Une rencontre inespérée [PV]

Sujet: Une rencontre inespérée [PV] Ven 19 Juin - 11:26

Un drap d'un noir obscur parsemé de filaments brillants, et d'une immense boule blanche qui était suffisamment forte et resplendissante pour permettre aux ténèbres de ne point trop gouverner la nuit.

Kenton observait ce ciel étoilé, les bras croisés, à la limite du camp que les habitants de l'Arche avaient créé il y avait de cela quelques semaines déjà.

Il était... pensif.

Et dire qu'il y avait encore quelques temps, ce ciel étoilé, c'était sa maison. C'était l'endroit où il était né, où il avait grandi. Il avait connu ses premières joies... Ses premières peines...
Il repensa brièvement à son père, dégoûté. Un homme violent, qui fut totalement incapable de protéger sa famille, même de lui-même. Quelqu'un qui lui inspirait beaucoup de colère, même plus de vingt ans après sa mort...
Sa mère, qui était passée par mille souffrance, commençait à revivre, au camp. Elle recommençait à reprendre du poil de la bête. Elle se socialisait quelque peu, et se rendait utile par sa capacité à cuisiner même avec des denrées très faibles et médiocres. Elle... revivait. Il lui aura fallu de croiser plusieurs fois la mort, et de perdre presque tous ses proches pour se rendre compte qu'être vivant, c'était quand même bien.

Contrairement à ce que pensait Kenton.

Il était toujours en souffrance.

Leila lui manquait atrocement. Il ne pouvait s'enlever de sa tête l'image de son corps mutilé suite à l'explosion. Il essayait toutefois de ne pas trop se projeter dans le passé, pour rester parmi les vivants. Mais... des jours, c'était mission impossible.

Comme ce soir-là.

De plus, une autre pensée le hantait.

Elle le hantait.

Il avait suivi son évolution, quand elle fut impitoyablement lâchée sur Terre, parmi 100 autres délinquants. Il avait vu ses signes vitaux devenir inexistants. Il y avait encore quelques jours, il était au fond du bac, ayant eu l'impression d'avoir définitivement perdu une sœur.

Or, à la suite de l'annonce faite par un certain Bellamy, il avait appris que les bracelets avaient été... détruits volontairement.

Et que donc... elle se trouvait peut-être là, quelque part, dans la vaste étendue verdoyante plongée dans la pénombre...

Ce n'était pas pour rien qu'il était à la limite du campement...

Jetant rapidement un regard derrière lui, Kenton vit enfin le garde lui tourner le dos pour poursuivre sa ronde, alors que la relève était occupée à blablater avec un autre garde.

Il ne lui en fallut pas plus...

Prenant son courage à deux mains, Kenton outrepassa la barrière principale et piqua un sprint jusqu'à la forêt le plus rapidement possible que ses jambes le lui permirent.

Essoufflé, à bout, il arriva enfin vers les arbres qui le camouflèrent, et attendit.... Attendit une réaction, de la part des gardes. S'était-il fait repérer ?

Apparemment...

Non.

Personne ne bougea. Aucun bruit ne se fit entendre.
Il avait apparemment réussi à échapper à leur vigilance...

Reprenant son souffle, et s'essuyant son visage transpirant, Kenton poursuivit sa marche à travers la forêt. L'obscurité totale régnait. Il ne possédait pas de lampe torche, car il savait que si le gestionnaire du stock apprenait qu'il en manquait une, on saurait qu'il était parti... Il ne voulait pas donner l'alerte. De plus, la pleine lune était suffisamment haute pour être une source de lumière suffisante. Limite, mais suffisante.

Et il avait traîné une heure dehors loin des lumières artificielles pour habituer quelque peu ses yeux à la nuit... ca... allait le faire.

Du moins, c'était ce qu'il se répétait.

Il était.... fichu.

Terrain inconnu, possédant juste son glock.... il avait meilleur temps de ne point trop tarder. Il allait délimiter des zones, et se donner deux heures pour les fouiller. Après quoi, il rentrerait.

Du moins, c'était ainsi qu'il avait programmé son escapade nocturne.

Toutefois, la réalité était différente.

Les différents bruits étranges qui se faisaient entendre, les silhouettes qu'on ne distinguait pas dans le noir et qui laissaient notre imagination dériver en divers fantasmagories...

Mais ... c'était un soldat... Il était entrainé à confronter la peur.
Ca, encore, c'était ce qu'il faisait que de se répéter. En réalité, il crevait de frousse.

"Je suis dans... la merde... la plus totale..."

Une rencontre inespérée.
Kenton & Rose

Encore une nuit. Encore une nuit sur terre. Nuit qui se montrait la plupart du temps ennemie. Une nuit pourtant reposante, dont le calme arrivait à la rassurer. Du moins, quand elle oubliait dans quel endroit où elle était. La terre n'avait rien d'idyllique, et le schéma était bien différent de tous les livres que Rose avait pu lire. Mais dans le fond, elle s'en foutait. Elle se foutait, dans quel endroit où elle demeurait, tant qu'elle y était libre. Le prix de la liberté avait été lourd, un prix qu'elle n'aurait jamais été prête à payer. Mais pourtant. Pourtant elle était là, à essayer de se reconstruire. De ramasser les débris de son monde, qui s'était écroulé il y avait de cela une année. C'était une pensée qui lui était insupportable. Une pensée qui lui était insurmontable. Mais pourtant Rose vivait avec, et elle se le devrait pendant toute sa vie. Les choses avaient dérapé, sans qu'elle n'ait pu l’anticiper, et aujourd'hui, elle le regrettait amèrement. Le drame aurait pu être évité. Il l'aurait pu, mais le destin semblait en avoir décidé autrement ; comme toujours. Comme toujours, mais elle s'étonnait encore à y croire. À déborder d'optimisme, et de joie de vivre, bien que la vie lui ait offert l'un de ses baisers les plus mortels. Allongée sur l'herbe fraîche, Rose n'avait point vu passer les heures, ce qui lui porterait préjudice, étant donné la forêt qu'elle connaissait des plus hostiles. Pour cause, elle avait déjà été confrontée à ces bêtes qui avaient muté à cause des radiations, sa jambe le lui rappelant à chaque fois qu'elle en venait à faire un pas de trop. Rose serait probablement restée là toute la nuit, si elle n'encourait aucun danger, mais elle se devait d'être raisonnable, chose dont-elle n'avait que très peu l'habitude. Ce fut donc le cœur lourd et la mort dans l'âme, que l'adolescente se remit sur ses jambes, prête à rejoindre son camp. Par chance, Rose connaissait comme sa poche cette partie de la forêt, s'y étant tout de même perdue plusieurs fois dans la pénombre.

Ajustant son sac à dos derrière elle, la jeune femme s'enfonça davantage dans la forêt, pour rejoindre ce qui demeurait sa prison terrienne. La vie au camp n'avait rien d'extraordinaire, mais Rose commençait à s'habituer aux personnes qui l'entouraient, ayant réussi à se lier d'amitié avec quelques unes. Remarque, ça avait toujours été facile pour elle, d'apprécier les autres, d'aller vers eux. Mais sa maladresse et son optimisme trop prononcé, avaient la plupart du temps tendance à agacer, surtout en ces temps de chaos. Mais Rose semblait visiblement ne vouloir changer pour personne, et cela, peu-importait les circonstances.
Perdue dans ses pensées, la jeune femme échappa un sursaut, lorsqu'elle entendit des grognements, non loin d'elle. Rose aurait dû se douter, qu'à cette heure-ci, elle aurait de la compagnie, mais comme toujours, la jeune femme avait décidé de nourrir l'espoir. Un espoir, qui allait peut-être la tuer en ce moment. Cependant, la brune décida de ne point céder à la panique, et finit par grimper sur l'arbre le plus proche. Elle avait déjà été confrontée à ce cas de figure, mais cette fois, il était hors de question pour elle de se faire avoir. Rose regarda en bas, afin de voir à quel animal elle était confrontée, mais fronça les sourcils, lorsqu'elle aperçut une silhouette humaine. De toute évidence, s'il restait à découvert, il allait se faire déchiqueter comme un vulgaire morceau de viande. Rose se risqua à le détailler, pour voir à qui elle avait à faire, s'il ne représentait aucune menace pour elle. Ce fut là qu'elle le reconnut. Ce fut là qu'elle le reconnut, et elle faillit en tomber de son arbre. Impossible. C'était impossible. Elle devait probablement rêver, ou peut-être que les ténèbres de cette forêt avait réussi à altérer son jugement. Mais pourtant. Pourtant, elle le reconnaîtrait, parmi des milliers, et elle n'eut d'autres choix que de se faire une raison ; c'était bien Kenton.

Rose ne saurait décrire ce qu'elle ressentait à présent. Elle ne saurait mettre de mots sur ce sentiment de soulagement, mais aussi de colère qui la submergeaient. Une colère, qu'elle n'avait jamais réussi à éprouver envers lui. Une colère, dont Rose ne se pensait point capable. D'ailleurs, Rose ne connaissait même pas les raisons de sa colère. Il n'y était pour rien, pourtant ; il n'avait rien fait. Il n'avait rien fait, et c'était d'ailleurs pour cela, qu'elle lui en voulait autant. Rose ignorait s'il avait essayé de plaider leur cause. Elle ignorait, s'il avait essayé de les sauver ; elle n'en savait rien. Mais le fait de ne pas être venu la voir en prison, lors de cette année d'affliction, signait sa culpabilité ; les absents avaient toujours torts. Il était sûrement l'un des leurs, et peut-être que Rose l'avait définitivement perdu. Mais pourtant, si lui avait décidé de l'abandonner, Rose ne s'en sentait pas prête. Ce fut donc tout naturellement, qu'elle lui lança une branche sur la tête, pour manifester sa présence. « Ne compte même pas là-dessus. Si tu tires, tu vas en attirer des dizaines. » Lâcha-t-elle, d'une voix presque inaudible, en pointant l'arme qu'il tenait fermement. Les pas se rapprochaient, et ils n'avaient plus de temps à perdre. « Grimpe sur l'arbre à ta gauche, sans faire de bruit. » Dans la pénombre, il ne l'avait sûrement pas reconnu, mais elle espérait qu'il lui ferait tout de même confiance.
Lorsqu'il l'eut rejoins, Rose détourna presque instantanément le regard vers le sol, ne sachant comment réagir, face à celui qu'elle avait considéré comme un frère autrefois. Un frère, qui avait probablement vendu son âme au diable. « Les conditions ne sont pas très optimales, mais ici nous sommes en sécurité. » Finit-elle par dire, brisant ce silence pesant. C'était froid, impersonnel, alors que Rose n'avait qu'une seule envie, qu'il la prenne dans ses bras. Qu'il la prenne dans ses bras, comme il le faisait autrefois. Rose avait tellement de choses à lui dire, mais les mots ne sortaient pas. « Comment as-tu atterri ici ? » S'enquit-elle, d'une voix neutre, qui ne lui ressemblait pas. Son océan finit par joindre son regard. Un regard similaire au sien, empli d'amertume.

electric bird.