu'elles en devenaient blanches.
- Uriel, Teksas, laissez vos montures ici. Allez dans la forêt voir ce qu'il se passe. Vous nous retrouverez plus loin sur la route.
L'ordre de Lexa s'éleva dans le silence qui s'était soudainement abattu sur la forêt. Sans un mot de plus, le Grounder sauta de sa monture en faisant tournoyer son épée dans les airs afin de la dégainer, et, sans même se soucier de l'état de sa jument -qu'il savait docile- il emboîta le pas de sa "coéquipière" en de longues foulées feutrées.
Quelques secondes plus tard, Teksas se retrouvait aux côtés d'Uriel, en s'enfonçait sous le couvert des arbres le plus discrètement possible, tâchant de discerner ne serait ce qu'un seul élément pouvant s'avérer suspect.
À défaut de se connaître ou de se montrer très bavard, le duo se révélait par contre des plus efficace.
La jeune guerrière se faufila d'ailleurs entre de hautes fougères, aussitôt suivie par Teksas, qui s'immobilisa aussitôt en discernant les deux silhouettes prostrées au sol en contrebas.
- Heya ! Vous avez besoin d...
La fin de la phrase d'Uriel fut couverte par le juron lâché par le Grounder, qui se mit aussitôt à dévaler la pente qui le séparait des inconnus après avoir compris la situation.
Peut être cette réaction ferait-il fuir ce dernier, mais, dans ces bois, et avec deux des meilleurs guerriers au service d'Heda à sa poursuite, Teksas doutait qu'il puisse aller bien loin...
Il arriva cependant avant que l'inconnu n'ait pu prendre la fuite, et se pencha aussitôt vers le corps de la femme étendue au sol, tâtant son poul et tâchant de déterminer si cette pauvre victime avait la moindre chance de s'en sortir.
Et la réponse à cette question paraissait malheureusement assez claire...
Agrippant le col de l'inconnu qui restait là, Teksas le rapprocha dangereusement de lui et gronda :
- Que lui est-il arrivé ? Et qu'est ce que tu fais ici exactement ?
Peut être se montrait-il injuste. Peut être cet homme n'était pas plus responsable que lui de ce qu'il venait de se passer.
Mais une chose était sûre, cet homme était aussi là, penché sur une femme agonisante, les mains couverte d'un sang qui, de toute évidence, n'était pas le sien.

Encore haletant de colère, Teksas écarta grand les doigts, lâchant ainsi la prise qu'il avait sur le col de l'inconnu -il ne s'était d'ailleurs pas rendu compte que l'adrénaline l'avait presque soulevé de terre- et le laissa retomber sans prononcer la moindre excuse pour son emportement.
À quoi bon ? Il avait simplement agi comme il se devait d'agir : en tant qu'un garde au service de sa commandante.
Avec un peu de recul, il devenait évident que l'inconnu était innocent. Ou, du moins, qu'il n'était pas responsable de l'état plus que critique dans lequel se trouvait actuellement la pauvre femme.
Et puis, il n'avait pas l'air d'un assassin. Bien sûr, l'expérience avait appris à Teksas à ne pas se fier aux apparences ; mais l'expérience lui avait aussi démontré à maintes reprises que, lorsqu'un homme en tuait un autre, il ne restait pas planté sur la scène du crime plusieurs minutes après l'avoir commis -voire un bon quart d'heure, d'après ce qu'en disait le cri qu'ils avaient entendu- pour ensuite lever les mains à l'approche de guerriers entraînés, et ne semblant posséder aucune arme qui pourrait l'aider à en venir à bout au cours d'un combat.
À la rigueur, il aurait pu tenter de voler la victime -sans forcément être responsable de son état, se contentant de profiter de la situation- mais le débraillement de la femme qui gisait dans son propre sang ne laissait pas présager suffisamment de richesse cachée pour un tel acharnement.
Bref, Teksas était bien forcé d'admettre que l'homme qui lui faisait face était donc innocent, et que le feu de l'action l'avait entraîné et poussé à se montrer brutal. Mais cela, il n'avait pas besoin de le dire.
- En effet, il ne s'agit visiblement que d'un malentendu. Je doute que ce soit le cas pour elle.
Le Grounder avait prononcé ces mots en les ponctuant d'un léger signe du menton, les yeux rivés sur le corps inanimé et gémissant à ses pieds. Il brûlait d'envie de rétorquer que ce ne serait certes pas en se lançant à la poursuite d'un agresseur évanoui dans la nature qu'ils pourraient l'aider à aller mieux, mais après tout, il n'avait sûrement rien de mieux à faire, désormais.
Conscient que les paroles d'Uriel ne s'adressaient pas à lui, Teksas releva tout de même la tête, s'arrachant à la contemplation de l'agonie de l'inconnue.
- Cela fait déjà un moment que le responsable de cette boucherie a du s'enfuir. Et s'il a réussi à repérer cette fille dans un endroit aussi reculé, c'est soit qu'il la connaissait et avait rendez vous avec elle, soit qu'il connaît le terrain bien mieux que nous.
Et dans ce cas, la traque n'en serait que beaucoup plus difficile... Voire perdue d'avance. Mais Teksas n'aimait pas s'avouer vaincu.
Il se tourna à nouveau vers l'inconnu.
- Si tu arrives à la soigner... Penses-tu qu'elle puisse survivre ? Ou au moins être en mesure de parler pour nous informer sur les circonstances de son agression ?
Ils perdaient du temps, le jeune garde en était conscient. Mais il aurait été stupide de sillonner les bois sans piste tangible ou davantage d'informations sur la situation.
Et Teksas n'aimait pas agir de façon stupide.

Le bruit caractéristique d'une lame que l'on rengaine parvint aux oreilles de Teksas, qui s'efforça à son tour d'éloigner ses mains de ses fourreaux, alors que l'injustice de la situation le poussait à dégainer et à rendre justice. Sauf que, si il le faisait maintenant, aucune justice ne serait rendue.
Et, du point de vue du guerrier, une injustice impunie se révélait tout simplement inadmissible.
En entendant sa compagne se présenter à l'inconnu -qui, désormais, n'en était plus vraiment un-, le jeune homme croisa le regard de ce dernier et hocha brièvement la tête en un signe respectueux avant de se présenter à son tour, sans toutefois vraiment s’embarrasser des formules d'usage. Et, comme Uriel avant lui, il se garda bien d'informer le Shiedgeda de l'identité de la personne qui les envoyait ici.
- Teksas kom Trikru.
À peine se fut il présenté que garde entendit alors un gargouillis étrange, pour constater avec horreur que la victime s'étouffait avec son propre sang. Aussitôt, celui-ci s'agenouilla auprès d'elle afin de lui serrer la main en un vain geste de réconfort, pour bientôt sentir cette dernière devenir inerte entre ses doigts calleux, tandis que les yeux bleus révulsés de l'inconnue allaient se perdre dans l'immensité du ciel caché par les feuillages verdoyants.
Le guerrier baissa la tête, dernier signe de tristesse et d'un hommage que la femme ne pourrait plus jamais voir, et se redressa lentement après avoir regardé Attis fermer les yeux de la défunte, et Uriel souffler la phrase malheureusement trop prononcées des Grounders.
Il y eut un silence pesant, durant lequel les trois comparses ne purent détacher leurs yeux du cadavre qui était couché là, avant que Uriel ne le rompe pour suggérer que l'on inhume le corps.
Teksas acquiesça simplement.
- Oui. Nous devons lui rendre hommage.
Il hésita un court instant.
- Malheureusement, nous ne savons pas qui elle est. Et nous devons aussi la venger.
Il se retourna vers Attis, le poing cette fois ci serré sur le pommeau de son épée, l'air déterminé.
- A-t-elle eu le temps de te dire quoique ce soit qui puisse nous aider avant de mourir ?

Teksas gardait les yeux rivés sur le cadavre de la pauvre femme, pour l'instant incapable de s'en détourner. Les paroles du dénommé Attis augmentaient son sentiment d'impuissance et semblaient le blesser comme un couteau que l'on aurait retourné dans une plaie.
La mâchoire crispée, il se força à détourner le regard, et à tâcher d'analyser un tant soit peu la situation, même si le mal de tête qui commençait à le gagner ne l'aidait nullement. Toutefois, il restait encore assez lucide pour savoir qu'ils ne pourraient plus tirer aucun indice de cette scène de crime, tout comme pour savoir que, si le responsable avait fui, il ne servait plus à grand chose de se lancer à sa poursuite, si ce n'est pour perdre un temps précieux qu'ils avaient déjà suffisamment gaspillé.
Le garde acquiesça donc simplement aux paroles d'Uriel, soulagé de constater que la guerrière partageait son point de vue et qu'il n'aurait par conséquent pas à argumenter pour défendre le sien.
- Je suis d'accord avec toi. Il est de notre devoir d'accorder un hommage décent à cette victime, qui qu'elle soit.
Il marqua une légère pause.
- Peut être même que, si nous parvenons à allumer un feu plutôt que de l'enterrer, la fumée pourrait attirer le responsable de ce meurtre, et nous pourrons alors la venger dignement et en savoir plus sur les circonstances de ce qui s'est passé...
Evidemment, c'était une option des plus risquées. Bien sûr, la clairière était assez dégagée pour que l'on se permette de le faire, d'autant que le bois ne manquaient pas, mais ce geste pouvait également revenir à attirer de nombreux opportunistes et, bien qu'étant, au même titre qu'Uriel, un combattant d'exception, Teksas savait pertinemment qu'il pouvait ne pas faire le poids selon le nombre et l'expérience de ceux qui seraient éventuellement attirés par la fumée.
Alors qu'il s'apprêtait à se justifier, un bruit retentit dans les fourrés proches, et les trois compagnons se figèrent instinctivement.
Les doigts de Teksas vinrent instinctivement trouver le pommeau de son épée, alors qu'il avisait deux silhouettes se découper lentement parmi l'obscurité des feuillages. Ils étaient repérés.
Toute tentative de fuite -qui était d'ailleurs d'emblée exclue- ou de camouflage se révélait désormais impossible.
Et il était hors de question que Teksas se livre et ne décline son identité sans en avoir d'abord du plus sur les nouveaux arrivants, ni ne laisse le cadavre de la pauvre femme aux mains de sombres inconnus.
- Qui va là ?
Teksas eut à peine le temps de poser sa question qu'une flèche vint se ficher entre ses pieds avec un sifflement court, à l'endroit précis où, à peine une poignée de secondes, la flèche aurait pu atteindre son torse.
Avec une moue de colère pure, Teksas dégaina son épée.