death is not the end ▬ Lexa

C’était comme un rêve. Un impossible qui lui avait fait la grâce de se réaliser. Et Kandar avait du mal à y croire, qu’elle était sortie de cet enfer. Qu’elle avait survécu à cet enfer. Que la montagne était tombée et qu’une partie de ces hommes de la montagne étaient morts. Elle aurait voulu répandre leur sang avec les siens, mais elle avait été trop faible pour faire quoique ce soit, soutenue par ses compagnons d’infortune qui l’avaient amené à l’extérieur. En cours de route, elle s’était évanouie. Trop d’émotions, pas assez de force. Elle avait glissé vers l’inconscient, persuadée qu’elle glissait vers la mort. Ca n’était pas arrivé. Elle n’avait pas tenu tous ces jours, ces semaines pour abandonner à la fin. Elle avait été placée en compagnie de ses semblables, sur l’avant-poste dont elle avait entendu parler. Et là, elle avait été prise en charge, soignée, nourrie (même si la nourriture avait eu du mal à rester dans son estomac et que le soigneur lui avait expliqué qu’elle devrait commencer par boire des tonifiant pendant quelques jours, avant de pouvoir reconsidérer des aliments solides). Kandar n’avait rien dit, ne s’était pas plainte. La faim, elle la supportait depuis si longtemps qu’elle pouvait se le permettre.

Elle avait passé des heures à dormir, malgré le bruit ambiant. Plus rien, réellement, après ce qu’elle avait traversé, l’empêcherait de se reposer. Même si elle avait dormi plus qu’en boule, encore habitée à rentrer ses membres sur eux-mêmes. A son réveil, elle avait retrouvé son fils, qui avant tant changé et elle avait pleuré dans ses bras, de ces quelques larmes de réconfort de retrouver ceux qu’elle n’avait jamais pensé retrouver. Baal aussi était là à son grand étonnement et il l’avait prise dans ses bras, sans un mot, simplement heureux de retrouver sa partenaire. Elle s’était endormie avec les deux hommes de sa vie et à son réveil, le lendemain, ils n’étaient plus là. De ce qu’elle avait compris, cela faisait déjà trois jours que la montagne était tombée et la vie reprenait son court. Kandar avait un peu plus de force et après une courte balade, épuisante, elle était revenue jusque ce qui lui servait de lit dans cette tente qui désemplissait.

Elle était occupée à discuter avec un de ses frères qui avait lui aussi été enfermé quand un nouvel arrivant attira son attention. C’était Heda et Kandar se releva lentement, faisant attention à ses appuis sur ses muscles faibles. Celle qui les avait sauvés vint jusqu’elle et la conteuse s’inclina respectueusement. Il n’y avait plus sur ses lèvres les sourires doux qu’elle avait l’habitude. Kandar avait survécu à un prix qu’elle ne savait pas encore estimer. « Heda. Que puis-je faire pour vous ? »

La montagne était tombée depuis trois jours maintenant, et beaucoup de choses restaient à faire. Lexa était par monts et par vaux – elle n’avait jamais vraiment comprit cette expression étrange – et elle ne trouvait que guère le temps de s’arreter pour penser à elle, ou aux gens qu’elle avait perdu  - ni à ceux qu’elle avait retrouvé, et qui étaient plus importants. Les morts sont partis. .  Mais enfin, elle trouvait le temps de faire quelque chose qui lui tenait à cœur, passant de tentes en tentes, de zones de soins en  infirmeries de fortune, elle visait d’un regard alerte les gens qui avaient survécus à la montagne. Les faucheurs restaient un grand chantier, mais il y’avait également les autres. Ceux qui étaient sortis des cages.  Ceux qui étaient traumatisés par ce qu’ils avaient vécus, et qu’ils avaient délivrés.  Parfois un visage lui disait quelque chose, et une once de fierté et de chaleur emplissait son cœur. Parfois, elle voyait l’interogation dans leurs yeux, et elle ne pouvait que faire une négation de la tête, incapable de leur dire que leur famille n’était plus. Ce n’était pas son rôle. Elle était Heda. L’unificatrice, la libératrice. Mais elle n’était pas ici en porteur de nouvelle.

Une forme attira son regard.  En plein bavardage – si elle pouvait employer ce mot – Kandar sembla noter immédiatement sa présence, et Lexa inclina la tête sur le coté. Sa cape trainant sur le sol, elle avançait désormais d’un pas vif vers la conteuse, le regard fixé sur la forme un rien famélique. «  Kandar. »  Elle inclina la tête doucement, son visage plus doux quand elle ne portait pas les peintures de guerre. «  Je suis ravie de te voir ici et debout. »  Elle ne voulait pas tout de go lui dire «  je suis heureuse que tu sois en vie » mais c’était bien ce qu’elle sous entendait. La conteuse avait été une amie d’Anya, la conteuse avait été une part de sa vie pendant quelques temps, lui apprenant l’histoire, et lui contant des choses qui la faisaient rêver. A l’époque. Avant qu’elle devienne commandeur quand elle n’était que second. Avant que les choses se corsent. Et puis après aussi. «  Comment te portes tu ? »  Au moins la question était la, et Kandar pourrait en faire ce qu’elle en voulait.  Lexa ne lui tiendrait pas rigueur si elle ne lui répondait pas, et après avoir vécu l’enfer, elle supposait qu’elle avait autre chose à faire que d’entretenir la conversation avec quelqu’un. Tout commandeur soit elle.  Elle devait cependant lui parler d’Anya, car peut être aurait elle apprit sa mort, mais de ses lèvres le choc serait plus… sincère. Peut être. Soit. Ça viendrait plus tard. Pour l'heure, elle attendait sagement.

Revoir Heda, c’était comme si Kandar retrouvait une vie oubliée. Une vie enterrée sous ce mois passé dans la montange – elle avait enfin su, et elle avait défailli. Kandar avait survécu pendant un mois, une expérience qu’elle n’aurait jamais voulu connaitre et elle était incapable de dire si elle était plus forte ou plus faible. Physiquement, elle considérait que c’était un miracle qu’elle soit toujours en vie, vu l’était déplorable de son corps. Peut-être aurait-elle des séquelles ? Quoiqu’il en soit, elle ne serait pas remise avant de longs jours, c’était évident. Et elle porterait des marques qui ne disparaitraient pas, là où les aiguilles des naumons s’enfonçaient dans sa peau pour le traitement par le sang. Et elle sentit un soulagement étrange naitre dans sa poitrine. Un soulagement de voir que celle qu’elle avait connu, enfant, était devenu un Heda qui pouvait changer les choses. Qui les améliorait. Même si elle aurait préféré que ces hommes de la montagne soient tous morts, elle était libre et c’était le plus beau cadeau qu’on puisse lui faire. A partir de là, Kandar ne pourrait que survivre.

« Je suis ravie de te voir ici et debout. » Kandar s’inclina quelque peu, touchée par les mots. « C’est à vos actes que je le dois, Heda. » Et à tous ceux qui avaient soutenu leur chef. D’autres conteurs lui avaient brièvement expliqué la bataille avec leur vocabulaire bien précis, la manière dont ils avaient d’enjoliver les récits absente, car il n’y avait aucune héroïsation à faire entre eux. Ils connaissaient les évènements, c’était le plus important entre eux. Tout comme le récit de Kandar serait transmis entre eux, une fois qu’elle prendrait le temps de raconter le cercle de feu, dernière témoin trigeda des évènements. « Nous, conteurs, louerons vos exploits sur tout le territoire, pour les années à venir. » Et plus encore. C’était sa manière de montrer sa gratitude, cette flamme qui brilla dans le fond de son regard alors qu’elle se reconnecterait avec ce qui était sa fibre, sa chair, comme le tatouage sur son cou l’attestait, de son rôle.

Déjà, la faiblesse dans ses jambes, dans ses muscles, se faisait ressentir et elle eut un signe de main vers sa couche. « Puis-je ? » Et après avoir reçu l’autorisation de Heda, elle retrouva le confort d’être assise, pas le moins du monde gênée de la pauvre constitution qu’elle affichait devant Lexa. Kandar n’était pas un guerrier, et elle avait survécu un mois dans des conditions misérables. Elle n’avait honte de rien. «  Comment te portes tu ? » Kandar retint un sourire sardonique, un qu’elle avait maitrisé dans les cages, alors que rien ne lui permettait de se divertir de ce désespoir constant qu’elle ressentait. Son visage resta fermé, si ce n’est pour la tension dans sa mâchoire qui se démarqua, incapable de savoir si elle devait sourire, ou si elle devait serrer les dents. « Faible et fatiguée. Comme vous pouvez le constater. » Le trigedasleng prenait ses accents sur sa langue, et elle retrouva ce plaisir de parler sa langue avec Heda. Dans les entrailles de la terre, il y avait eu des frères et des sœurs qui venaient de tous les horizons et Kandar s’était entrainée à parler avec eux, pour ne pas devenir folle et s’empêcher de tourner en rond. Il n’en restait pas moins que la langue de Polis était sa préférée. « Je vais de mieux en mieux. Ne plus être dans ces cages est une bénédiction. » Elle ne dirait pas qu’il lui était arrivé de rêvé qu’elle était encore dans le ventre de la montagne. Ce n’était qu’un mauvais rêve et la réalité paraissait, pour une fois, tellement plus agréable.

Kandar était une figure de l’enfance, qui ne disparaitrait jamais de l’histoire de Lexa. Elle était la conteuse, la femme vers qui la petite Nightblood apprenant à peine à combattre allait chercher des légendes et des traces du présent. Elle était la conteuse, parlant les voix des hommes pour raconter leurs exploits, ou parfois leurs méfaits. Elle était L’Histoire, et c’était cette Histoire, et ces histoires aussi, qui toujours avaient fascinées Lexa, avant même qu’elle ne soit Heda. Avant même que la cape ne tombe sur ses épaules, avant même qu’elle ne doive porter le monde. Kandar était une figure, que Lexa apprécierait toujours, et ses mots dans les différentes langues qu’elle parlait, étaient toujours des baumes dans son cœur, ou des motivations pour combattre. Kandar était LA conteuse. Elle n’était pas la seule conteuse des trigeda, mais elle était LA conteuse, qui restait avec Anya, elle était celle dont mini-Lexa attrapait les pans de la tunique avec le regard curieux. Et pourtant, elle n’était pas plus vieille qu’elle, pas trop. Et pourtant, ….  Soit. Lexa était heureuse que Kandar ait pu faire partie de ceux qui avaient été sauvés. Et même si ses bras auraient des traces à jamais, et même si son corps ne se remettrait peut être pas, elle était vivante, et libre, et c’était bien pour les vivants que toutes les batailles se faisaient.

«  C’est à vos actes que je dois, Heda. »  La tête de Lexa se pencha, touchée et fière, et elle redressa son regard pour fixer Kandar quelques instants. « Pas seulement les miens. Sans les skaikru cette guerre n’aurait jamais touchée à sa fin. »  Il y’avait une nouvelle lueur de fierté dans les yeux de Lexa. Comme si elle devait être fière des exploits realisés par l’alliance – elle le devait. L’alliance. Elle avait réussi ce que personne d’autre n’aurait fait -  Comme si parler des skaikru éveillait en elle une douce chaleur – ce n’était pas les skaikru en général, elle n’allait pas partir la dedans – comme si elle avait cette gloire à avoir unifier. – Elle l’avait. C’était brillant tout ce qu’elle avait fait -  Et elle avait de quoi être fière que Kandar et les conteurs songent à louer ces exploits. Elle espérait qu’ils n’oublieraient pas les skaikru. Elle savait qu’ils ne les oublieraient pas.

Kandar demanda à s’asseoir, et l’autorisation fut donnée immédiatement.   Lexa n’avait aucune objection à ce que la femme se repose, et elle culpabilisait presque d’être venue la déranger. Mais ça avait été curieux, interessé. Elle appréciait Kandar, et voulait le lui notifier à sa manière. Alors elle était la, et elle faisait preuve d’un rien d’inquietude, sans que trop de choses ne se lisent dans son regard. Kandar évoquait sa santé, et Lexa hocha la tête, la mâchoire serrée. Elle aurait voulu tuer la montagne entière pour ce qu’ils avaient fait subir aux siens. Mais elle n’avait pas pu. Elle ne devait pas penser à la vengeance. Elle ne pouvait pas se le permettre. «  Les choses changent ici. Tu verras. »  Et c’était peut être une bénédiction oui, que d’être sortie. Ca ne pouvait pas être pire n’est ce pas ? « J’espère qu’elles changeront en mieux. »

« Sans les skaikru cette guerre n’aurait jamais touchée à sa fin. » Ah, ces skaikrus. Kandar n’oubliait pas. Elle n’oubliait pas les flammes, elle n’oubliait pas la mort. Elle n’oubliait pas la rancune qui avait nourri ses veines quand aucune autre nourriture ne lui était donnée. Mais elle était plus que ça, la conteuse. Elle le savait. L’être humain se battait vers ses semblables pour des raisons de différences. Des croyances, des besoins qui entraient en contradiction. Elle savait, mais elle ne put retenir sa grimace, alors que, le souvenir le plus frais, le plus vif, remontrait à une bataille d’il y a plus d’un mois. Parfois, elle sentait encore la chaleur des flammes sur sa peau et elle s’interdit de penser à Anya. Kandar n’avait pas posé la question, mais elle savait. Et elle n’était pas prête à le reconnaitre. Que son amie de toujours n’était plus. Alors oui, se concentrer sur les paroles de Lexa était la meilleure chose à faire. Elle avait ordonné la paix et Kandar respecterait la volonté de Heda. Elle n’était pas une guerrière, mais elle comprenait parfaitement les rouages de la guerre. Les alliances, la vie, la mort. Les surprises d’un peuple descendu du ciel et les jeux de pouvoir qui avaient changé avec leurs arrivées. Dans des années, des dizaines d’années, les conteurs parleraient encore de cette période de leur histoire et Kandar enjoliverait la réalité, taisant les noms de ceux tombés au combat pour qu’ils rejoignent la mémoire collective des sacrifices.

« Les choses changent ici. Tu verras. J’espère qu’elles changeront en mieux. » Le ton était dur chez Heda et Kandar leva la tête vers son chef, un semblant de douceur se joua dans le fond des prunelles sombres de la conteuse. Elle revoyait la jeune adolescente qui voulait trop faire, qui avait peur de ne pas être à la hauteur (elle se demanda si c’était toujours le cas, bien qu’elle n’oserait jamais poser la question à Heda). Elle revoyait la fille s’émerveiller devant les dieux et les grands combattants qui vivaient encore aujourd’hui grâce aux mots qui se passaient de génération en génération. « Que vous le souhaitez fait qu’ils le seront, Heda. » Il y avait ce respect et ce profond dévouement au titre, à la personne. « N’ayez pas peur des jugements. Vous êtes un visionnaire. Le peuple comprendra, mais il lui faudra du temps. » Les gens voyaient moins loin que le commandant. Elle aussi, avait du mal à comprendre la miséricorde chez Lexa, mais elle était nécessaire et la mémoire saluait toujours les gestes qui rendaient grâce à l’humanité. Ils devaient se montrer plus forts que la rage, même si celle-ci était encore dans l’organisme de Kandar et qu’il lui faudrait du temps pour retrouver le confort que la perspective lui apporterait. Ce serait l’objet d’un long dialogue avec ceux qui partageaient le même rôle qu’elle. En attendant, elle n’avait pas le droit de se servir de son ressenti pour guider Heda dans la mauvaise direction. Elle savait faire la distinction entre son cœur et son esprit.

Lexa aimait les Skaikrus. Ou plutôt, le commandeur restait assez intéressée par ce qu’ils avaient encore à offrir. Ensuite, Lexa aimait une Skaikru. Mais ça, il était trop tot pour l’annoncer à qui que ce soit, et même si Kandar se rapprochait le plus d’une figure sororale, ce n’était pas le moment. Ce n’était pas la personne. Elle aurait aimé, Lexa, en parler à Anya, mais Anya n’était pas la et ne le serait plus. Mais Anya la regarderait avec peut être un peu de déception et lui dirait surement «  Rappelles toi Costia. »  avant de lui rappeler les devoirs du commandeur, la route sineuse et solitaire qu’elle devait prendre. Anya lui dirait encore que l’amour était une faiblesse, et elle tenterait de cacher cette tristesse de la voir en danger d’être heureuse. Peut être. Mais il n’y’avait personne. Et Lexa n’était plus une enfant qui avait besoin de tirer sa niron par la main pour s’officialiser. Il y’avait des combats qui se battaient tout seul. Ce n’était ni l’endroit ni le lieu pour y penser, et Lexa chassa de sa tête ces pensées sentimentales qu’elle ne pouvait pas se permettre d’avoir en tout temps. Elle appréciait les skaikru, et elle comprenait très bien que certains ne les apprécient pas, et elle comprenait très bien qu’ils avaient été ennemis. Mais elle savait aussi, que les anciens ennemis devenaient des alliés. Les Azgeda ne s’étaient ils pas eux même battus à leurs cotés ?

Les choses changeaient toujours, et c’était la encore ce que Lexa statuait, notant ce qu’elle espérait pour la suite. Avec Kandar, elle savait qu’elle pouvait parler, et elle espérait que la conteuse la tenait assez en estime pour exprimer son désaccord si il y’en avait un. Alors elle fixait avec ses grands yeux gris, les yeux plus sombres en face d’elle, et comme elle l’avait fait jadis, elle attendait une phrase. Avant c’était des legendes ou des histoires, maintenant, c’était un mot, qui la pousserait peut être à continuer.  Les mots vinrent. La mâchoire de Lexa se desserra un peu. «  Que vous le souhaitez fait qu’ils le seront, Heda. » Le respect de Kandar la touchait tellement. Probablement plus que d’autres. Et Elle hocha la tête. «  N’ayez pas peur des jugements. Vous etes une visionnaire. Le peuple comprendra, mais il lui faudra du temps. »  

Ca faisait chaud un peu les paroles de Kandar. Et Lexa savait, que ses mots étaient justes. Le peuple comprendrait. Elle ferma les yeux quelques instants, acceptant pour un temps limité la faiblesse qui la prenait. «  Et qu’en  est il de ceux qui ne comprendront pas ? de ceux qui voient encore les skaikru comme nos ennemis alors que sans eux la montagne serait toujours la ? »

Il y avait des personnalités qui étaient plus difficile à lire que d’autres, et Kandar, dans le doute, supposait que tant qu’on ne l’arrêtait pas dans ses propos, c’était que ses mots trouvaient une résonnance, quelque part, chez celui qui l’écoutait. Mais il n’y avait pas de doute concernant Heda, car elle connaissait le chef des clans depuis que Lexa était une jeune adolescence et la conteuse reconnaissant sans mal le faible changement dans les mimiques de la brune, quand ses mots éveillaient un sentiment. C’était l’expérience, c’était la fidélité. C’était son rôle, Kandar. De conseiller, à sa manière, en contant ce qui avait été. Car le futur se prolongeait toujours dans les traces du passé. C’était la raison pour laquelle l’homme était doté de mémoire ; ne pas oublier, tirer de leçons du passé. « Et qu’en  est il de ceux qui ne comprendront pas ? » Elle plissa un peu les yeux, Kandar, suivant la gestuelle de Heda. C’était rare, le doute. Pas interdit, mais c’était une vision si peu commune. Cela faisait bien des mois qu’elle n’avait pas vu Heda, mais elle la trouva changée, juste par cette phrase.

Elle ne dit rien. Elle qui avait le poids des mots en elle, connaissait leur importance et reconnaissait le rôle du silence. Ce lui de la patience, d’attendre. « De ceux qui voient encore les skaikru comme nos ennemis alors que sans eux la montagne serait toujours là ? » Kandar se gratta les veines, là où les aiguilles avaient l’habitude d’entrer, remarquant déjà que la peau qui guérissait garderait des traces jusque sa fin. Elle n’en avait pas honte, elle avait survécu et même si cela s’était fait au plus haut prix, elle était heureuse d’avoir à nouveau sa liberté. Et ça, oui, ça n’aurait pas été possible sans l’aide du skaikru. Aussi désagréable cette idée était. « Vous possédez l’esprit du commandant, Heda. Ceux qui ne peuvent se plier à vos décisions et à votre philosophie devront être ployés par la force. Vous l’avez déjà fait par le passé, il n’y a aucune différence. » Comme les clans qui avaient été rallié avec les guerres et qui étaient devenus des nouveaux alliés. Si la faiblesse était pointée du doigt, il suffisait d’écraser ce doigt. C’était la vision du trigedakru. S’ils étaient ouverts au passé et à une richesse qui aurait pu être perdue, ça ne voulait pas dire qu’ils pourraient être ouverts à tout.  

Sa voix s’éleva à nouveau, faible et fatiguée. Pourtant, elle ne portait aucune trace de jugement. Seulement celui du savoir et du respect. « Les ennemis deviennent des alliés, les alliés deviennent des ennemis. L’homme change et son allégeance fluctue avec lui. C’est à vous de le remettre sur le droit chemin. » Heda, son esprit, veillait sur eux et sa sagesse permettait de rendre leur peuple fort, leur permettait de survivre malgré les obstacles.

Kandar était pour Lexa la Sagesse. Si Anya avait été la Force et le Courage, si Costia avait été la Tendresse, Kandar était la Sagesse, et Lexa tenait particulièrement à avoir ses avis. Tout comme Lexa enfant avait tenu a avoir ses histoires - Que Lexa adulte serait également ravie d’entendre. Alors oui, Eventuellement, Lexa laissait passer le doute dans ses yeux et dans ses mots. C’était dur peut être, d’avouer une telle faiblesse, d’avouer qu’elle craignait éventuellement que sa décision amène des remous. Et c’était peut être stupide parce qu’elle le savait, parce que toute décision amenait son lot de complainte. C’était le propre de l’être humain. Mais voilà, parfois même le commandeur avait besoin de vocaliser ses craintes. Pas devant tout le monde. Non, juste devant des personnes de confiance, qui savaient la remonter.

Son regard fuit quelques instants, durant les quels Kandar reprit la parole. « Vous possédez l’esprit du commandant, Heda. Ceux qui ne peuvent se plier à vos décisions et à votre philosophie devront être ployés par la force. Vous l’avez déjà fait par le passé, il n’y a aucune différence. » Elle se mordit quelques instants l’interieur de la lèvre, et puis elle serra la mâchoire, et elle reporta son regard sur la conteuse. Elle avait raison. Elle était Heda. Et c’était peut être tout simplement ce qu’elle avait besoin d’entendre aujourd’hui. Et c’était peut être la simple raison pour la quelle ses pas l’avaient inconsciemment menés jusqu'à Kandar, pour que celle ci vocalise ce que leurs lois non écrites auraient dit, ce que les esprits des commandeurs avant elle, lui auraient eux aussi murmurés en reve. Kandar parla à nouveau. Et Lexa hocha la tête. C’était fort. C’était sage. C’était tout ce qu’elle attendait sans l’avoir attendu vraiment. Son regard determiné s’illumina un peu plus. « Et cette tache bien qu’ardue est une tache qu’executer m’honore. » Et elle espérait toujours être à la hauteur de ce que son rôle impliquait. Elle espérait qu’on ne vienne pas l’assassiner tout de suite parce qu’elle n’aurait pas respecté ce que les autres voulait, qu’elle n’aurait pas de faiblesse trop manifeste. Même si… Non. Ce n’était une faiblesse. Elle chassa cette pensée de sa tête.

Et quelques mots finalement avaient suffi à faire relativiser Lexa, qui ne ferait pas l’offense à Kandar d’evoquer ce moment de faiblesse, de presque inquiétude. La conteuse savait très bien ce qu’il s’était passé dans sa tête, Lexa, malgré tout, demeurait quelqu’un d’humain, à qui il arrivait d’avoir quelques méfiances, quelques doutes. « Désires tu que je te laisse te reposer ? » Elle ne voulait pas forcement partir. Elle aimait la compagnie – même silencieuse –de la conteuse, mais elle savait ce qu’elle avait vécu – et elle ne pourrait jamais le savoir entièrement- alors, elle ne voulait tout simplement pas s’imposer. Elle voulait juste.. Faire au mieux peut être ?

Kandar ne cesserait jamais de guider Heda, qu’elle soit à la limite de la mort, enfermée dans une cage, ou en convalescence. Il y avait des devoirs qui dépassaient la condition humaine et s’il était bien l’un des buts fondateurs des conteurs, c’était d’éclairer la vision de ceux qui les écoutaient. Cette tâche était d’autant plus important quand il était question du commandant. La souffrance ne comptait pas. La fatigue ne comptait pas. Kandar ne s’arrêterait jamais. Malgré les blessures et l’exténuation. Elle n’aurait jamais la foi pour repousser celle qu’elle avait vu grandir. Si le regard de Lexa avait changé, Kandar voyait toujours la petit fille aux cheveux bruns qui se taisait sagement dès que l’histoire commençait. Ici, s’il n’était plus questions des grands du passé, il était toujours question d’un grand, bien vivant. Et Kandar observa, malade et assise sur son lit, la vivacité regagné Heda, l’enflammer comme les mots avaient le pouvoir de le faire. « Et cette tache bien qu’ardue est une tâche qu’exécuter m’honore. » Il y eut un semblant de sourire, sur les lèvres abimées de la conteuse. Ca ne dura qu’un temps, tout juste quelques secondes. Sourire était douloureux, car il n’y avait plus vraiment cette joie de vivre chez Kandar. Mais il y avait la nécessité de survivre et c’est tout ce qui était suffisant pour la porter.

« Désires tu que je te laisse te reposer ? » Kandar, silencieusement, pencha la tête pour remercier l’attention de Heda. Si ça avait été possible, elle se serait reposée jusqu’à ce que les sévices qu’elle avait subi dans cette montagne disparaisse. Mais le monde était en mouvement et elle avait déjà trop raté de la réalité, Kandar. Ca la rendait malade d’y repenser, et ça la soignait, d’apprendre les évènements, se reconnecté avec le monde, à la manière si particulière des conteurs. Bientôt, elle retournerait à Polis, surement pour plusieurs mois. Le temps que son organisme se remette entièrement et que son esprit s’apaise. Puis, elle reprendrait les routes, traquerait les guerres et capturerait les faits divers. Cependant, il y avait encore un élément qui la démangeait et elle avait besoin de savoir. Kandar avait besoin de la confirmation du fantôme qui l’avait hanté depuis qu’une tête blonde avait surgi d’une bouche d’aération. « Avant que vous ne partiez, j’aurais une question. » Et il n’y avait plus cette sécurité qui était propre à son grade, à sa place dans l’univers. Non. Il y avait ce ton las, et fatigué, celui qui savait qu’une mauvaise nouvelle arrivait, et qu’il n’y aurait eu aucun moyen pour l’en empêcher. « Qu’est-il arrivé à Anya ? » Le nom était presque douloureux, mais à l’évocation de sa vieille amie, Kandar se souvint de la force de la guerrière, de sa dévotion, de son courage. Et il brula, dans le fond de ses yeux noirs, ce besoin de savoir, de reconnaitre la vérité. Aussi terrible était-elle.

Kandar n’était pas prête. Elle ne le serait jamais.

Mais il le fallait.

Le devoir du commandant était un devoir que Lexa appliquerait jusqu’aux dernières heures de sa mort. Alors qu’il soit difficile, qu’il soit fatiguant, que la tache soit ardue ou qu’elle soit emplie de difficultés, Lexa l’accomplirait. Toujours. Parce qu’elle était choisie pour être le commandeur, parce qu’elle honorerait cette tache. Et parce qu’elle le devait à son peuple. Elle leur devait tout. Et elle les porterait sur ses épaules, chacun d’entre eux et dans leur entiereté. C’était bien ça d’être l’Heda, d’être choisie pour être à leur tête. Et devant Kandar elle affirmait encore qu’elle exécuterait la tache jusqu’au bout. Parce que oui, peut être qu’il y’avait toujours cette part enfant d’elle, qui attendait que Kandar soit fière. Parce qu’elle était une grande sœur, un guide, l’incarnation de la sagesse. Parce qu’elle était l’amie d’Anya, et que Lexa l’avait tellement vu pendant des années où elle n’était encore qu’une enfant au sang noir et non encore le commandeur de tous. Kandar faisait partie et ferait toujours partie de ces gens dont l’approbation compterait. Et même si elle ne le dirait jamais totalement, ouvertement, elle était vraiment heureusement que Kandar soit sortie de la montagne. – Moins heureuse cependant qu’elle y fut prise-

Cependant, il fallait laisser la conteuse se reposer. Elle viendrait a Polis avec elle ensuite, mais pour l’heure, il fallait qu’elle prenne le temps de guerrir, qu’elle prenne le temps d’aller mieux, et Lexa ne voulait pas s’imposer dans ce moment. Alors elle voulait partir oui. Elle attendait comme une permission qu’elle n’avait pas à demander. Elle n’attendit pas trop, elle n’attendit pas plus. Elle allait probablement tourner les talons quand vint la question de Kandar. Ce qu’elle aurait voulu fuir, mais qu’elle savait ne pas pouvoir ignorer finalement. « Qu’est-il arrivé à Anya ? » C’était douloureux de l’entendre, et Lexa eut ce souvenir, cette image de Clarke déposant dans sa main la tresse de la guerrière. Lexa eut un point au cœur, qui ne disparaissait qu’en apparence, et c’est les yeux emplis d’une émotion qu’elle aurait voulu éviter de montrer qu’elle fixa Kandar quelques instants. Avant de se reprendre. Elle était Heda. Les morts étaient partis. Son regard reprit ce gris-vert presque métallique, qu’il avait le plus souvent. « Anya est morte. » C’était dit, et elle savait bien que ce n’était pas ce que Kandar attendait. Alors elle parla, et dit la vérité parce qu’elle ne savait pas dire autre chose. Pas à Kandar. Pas à ce propos. Pas maintenant. « Anya a été tuée par une balle skaikru. » Il y’eut un voile dans ses yeux qui disparu bien vite. « Sans elle, il n’y’aurait même pas cette alliance. Elle voulait mener Clarke jusqu'à moi, et en un sens, elle l’a fait tout de même » C’était ce qu’elle avait apprit. Ce qu’elle avait comprit de Clarke. Kandar méritait la vérité. Toute la vérité. Du moins à ce propos.

Anya était l’un des rares liens avec son passé. Kandar, plus que quiconque, car conteuse, savait que le passé n’était jamais oublié (elle, elle n’oublierait jamais Anya). Et plus que quiconque, savait ce qui se perdait quand les individus n’étaient plus là, emportés par le mort. Anya, elle avait connu Kandar quand elle était tout juste un enfant. Anya, surtout, elle avait connu la mère de la conteuse et c’était ce lien, qui était si particulier, aux yeux de la noiraude. Elle ne serait plus jamais l’enfant qui poursuivait les pas de sa mère. Maintenant, Kandar était la conteuse, uniquement la conteuse. Et le poids de la perte ne disparaitrait jamais. Car elle savait. Elle n’avait jamais arrêté de le sentir, et la gestuelle de Lexa fut suffisante pour confirmer les craintes. « Anya est morte. » Son diaphragme se bloqua et lentement, les épaules de l’ancienne captive s’affaissèrent. Il y eut un sursaut dans sa cage thoracique et elle fut partagée entre l’envie de rire, ou de pleurer. « Anya a été tuée par une balle skaikru. » Elle fronça les sourcils, Kandar, cherchant à comprendre. C’était Clarke, le skaikru, qui avait fait sortir Anya de sa cage. Devrait-elle aller interroger le leader ? Surement.

Ce n’était pas terminé, ça ne s’arrêterait jamais et le tremblement s’arrêta chez Kandar, ses yeux quittèrent la figure de Heda, alors qu’elle se força à prendre une profonde inspiration, abandonner cette apnée qui le menaçait. « Sans elle, il n’y’aurait même pas cette alliance. » Elle reprit une respiration plus brève, intégrant les propos de Heda. Était-ce ce que Anya aurait voulu, réellement ? C’était une guerrière, une grande combattante. Kandar avait été témoin de nombre de ses batailles et connaissait la hargne terrible de celle qui avait été le mentor de Lexa. « Elle voulait mener Clarke jusqu'à moi, et en un sens, elle l’a fait tout de même.» Ses doigts frottèrent le bord du lit de fortune, en un réflexe qu’elle avait gagné à la montagne, tandis que sa réflexion se construisait. C’était une chose. Une bonne chose. « Je vois. » Ce fut un peu plus rauque, alors que la tristesse menaçait encore d’attirer les larmes. Anya n’avait pas péri dans la montagne. Elle était allée plus loin, rendue une dernière humiliation à ceux de la montagne.

Si Kandar ne s’arrêta pas de gratter le lit, elle releva la tête et son regard était si noir, onyx ravivées. « Merci de me l’avoir dit. » Il y eut un temps en suspens dans l’air. Et le deuil était sur ses traits, et la tristesse était en son sein. Anya était si cher à ses yeux. Il en était ainsi pour Lexa aussi. « Je sais que ça n’a pas été facile pour vous non plus de l’apprendre. » Les mots furent durs à prononcer. Mais ils s’échappaient. Car elle fonctionnait ainsi, Kandar. Elle tirait la force des actes des autres, et l’offrait à ceux qui l’écoutaient. « Puisque tel était son souhait, vous honorez ainsi sa mémoire. »

Anya est morte. Il y’eut à ce moment précis dans le regard de Lexa toute la douleur qu’elle avait ressenti à ce moment précis, quand Clarke était revenu, lui tendant la méche de cheveux de son ancien mentor. Bien sur qu’elle était triste Lexa, et coupable aussi. C’était elle qui avait envoyé Anya enquêter sur els êtres venus du ciel, c’était elle qui avait donné les ordres, et qui avait envoyé Tristan à son aide après ça, parce qu’Anya n’était pas assez « efficace » selon le conseil. C’était elle. Tout était de sa faute, et si elle avait l’habitude des casualités que la guerre entrainait, des morts qui reposaient sur ses épaules, elle n’aurait pas imaginé perdre Anya de si tot. Et c’était stupide, parce qu’Anya était une guerrière, une bonne guerrière, et qu’elle était l’une de ceux qui avaient apprit à Lexa que l’amour était une faiblesse. Mais Anya était Anya, et elle était la figure la plus stable, la plus présente de la vie de Lexa. Oui. Le commandant avait été triste. Et ça se montra dans ses yeux. Quelques instants à peine, elle se ressaisit, offrant à Kandar tout ce qu’elle savait. Sans mentir. Les Skaikrus eux, avaient tués Anya. Les Skaikrus leur avaient arrachés Anya à toutes les deux, ils avaient arrachés la guerrière au peuple entier, et elle serait regrettée. Mais il y’avait du bon, il y’avait le positif d’Anya qui avait voulou entrainer Clarke vers le commandeur, et qui finalement les avait unis dans cette alliance, sans être la pour la voir. Et si parfois Lexa se demandait si c’était ce qu’Anya aurait vraiment voulu, si Clarke lui avait menti, elle ne pouvait pas aller sur cette voie. L’Alliance avait menée des bonnes choses et continuerait d’en mener. C’était tout ce sur quoi elle avait besoin de se reposer.

Le silence resta quelques secondes, Lexa fixa Kandar espérant que la conteuse ne s’éffondre pas. Elle la savait plus forte que ça, mais il y’avait la montagne derrière elle désormais, pesant sur ses épaules comme le poids de la souffrance absolue. « Merci de me l’avoir dit. » Elle hocha la tête. Silencieuse. « Je sais que ça n’a pas été facile pour vous non plus de l’apprendre. » La lueur revint quelques instants, mais le gris determiné la chassa. Il n’y’avait nul besoin de réponses. Elles savaient toutes les deux qu’Anya avait été importante, tant pour l’une que pour l’autre. Il y’avait juste la compréhension. C’était ainsi. Ca ne changerait pas. Et Lexa était soulagée en un sens de cette compréhension entre elles. Elles ne pleureraient pas Anya non. Pas ensemble, pas comme ça. Mais il était sur qu’elles la regretteraient. « vous honorez ainsi sa mémoire. » Elle réprima le je l’éspère qui était au bout de ses lèvres, et elle hocha la tête, serrant quelques instants sa lèvre inferieure entre ses dents. « Sha. » Et pour elle en un sens il n’y’avait rien à rajouter. Rester ici signifiait toucher d’avantage de sensibilité que ce qu’elle ne voulait offrir aux yeux des autres. « Elle sera regrettée. Mais nous continuons le combat. » Il y’eut un battement de silence, Lexa sembla chercher ses mots quelques instants, comme si toute la conversation la fragilisait finalement. « Je vais te laisser maintenant. Tu as besoin de repos Kandar. »

La douleur de la perte, Kandar ne la connaissait que trop bien (et serait amenée à la connaitre dans un futur proche, une fois encore, plus terrible et dévastatrice que pour le cas de sa vieille amie). Elle était familière avec la brulure, et le gouffre que les cendres entrainaient. L’absence était pire que tout et, réalisant que soudain, elle n’entendrait plus jamais les rires ni les remarques sarcastiques d’Anya, lui arracha un frisson. Mais elle ne pouvait pas faiblir, ni se morfondre sur son sort. La disparition de son amie avait apporté Clarke kom Skaikru jusque Lexa et de là avait découlé la chute de la montagne. C’était une victoire sans pareille et certainement un des buts pour lequel Anya se serait bel et bien battue. Elle ne pouvait pas oublier, non, et elle n’oublierait jamais, Kandar. Mémoire de son clan. Et le devoir qu’elle associerait à Anya ne serait fait qu’avec plus de cœur, plus d’ardeur.

Le deuil, lui, se ferait, au rythme de sa guérison. Et Lexa avait peut-être déjà fait son deuil. Le frémissement n’échappa pas à l’œil de la conteuse, car elle avait connu Heda avant que celle-ci ne soit choisie par l’Esprit du Commandant. Quand elle n’était qu’une initiée qui apprenait encore les voies de Polis. Et elle se mordit la lèvre abimée, continuant de gratter le bord du lit de fortune. Ne disant mot. Car Lexa était une force vivante et Kandar ne l’encouragerait pas à ployer. « Elle sera regrettée. Mais nous continuons le combat. » Le combat ne s’arrêterait jamais. Le bien du peuple serait toujours mis en danger, connaitrait des risques, des changements. Une âme était partie, mais combien de millier restait-il à défendre ? « Le combat ne s’arrête jamais. Il est ce qui guide nos vies. » Les guerriers étaient à ce service et peut-être que ce monde était leur Purgatoire. Il n’en restait pas moins que c’était le leur.

Un purgatoire qui leur accordait un repos, que certains avaient plus mérité que d’autres. Que certains avaient plus besoins que d’autres. « Je vais te laisser maintenant. Tu as besoin de repos Kandar. » La noiraud pencha la tête en guise de respect. « Je vais le faire, Heda. Je vous remercie d’être passé me voir. » Ce fut sincère, car Kandar n’était que sincérité. C’était important, pour elle, de retrouver ceux qui comptaient pour elle, être témoin de sa place dans ce monde, qui ne se résumait pas à une petite cage avant de se faire saigner.

Sur ce, elle s’autorisa finalement à s’allonger, en espérant qu’elle ne rêverait pas des entrailles de la montagne, son esprit filant vers la figure d’une guerrière brune qu’elle avait connu dans son adolescence.